DOSSIER/ Développement durable : Paris. La Global Conference appelle à bâtir un monde nouveauSamedi 11 Juillet 2015 - 14:23 La 10e édition de la Global Conference, rencontre annuelle des Ateliers de la terre, a pris fin le 8 juillet, dans le domaine de Chantilly. Pendant trois jours, les acteurs impliqués dans la recherche d’une société durable - leaders d’opinion, dirigeants d’entreprises, responsables politiques, pouvoirs publics, chercheurs, ONG, intellectuels, étudiants, artistes, experts, religieux, journalistes, représentants de la société civile, du nord et du sud - ont fait circuler la parole. (Encadré 1+ Photo1 Eric Bazin) Initiée il y a dix ans par Les Ateliers de la terre, cercle de réflexion dans la mise en relations d'acteurs concernés par les défis du développement durable, la Global conference a donné lieu à de nombreux débats au cours desquels intervenants et participants ont tenté d’apporter les clés de compréhension susceptibles d’infléchir les fonctionnements actuels de notre société. Des initiatives vertueuses ont été exposées, avec un mot d’ordre : la rupture. Rompre avec l’ancien modèle et aller ensemble vers plus d’humanité, plus d’intérêt général, était le fil conducteur de ces débats. Tous les intervenants ont déploré la situation alarmante de la planète. Ils ont appelé à inverser la tendance pour aller vers un nouveau modèle de développement intégrant les nouveaux savoirs et bâtir un nouveau monde plus respectueux de l’environnement, avant de se donner rendez-vous en décembre prochain à Paris à la Conférence internationale des Nations unies (Cop 21). Inter / Changer les comportements Pendant ces trois jours, il a notamment été démontré que le changement climatique impactait la santé, les sols, l’agriculture, l’air, et entraînait la multiplication des maladies vectorielles ; que les problématiques de santé n’étaient pas suffisamment prises en compte dans les différentes négociations sur le changement climatique ; que (2) les 2/3 des maladies que nous attrapons proviennent des animaux, de l’élevage industriel, de l’utilisation des bactéries. Les participants ont fermement appelé au changement de comportements. Ils considèrent la COP21 comme un moment clé pour faire entendre leurs préoccupations, et ont appelé à « un message sanitaire fort ». L’épidémiologiste des maladies émergentes Arnaud Fontanet a notamment insisté sur un changement de paradigmes pour éviter de nouvelles menaces. Les agriculteurs ont de leur côté dénoncé le soutien unilatéral apporté à l’agriculture industrielle. Ils ont souligné les conséquences de l’exportation des produits de consommation occidentaux sur la production locale africaine et ont dénoncé l’uniformisation de la consommation. Ils ont réclamé une agriculture durable et la « décarbonisation de notre mode de vie ». L’Afrique a été appelée à s’impliquer à la COP21, « pour montrer les méfaits de la globalisation ». Aux problèmes locaux, des solutions locales, ont déclaré les intervenants, regrettant l’image retenue de l’Africain : « un pion qui manque de moyens, dont l’avis ne compte pas » et militant pour une nouvelle gouvernance. Pour beaucoup, les questions africaines sont expressément mal traitées en Occident, notamment par la France critiquée pour ses postures caricaturales, schématiques, et ses perceptions archaïques du continent. L'éducation et son adaptation à l'emploi ont été évoqués comme un levier essentiel pour une Afrique performante. Pour cela il faut identifier les talents africains et les mettre à la disposition du monde de l’emploi ; réformer le marché de l’éducation ; motiver les jeunes à la création de leur job, former, mutualiser les énergies, trouver des catalyseurs pour les pépinières existantes, partager les expériences, et transmettre. Le rôle des médias comme « catalyseurs » et leur implication dans la COP21 a également été soulignée. Un rôle à la fois « facile et difficile », selon Lucien Pambou de la revue Géopolitique africaine. Facile grâce à la communication institutionnelle, et difficile car « globalisant », sans différenciation entre les préoccupations du Nord et celles du Sud, alors que le changement climatique est avant tout un problème territorial. Parmi les propositions on retiendra : « l’investigation par les télévisions ». A défaut, investir l’espace des réseaux sociaux. Inter / faire basculer le monde ancien vers un monde nouveau L'appel à un nouvel équilibre aura été le maître mot. (Photo2) Gérard Mestrallet, président directeur général d'Engie (GDF Suez) a notamment appelé à adapter les stratégies aux populations employées dans l’entreprise pour offrir une volonté nouvelle, enclencher un changement de culture, faire basculer le monde ancien vers un monde nouveau, digital, numérisé et « décarbonisé ». « J’attends un changement d’attitude du monde de l’entreprise, désormais convaincu qu’une catastrophe climatique, entraînera fatalement une catastrophe économique ». « Nous devons insister pour avoir un accord ambitieux et arriver à un prix définitif du carbone », a-t-il martelé en soulignant : "L'Afrique devient une zone à part entière." Engie souhaite s'y développer dans le cadre du basculement énergétique. Le premier projet qui sera exploité se fera en Afrique Centrale. Il s'agit d'un projet de liquéfacteur du gaz au Cameroun. L'avocat Wiliam Bourdon, président de Sherpa, a dénoncé pour sa part le « muselage du monde par la tyrannie court-termiste" et appelé "à de vraies ruptures à l’intégration des stratégies individuelles dans une action collective », (8) plaidant pour un rapport de force de peur que « les acteurs industriels nous laissent un monde en lambeaux ». "La rupture c'est assurer une dimension transgressive. Il n'y a pas de rupture autrement que par une sorte de prise de risque." Le directeur du centre de développement de l'OCDE, Mario Pezzini, a pour sa part souligné : « Il y a une rupture à faire dans les politiques publiques : abandonner les logiques sectorielles, pour construire les biens publics et inventer une nouvelle forme de gouvernance, au service de l’intérêt général." A l'issue de trois jours de débats de qualité, le cofondateur des Ateliers de la Terre, Eric Bazin a donné rendez-vous à l’Afrique dans les locaux de la Société d’encouragement de l’industrie nationale à Paris, avant la COP21 à travers notamment le lancement officiel du LAB - Land of African Business. 100 starts up viendront, grâce à cette initiative, partager leur expérience à Paris pendant 9 jours. Encadré (2)
1-Eric Bazin : ancien journaliste, il est cofondateur des Ateliers de la Terre, un Think Thank pour le Développement Durable et la RSE: « Les Ateliers de la terre souhaite être une force de propositions pour les négociations de la COP21 de décembre à Paris. La 10e édition de la Global Conference représente une étape clé pour les acteurs qui luttent contre le changement climatique. Nous avons besoin de business modèles inventifs ». 2-Les Ateliers de la Terre Fondés en 2006 à Paris, Les Ateliers de la Terre est un cercle de réflexion international qui vise à mettre en relation les acteurs concernés par les défis du développement durable. Sa vocation : rassembler et sensibiliser au changement global des modes de vie et de gouvernance, faciliter l’accélération de solutions concrètes, encourager l’innovation et produire de l’expertise pour alimenter la vision de long terme des décideurs. Noël Ndong Légendes et crédits photo :Photo 1 : Eric Bazin
Photo 2 : Gérard Mestrallet Notification:Non |