Lutte anti-racisme : une Blanche se fait passer pour une métisse pendant 20 ans

Vendredi 19 Juin 2015 - 22:17

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Rachel Dolezal, 37 ans, a les cheveux crépus, le teint hâlé. Elle est intégrée dans la communauté afro-américaine de Spokane où elle vit et c’est une figure importante des droits des Noirs dans l’État de Washington. Elle occupe un poste de médiateur indépendant pour la police, enseigne les études afro-américaines à l’Université et préside localement une section de l’une des associations de défense des droits civiques les plus importantes du pays : la NAACP (National Association for the Advancement of Colored People). Tout cela ne fait pas d’elle une jeune femme métisse comme elle le prétend depuis 20 ans. Et la vérité vient d’éclater.

«Êtes-vous Africaine-américaine ? Je ne comprends pas votre question ».

Vendredi 12 juin, un journaliste de la chaîne de KXLY lui demande face à la caméra : «Êtes-vous Africaine-américaine ? » Rachel Dolezal hésite avant de répondre «Je ne comprends pas votre question». Ses parents, tous deux Blancs et Américains ont ensuite révélé que leur fille se faisait passer depuis des années pour ce qu’elle n’est pas. Photos à l’appui, ils la montrent adolescente, chevelure blonde et lisse, la peau pâle.

Qu’est-ce qui a poussé la jeune femme à vivre dans le mensonge pendant tant d’années ? Les postes qu’occupaient Rachel Dolezal ne demandaient pas à leur récipiendaire d’être noirs. Pourtant, elle aurait rempli un formulaire de la ville en indiquant être en partie noire, blanche et de sang indien. La révélation a laissé perplexes l’association et les autorités, posant des questions sur la sincérité de son engagement. Puis est venu le temps des explications, mardi dernier, à la télévision américaine. Rachel Dolezal a brisé le silence en déclarant s’être «auto-identifiée avec l’expérience noire » depuis sa plus jeune enfance.

Une famille en guerre contre elle-même

Chez les Dolezal, il y a les parents, la fille biologique, le fils biologique et quatre enfants noirs, adoptés. Des parents qui dénoncent leur fille, ladite fille qui met en doute sa filiation avec eux, qui affirme également avoir été victime d’agressions sexuelles par son frère biologique, qui faisait passer l’un de ses frères adoptifs pour son fils et qui se faisait assister en public d’un homme noir qu’elle présentait comme son père… et puis la mère de Rachel, Ruthanne Dolezal réfute les accusations et n’hésite pas à déclarer que «Rachel veut nuire à sa famille biologique ». Un capharnaüm familial énorme qui explique la grande confusion autour de cette affaire.

Pourquoi on n’aurait pas le droit de se «réinventer», se demande Neil Macdonald de la chaîne CBC News en évoquant le cas du changement de sexe de Caitlyn Jenner aux États-Unis, en évoquant aussi le «transracialisme». C’est d’ailleurs ainsi que s’est revendiquée Rachel Dolezal à la télévision. La sociologue spécialiste des questions raciales Nacira Guérif Souilamas explique au site LesinRocks : «Le transracialisme participe de l’ordre racial. Il consiste à revendiquer une autre identité que celle à laquelle on est racialement affiliée. Sauf qu’il y a une hiérarchie entre ces races. Être dans une logique transracialiste, c’est chercher à échapper à l’ensemble des discriminations insupportables qui sont associées à l’identité qui nous est imposée. Cela peut se faire de manière physique (se décolorer la peau par exemple), sociale ou comportementale ».

Alors que la polémique s’étend, plusieurs personnalités afro-américaines ont pris la parole, dont l’auteure Tamara Winfrey Harris qui a relevé que «La moyenne des Afro-américains est grossièrement un quart blanche (...) Qui accepterait le Président Obama, élevé par une mère biologique blanche et des grands-parents blancs aussi, comme un homme blanc ? Personne. J’accepterai de voir Ms Dolezal aussi blanche que moi seulement quand la société pourra m’accepter aussi blanche qu’elle ».

 

Morgane de Capèle

Légendes et crédits photo : 

Aux Etats-Unis, Rachel Dolezal s'est fait passer pour une métisse pendant 20 ans

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