Fiston Mwanza Mujila : « Moziki littéraire est un échange triangulaire entre trois continents, trois villes et trois amis »

Lundi 17 Novembre 2014 - 17:30

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La veille de la clôture de la Fête du livre, la soirée du samedi 15 novembre, l’assistance était toute ouïe face au jeune écrivain accompagné de sa complice Bibish Mumbu dont ils écoutaient avec un certain plaisir les lectures à l’Espace culturel Texaf-Bilembo. Leur venue à Kinshasa, qu’il dit avoir trouvé intéressant, avait pour but la présentation de Kin Kiesse, un livre écrit sur trois continents qui est en fait une anthologie constituée des textes de leur fameux « Moziki littéraire » dont il nous touche un mot.

Fiston Mwanza Mujila en pleine lecture de Solitude 41  Les Dépêches de Brazzaville  : C’est quoi au juste ce fameux Moziki littéraire  ?

Fiston Mwanza Mujila  : Moziki littéraire est un collectif à trois têtes composé de Papy-Maurice Mbwiti, Marie-Louise Bibish Mumbu et Fiston Mwanza Mujila, il qui fonctionne sur trois continents. Je suis basé en Autriche à Graz, Papy est à Kinshasa et Bibish à Montréal au Canada. À travers lui, nous avons envie de repenser le commerce triangulaire. Dans notre cas, il s’agit d’un échange triangulaire, c’est-à-dire qu’il s’effectue entre trois continents, trois villes et trois amis. Nous nous fixions chaque fois des thèmes sur lesquels nous écrivions et Africultures offrait de la visibilité à nos textes en les publiant sur son site à chaque fois. Ainsi le lecteur de Guang Zou, Bucarest ou Lomé pouvait y avoir accès.

LDB : Mais à vrai dire, quel sens Moziki littéraire revêt-il pour vous ?

FMM : Moziki a un sens profond : « Nous sommes des amis, nous travaillons ensemble, nous nous estimons. Nous savons, je sais qu’en travaillant avec Bibish et Papy, je gagne et j’apprends quelque chose. Et donc pour moi Moziki, ce n’est pas seulement un collectif, mais c’est une famille, une amitié parce que nos familles se connaissent. Et donc Moziki, c’est un pays, une ville, une famille, une région, un clan, mais aussi une poésie, une littérature. C’est comme l’on dit Kin Kiesse, c’est un cri de joie et de folie ».

LDB : Au lieu de lire, vous hurliez les textes Solitude 41 et Solitude 57, pourquoi donc ?

FMM : J’écris souvent mes textes pour qu’ils ne soient pas lus à basse voix mais plutôt crachés, aboyés. Ils cherchent à reproduire les bruitages des trains-marchandises, le souffle d’un pays en panne d’essence. Mes textes sont faits pour la musique aussi.

LDB : Quel serait au final le coup de cœur de tous vos textes ?

FMM : Moi je n’ai pas de coup de cœur parce que chaque texte a été écrit, ou son thème suggéré dans une situation particulière. C’était quelque chose d’instantané, chaque thème me rappelle un événement que j’ai vécu et comment je me suis mis à l’écrire. Et donc, je n’ai pas vraiment de coup de cœur parce que chaque texte a sa particularité, sa saveur.

LDB : Le fait de vivre loin du pays, a-t-il influencé votre écriture ou vous donne-t-il un regard différent sur le pays ?

FMM : Il y a un regard différent déjà parce que je vis en Autriche. J’y ai découvert des auteurs autrichiens et allemands, germanophones mais aussi la littérature congolaise. Ma lecture a changé et donc forcément, quelque chose a changé aussi parce que je suis loin du pays et j’ai un rapport avec lui à partir de l’extérieur par rapport à la Francophonie. Du coup, cela influence énormément l’écriture, la fiction, la littérature et la façon de vivre.

LDB : Qu’est-ce qui vous permet de garder le lien avec le pays à part les coups de fils de la famille ou des amis ?

FMM : Je viens souvent au pays et j’écoute la musique congolaise. J’ai toujours un pied au pays parce que mon nombril y est enterré. Et donc, je peux partir n’importe où, au Brésil, au Nicaragua mais je finirais dans ce pays parce que le Congo c’est un pays encombrant. Encombrant dans le sens où il vous poursuit partout. Parce que l’on porte ce pays où que l’on soit. Et même quand vous êtes entrain de dormir, il s’introduit dans vos rêves.

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo : Fiston Mwanza Mujila en pleine lecture de Solitude 41