Interview. Éric de Lamotte : « Il n’y a pas de paix sans emploi »

Mardi 13 Octobre 2015 - 12:00

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Éric de Lamotte est le promoteur du festival Amani, événement qui se déroule chaque année depuis 2014 à Goma en RDC, et dont l’objectif est de promouvoir la paix et la réconciliation dans la région des Grands Lacs. Passionné du Kivu, il a pris désormais l’option de promouvoir l’entreprenariat auprès des jeunes lors du festival. 

Les Dépêches de Brazzaville : D’où vous est venue l’idée de créer le festival Amani ?

Eric de Lamotte : Depuis longtemps, on ne fait que parler de manière négative de l’Est de la RDC, alors que c’est une région magnifique qui mérite beaucoup plus que ce qu’elle n’a actuellement. En 2011, nous avons créé le foyer culturel de Goma qui regroupe de centaines de jeunes dans différentes activités artistiques et qui y suivent des cours. À la suite de cette création, nous avons décidé de mettre sur pied un événement afin de rassembler, par la culture, des ethnies et des nationalités différentes (congolaise, rwandaise, burundaise) et de promouvoir le vivre ensemble, la paix et la réconciliation dans la région par la culture. Le but est aussi d’attirer l’attention, de manière positive, sur cette région et donc de montrer qu’il y a une volonté de changement, une aspiration à une vie meilleure de la part de millions de personnes.

LDB : Comment évaluez-vous l’impact des deux précédentes éditions ? 

EDL : Notre action a commencé en 2012. La première édition a eu lieu en février 2014 et la deuxième en février 2015. Cela a été un succès à tous les niveaux. La première édition a rassemblé plus de 25.000 festivaliers, la deuxième près de 30.000 et j’espère que la troisième rassemblera 35.000 festivaliers. Nous avons réuni des artistes et des groupes traditionnels venant de toute la région. Ils ont chanté la paix ensemble. Pendant trois jours, des milliers de personnes sont venues assister au festival à Goma. Les habitants sont venus célébrer ce vivre ensemble par la culture et participer à un élan commun d’un avenir meilleur.

LDB : Pour la première fois, vous avez organisé un concert du festival Amani à Bruxelles. Qu’est-ce qui justifie ce choix ?

EDL : Les diasporas congolaise, rwandaise et burundaise sont importantes et très actives à Bruxelles. De nombreux Belges font également partie du comité d’organisation du festival Amani, en compagnie de Congolais, de Rwandais et de Burundais. C’est pourquoi nous avons trouvé opportun de passer le même message de vivre ensemble auprès des diasporas, en rassemblant à Bruxelles les artistes rwandais, burundais et congolais.

LDB : Vous pensez avoir atteint votre objectif ?

EDL : Le concert a été un énorme succès au niveau culturel et artistique. Les artistes des trois pays ont participé à cet évènement avec le même but chacun. Mais on est un peu déçu. Contrairement au succès de foule qu’on a connu à Goma, cela n’a pas été le cas ici à Bruxelles, malgré une très bonne communication qui a été faite dans toutes les diasporas via les ambassades et la télévision. La première édition à Bruxelles n’a pas été un énorme succès de foule. Nous allons évaluer la situation. Mais fondamentalement, le but a été atteint : faire passer le même message de paix que l’on passe à Goma lors du festival.

LDB : Vous en comptez en faire un rendez-vous annuel à Bruxelles également ?

EDL : Oui, je pense que ça pourra se faire chaque année. C’est un concert pré-festival Amani qui devrait prendre un peu plus d’ampleur les années prochaines. Mais c’est le festival Amani qui reste le plus important. La troisième édition se déroulera du 12 au 14 février. Notre objectif est que tous puissent y participer. Le droit d’entrée est de 1 dollar par jour et par personne. Ce qui rend le festival accessible à pratiquement 99% de la population. Nous offrons également de milliers de billets gratuits. Lors de la conférence de presse de lancement de la troisième édition qui se tiendra le 21 novembre prochain à Goma, nous annoncerons les noms des artistes internationaux invités.

LDB : Qu’est ce qui fait la spécificité de la troisième édition ?

EDL : Nous avons décidé de mettre en place un village de l’entrepreneuriat parce qu’il n’y a pas de paix sans emploi et nous voulons promouvoir l’entrepreneuriat auprès des jeunes. Il est important de promouvoir la paix et le changement par l’amélioration de l’environnement socio-économique. Cela n’est possible que par la création d’entreprises ou d’activités avec une valeur ajoutée. Pour cela, il est important de donner le goût d’entreprendre à la nouvelle génération. Dans ce village de l’entrepreneuriat, des jeunes entrepreneurs pourront expliquer le travail à d’autres jeunes, des institutions pourront informer les jeunes sur les procédures liées à la création d’une société et des banques pourront éclairer les participants sur les possibilités de financement. L’objectif poursuivi est celui de donner l’envie à des jeunes diplômés ou non de mettre sur pied leur petite société afin de créer de la valeur ajoutée et de l’emploi dans la ville et dans la région. Cette année également, en dehors du vivre ensemble, le festival mettra un accent particulier sur  la promotion de l’environnement.

LDB : Associez-vous un thème à chaque édition, en dehors du thème central relatif à la paix et au vivre ensemble ?

EDL : Le thème principal sera toujours celui de la paix tant que celle-ci n’est pas encore vécue de manière concrète. Mais ce n’est pas le festival Amani qui va ramener la paix à lui tout seul. Le festival se veut un élément d’un grand puzzle qui doit se mettre en place aux niveaux national, régional et international. La paix se construit et reste l’élément fondamental du festival. 

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

Éric de Lamotte

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