Afrique centrale : les infrastructures restent trop peu financées

Mardi 11 Mars 2014 - 12:15

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Selon une étude de la Banque mondiale (BM) restituée le 10 mars à Yaoundé (Cameroun), l’Afrique centrale, la région africaine la moins dotée en infrastructures et par conséquent la moins économiquement intégrée, a réussi à mobiliser 7,7 millions de dollars de financements pour 23 transactions conclues entre 2003 et 2013, dont seulement 4% en faveur des infrastructures

L’étude a été rendue publique lors d’une conférence régionale placée sur le thème : « Financer le futur : développer les infrastructures en Afrique centrale ». Organisée à l’initiative du Fonds monétaire international (FMI), cette rencontre a connu la participation des représentants des dix pays membres de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Cééac), de financiers et d’autres parties prenantes.

Selon Arnaud Dornel, spécialiste principal du secteur financier à la BM intervenant à cette conférence, 21 pays d’Afrique subsaharienne ont conclu un total de 159 accords de financement de projets au cours des dix dernières années pour un montant global de 59 milliards de dollars.

« Cela représente une très petite part du marché mondial du financement de projets : sur la période 2003-2013, plus de 5 000 projets ont été conclus dans le monde, pour une dette totale de 2 000 milliards de dollars. L’Afrique subsaharienne n’en représentait que 3% », a-t-il déclaré.

L’étude place le Nigeria en tête du classement avec 17 milliards de dollars de financements. Viennent respectivement le Ghana (11 milliards), l’Afrique du Sud (10 milliards) et l’Angola (4 milliards), qui représentent à eux quatre 70% du total de cette partie du continent, grâce à quelques grosses transactions à l’exemple du champ pétrolier Jubilee au Ghana. L’analyse fait le point sur la situation en Afrique centrale. Elle a recensé 23 transactions dans la zone Cééac (Angola, Burundi, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine (RCA), République démocratique du Congo (RDC), Sao Tomé-et-Principe et du Tchad) pour un total de 7,7 milliards de dollars, soit 14% du total pour l’Afrique subsaharienne.

Ces financements, dominés par les industries extractives pour un montant de 7,4 milliards de dollars (96%), représentent une portion congrue de 4% pour les infrastructures, soit 0,3 milliard de dollars dont 10 projets pour le seul Angola uniquement dans le domaine du pétrole et du gaz.

Sur les 23 projets, note l’étude, seuls quatre se rapportent aux infrastructures, dont deux opérations dans le secteur des télécommunications au Cameroun et en RDC pour un montant total de 166 millions de dollars. S’y ajoutent une opération dans le secteur de l’énergie, précisément la centrale à gaz de Kribi au Cameroun pour 132 millions de dollars, et enfin un investissement de 119 millions de dollars dans l’agrobusiness au Gabon.

Dans son allocution d’ouverture, le ministre camerounais des Finances, Alamine Ousmane Mey, a souligné que les besoins en infrastructures, évalués à 93 milliards de dollars par an (15% du PIB) au cours des prochaines années, étaient énormes et cruciaux pour le décollage socioéconomique de l’Afrique subsaharienne. Il a relevé qu’à ce jour, moins de la moitié des financements requis était disponible et que le continent noir accusait un déficit de 50 milliards de dollars à combler par an, d’où la faible compétitivité des économies africaines.

Pour le ministre, le plus grand défi réside dans l’accès à l’énergie, car, a-t-il ajouté, « une trentaine de pays sont régulièrement confrontés au problème de pénuries d’électricité ». À commencer par le Nigeria, paradoxalement le premier producteur africain de pétrole, ou encore le Cameroun, première économie de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cémac).

Alamine Ousmane Mey a par ailleurs préconisé d’élaborer des stratégies nouvelles de financement et d’adopter des cadres de gestion de la dette afin d’éviter le surendettement. Il a plaidé pour la promotion de l’intégration régionale pour réaliser des économies d’échelle face aux coûts élevés des financements des infrastructures.

De son côté, la directrice adjointe du département Afrique du FMI, Anne-Marie Gulde-Wolf a suggéré une mise à niveau des infrastructures afin d’impulser un nouvel élan au développement de l’Afrique subsaharienne. Les performances économiques remarquables de plus de 5% de croissance du PIB en moyenne observées au cours des dix années écoulées dans cette partie d’Afrique étaient portées principalement par les recettes pétrolières. Anne-Marie Gulde-Wolf a en outre encouragé à investir dans la production de l’électricité et l’accès à l’eau potable puis aux services d’assainissement, deux secteurs névralgiques de nature à augmenter la productivité des entreprises pour le premier, et d’améliorer la santé des populations puis de permettre leur participation au développement économique de leurs pays pour le second.

La conférence de Yaoundé était organisée en prélude des assises continentales plus importantes prévues les 29 et 30 mai à Maputo au Mozambique sur le thème « Africa Rising », toujours à l’instigation du FMI.

Nestor N'Gampoula