Bill Kouélany : « La réputation des Ateliers Sahm a gagné l'international »

Lundi 25 Août 2014 - 10:48

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Du 8 au 28 septembre 2014, les Ateliers Sahm vont à nouveau accueillir les amoureux de l’art venus du Cameroun, de RDC, du Sénégal, du Bénin, du Togo, de Pointe-Noire et bien évidemment de Brazzaville. Un festival qui a pour mission, entre autres, d’améliorer les conditions de travail des artistes, leur donner les moyens de se faire connaître sur la scène internationale et stimuler leur créativité, et inscrire une nouvelle génération d’artistes congolais et critiques d’art sur la carte de la création contemporaine. Nous avons rencontré Bill Kouélany, directeur artistique, qui nous parle de la troisième édition qui s'annonce…

Les Dépêches de Brazzaville : Une nouvelle édition, donc, bien évidemment, des surprises… Pouvez-vous nous parler brièvement de cette édition ?
Bill Kouélany : Cette troisième édition aura lieu du 8 au 28 septembre 2014. Sont attendus une dizaine de jeunes créateurs venant du Cameroun, de RDC, du Sénégal, du Bénin, du Togo, de Pointe-Noire, pour rencontrer et échanger avec les jeunes artistes de Brazzaville.

Après le thème de l’eau, quel est le thème de cette édition, et pourquoi ce choix ?
Le textile… Il s’agit de rassembler des artistes du continent autour du thème du textile pour le penser historiquement, philosophiquement, économiquement, esthétiquement, éthiquement, religieusement, et dans la perspective de la mondialisation. Les vêtements jouent un rôle très important dans la société, nous sommes définis par ce que nous portons. Ici se pose donc la paradoxale question du pagne africain – qui implique aussi celle de savoir ce que signifie être africain aujourd’hui : reflétant l’image africaine, ce qui a la réputation d’être typiquement africain est un produit d’importation, l’exemple nous est donné avec le wax hollandais. Les artistes seront appelés aussi à réaliser des œuvres en textile, le textile abordé simplement comme matière constitutive de l’oeuvre sans forcément tenir compte de sa signification formelle, intellectuelle.

Sur quels critères les participants de cette édition ont-ils été sélectionnés ? Et en combien de groupes seront scindés les participants lors de ces retrouvailles ?
Tout le long de l’année, nous recevons des demandes de résidence de création de jeunes artistes africains et du reste du monde. La réputation des Ateliers Sahm a bel et bien traversé les frontières. Il y aura trois ateliers : critique d’art, vidéo et peinture.

Comment s’est fait le choix des formateurs ?
Nous avons reçu le dossier du critique d’art sénégalais Alioune Badiane par courriel, parmi tant d’autres de la section Aica des critiques d’art du Sénégal. Le plasticien Abdoulaye Konaté est une figure majeure de l’art contemporain du Mali. Sa recherche se développe autour de la matière. Le tissu est son principal matériau de création. J’ai eu à faire plusieurs expositions avec lui : à la Documenta de Kassel en Allemagne, à la Fondation Blachère en France, au Sénégal… La vidéaste malgache Môta Soa nous a été recommandée. Sa démarche, ses objectifs de carrière à long terme à Madagascar et à l’échelle internationale nous ont convaincus de l’inviter.

Qu’attendez-vous de cette troisième édition ?
Nous nous sommes fixé des objectifs dès la création des Ateliers Sahm en 2012 : contribuer à améliorer les conditions de travail des artistes, leur donner les moyens de se présenter sur la scène internationale, stimuler leur créativité, inscrire une nouvelle génération d’artistes congolais et de critiques d’art sur la carte de la création contemporaine. Et c’est cela que nous poursuivons édition après édition contre vents et marées.

Pouvez-vous nous parler des différents prix ? Et quels sont les avantages pour les artistes de participer à cette édition ?
Nous offrirons du matériel, comme d’habitude, peinture et caméra, car il nous importe que les artistes continuent de travailler en dehors de ces rencontres. La Fondation Blachère accueillera de nouveau le lauréat du premier prix de cette année. Et en critique d’art, le lauréat fera le voyage au Sénégal avec les Ateliers Sahm pour la biennale Dak’art 2016. Mais la motivation première ne doit pas être l’acquisition d’un prix, le fait de participer est en soi un avantage. Les Ateliers Sahm sont un centre de partage de savoir. Ces rencontres sont donc des moments privilégiés du donner et du recevoir.

Un des lauréats de l’année dernière est en ce moment à la fondation Blachère en Suisse. Pouvez-vous nous en parler brièvement ?
En effet, Van Andréa est le lauréat du premier prix de la peinture de la deuxième édition. Il sera en résidence à la Fondation Blachère en novembre. La Fondation Blachère se trouve en France. Actuellement, il est en Suisse invité par le groupe de travail Gästeatelier Krone Aarau avec lequel les Ateliers Sahm développent un partenariat en terme d’échanges d’artistes. Van Andréa est donc le premier artiste congolais à se rendre en Suisse, les autres suivront.

Pouvez-vous nous parler de la programmation et des différentes activités lors de cette édition ?
Cette édition s’est enrichie du volet cinéma animé par le français Dominique Wallon, ancien directeur général du Centre national de la cinématographie, et président fondateur du Festival des cinémas d’Afrique du pays d’Apt. Au cours de ces rencontres, le représentant du festival sera également appelé à animer un séminaire d’information sur les cinémas d’Afrique, de leur émergence après les indépendances à la période actuelle. Nous invitons les cinéastes congolais à rencontrer ce grand homme, à lui montrer leur film. Le Festival des cinémas d’Afrique du pays d’Apt organise depuis douze ans une manifestation qui est devenue la plus importante rencontre annuelle en France consacrée à la création cinématographique africaine. Les Ateliers Sahms souhaitent s’ouvrir au domaine cinématographique, et le Festival des cinémas d’Afrique va l’accompagner pour la mise en place d’une activité de formation dans ce domaine.

Quel bilan faites-vous des deux dernières éditions ?
Notre objectif après les deux premières éditions était de présenter des artistes des deux Congo à la biennale de Dak’art 2014, nous avons tenu ce pari avec succès. En deux ans d’existence des Riac, nos actions sur le plan national et à l’international parlent donc d’elles-mêmes : nous avons favorisé des rencontres entre jeunes artistes congolais, crée un réseau interafricain, suscité des passions en critique d’art, mit à l’étrier des artistes congolais à la pratique de la vidéo d’art, fait voyager de jeunes artistes, journalistes et critiques d’art au Cameroun, en RDC, au Sénégal. On note aujourd’hui la naissance d’un autre centre d’art contemporain à Brazza sous l’impulsion de ces éditions. Tout compte fait, malgré les difficultés financières, ce n’est que du bonheur.

Propos recueillis par Annette Kouamba-Matondo