Samuel Kidiba : « Le patrimoine national est un bien commun, il faut le rendre public »

Lundi 14 Juillet 2014 - 18:31

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Déterminé à partager la substance du patrimoine national avec le commun des mortels, le directeur général du Patrimoine et des Archives, Samuel Kidiba, parle de la valeur de cet héritage dont il souhaite « un véritable inventaire », dans cet entretien qui lance la rubrique Patrimoine à lire chaque mardi dans nos colonnes

Les Dépêches de Brazzaville : La direction générale du Patrimoine et des Archives est de création récente, nous le savons. Qu’est qui a motivé le gouvernement pour prendre une telle décision ?
Samuel Kidiba : Il faut dire que cela est avant tout une volonté du département de la Culture et des Arts qui a constaté qu’il se posait un problème d’efficacité et de visibilité. En effet, depuis sa création en 1964-1965, ce ministère n’avait qu’une seule direction générale, celle de la Culture et des Arts. Le constat fait était que plusieurs entités culturelles n’étaient pas prises en compte, à l’instar des musées, des sites et monuments, des archives et autres. C’est ainsi que le ministre a pensé à la création de trois directions générales dédiées respectivement aux arts et lettres, au livre et la lecture publique et au patrimoine et archives. Cette dernière direction générale dont nous avons la charge s’occupe de tout ce qui concerne les musées, les langues, les sites (archéologiques, naturels et culturels) et les monuments, ainsi que les archives, documentation…

Au regard de tout cela, qu’est-ce qui, finalement, est patrimoine et qu’est-ce qui ne l’est pas ?
Est patrimoine ce qu’on doit inventorier, et l’inventaire entraîne ipso facto la protection. Cet exercice technique permet de savoir ce qui existe dans le pays comme biens culturels, mobiliers et immobiliers, archives, document à portée historique et qui ont été utilisés depuis longtemps et font date dans l’histoire du pays. Si nous prenons, entre autres, l’ancien port d’embarquement des esclaves à Loango, la cité royale de Mbé ou le site naturel de Nouabalé-Ndoki, vous comprendrez bien que cela a une portée historique, anthropologique et sociologique. Donc, ils doivent être inventoriés.

Justement, qu’est-ce qui a déjà été inventorié au Congo à la date d’aujourd’hui ?
Nous avons commencé par l’inventaire du patrimoine immatériel : le pont en liane dans la Lékoumou, certaines pratiques nutritionnelles telles que le Ntobambori dans le Pool, la fabrication du Tsam dans la Cuvette, etc. Nous avons également fait un pré-inventaire à Brazzaville sur quelques sites. Mais, pour être sincère, on n’a jamais fait un véritable inventaire du patrimoine du Congo, parce que c’est une activité qui doit se faire chaque année, sinon tous les deux ans. De plus, un inventaire doit être thématisé. Il peut, par exemple, être lié aux biens immatériels, aux biens mobiliers (masques, poteries, vanneries...) ; cela peut être aussi des monuments historiques, des langues, des contes, etc. Pour le moment, nous sommes en pourparlers avec l’Unesco pour faire un inventaire qui va commencer par Brazzaville. Notre ville capitale est, en effet, une ville qui vous parle par rapport à son passé et à ses sites et monuments.

Pour parler et faire parler toutes ces valeurs, votre direction générale va animer, en partenariat avec Les Dépêches de Brazzaville, une rubrique hebdomadaire consacrée au patrimoine congolais. Qu’est-ce qu’il en est ?
Le ministère de la Culture et des Arts pense qu’il faut dire à l’opinion nationale et internationale ce que nous faisons. Pour cela, depuis la création de notre direction générale, en 2010, nous avons organisé des séminaires à l’intention des responsables et des agents du département. Chaque fois, les séminaristes ont mis en avant l’importance de communiquer sur l’existence des biens culturels dans notre pays. Et, donc nous avons pensé que Les Dépêches de Brazzaville, qui sont largement diffusées au Congo et à l’étranger, peuvent être une excellente fenêtre ouverte sur le patrimoine du Congo. Nous avons trouvé une oreille attentive au niveau de la direction. Ensemble, nous allons présenter chaque semaine un aspect du patrimoine culturel du Congo.

Quel est l’intérêt pour le public de connaître ce patrimoine ?
Le patrimoine national, vous le savez bien, n’appartient pas au ministère de la Culture et des Arts. Il s’agit d’un héritage, un bien commun légué par les ancêtres. Quand il est classé patrimoine mondial, il appartient au monde entier. Donc l’intérêt est de rendre à l’opinion nationale et internationale ce qui lui appartient.

Quel message avez-vous à l’heure du lancement de cet espace ?
C’est souhaiter que le public réagisse aux informations que nous allons donner. S’il y a des gens qui pensent pouvoir nous aider à mener à bien ce travail de collecte, de traitement et de diffusion des informations relatives au patrimoine congolais, leurs propositions seront les bienvenues.

Propos recueillis par Thierry Noungou

Légendes et crédits photo : 

Photo : Samuel Kidiba, directeur général du Patrimoine et des Archives. (© Adiac)