Les Dépêches de Brazzaville : Auelles sont les raisons qui expliquent que vous êtes restés fermés si longtemps ?
Jean-Claude Faignond : Effectivement, le bar était fermé suite à un incendie déclenché à l’espace, dû, selon les constations, à un court-circuit. Depuis la relance des activités, nous voyons que les gens peu à peu viennent passer du bon temps ici, et surtout se fidélisent. Nous avons rouvert le 17 novembre, à l’occasion d’une double cérémonie : remise du logo de Brazzaville à l’Unesco dans le cadre de l’inscription de la ville au sein du Réseau des villes créatives et en même temps, réouverture du bar-dancing.
Quels sont les jours où les gens affluent à l’Espace Faignond ? Comment faites-vous pour maintenir l’ambiance qui a fait le succès de ce bar historique ?
Les dimanches sûrement. Avec les spectacles que livrent Les Bana Poto-Poto, orchestre qu’a créé mon frère aîné Bienvenu Faignond, nous faisons le plein. L’endroit rappelle l’ambiance d’une certaine époque. Toutefois, pour retrouver la fréquentation des années 1960, c’est un peu difficile car les habitudes des Congolais aussi ont un peu changé. Les dimanches, plutôt, on retrouve un peu cette chaleur d’antan, mais en semaine c’est vraiment difficile.
Comment expliquez-vous qu’en semaine que les gens ne pensent plus à se distraire ?
Autres temps, autres mœurs ! Mais sérieusement, je pense que c’est dû à la chaleur, parce que nos espaces climatisés fonctionnent mieux en fin d’après-midi, pas avant. Les espaces terrasses sont moins fréquentés aux environs de 12h-14h comme vous pouvez constater. On a plus de monde vers 16h-17h, quand justement la chaleur baisse.
Qui sont vos clients, des Congolais qui reviennent de l’étranger ou des locaux ?
On a de tout. Le Poto-Poto cosmopolite, les Congolais de la RDC, ça c’était hier. Aujourd’hui, ce sont surtout des Brazzavillois, des Ponténégrins ou des Congolais qui reviennent pour les vacances et viennent se distraire. Des Européens aussi de tout rang. À la réouverture, plus de soixante ambassadeurs étaient présents. Il y a des gens qui viennent découvrir. D’autres viennent de l’étranger, des pays africains et ne repartent pas sans y refaire un tour.
Faignond aujourd’hui, c’est quoi?
C’est d’abord un cadre accueillant dans l’esprit du concepteur de ces lieux, feu Joachim-Émile Faignond, notre père. Une musique internationale de l’époque de papa, mais aussi de la musique cubaine, de la RDC bien entendu, de Luambo à Kabasele qui se sont produites en ces lieux. Nous faisons réécouter leurs morceaux. Plus tard il y a eu des grands ensembles qui ont évolué ici, même des associations de femmes qui venaient d’un peu partout pour faire la fête. On essaie, de relancer tout cela. Le 8 mars dernier, des femmes ont choisi cet endroit pour leur journée.
Qu’est-ce qui a fait votre succès de l’époque, pourquoi tout le monde parlait de Faignond ?
Je pense que ce succès peut s’expliquer par l’idée de Faignond-père qui aimait la musique, il aimait bien s’amuser. C’est à la fin de son contrat militaire qu’il a eu l’idée de créer le bar. Lorsque le général de Gaulle a tenu son dernier discours dans la capitale de l’AEF (Afrique équatoriale française) et de la France libre, la Communauté française lui a fait don de tout le matériel de sonorisation dont s’était servi de Gaulle pour amplifier sa musique au sein de l’espace Faignond. Une autre raison, selon moi, c’est le fait que les Belges à Léopoldville interdisaient la boisson forte à cette période, ce qui fait que toutes les grandes manifestations où l’on pouvait surtout boire de l’alcool se tenaient ici. Puis, aussi, les relations de papa avec le public qui fréquentait ce bar dancing. Voilà ce qui peut expliquer que le bar ait connu une forte fréquentation.