Attentats terroristes de Paris : la France se savait visée

Samedi 14 Novembre 2015 - 16:00

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Plus de 10 000 hommes mobilisés depuis le début de l’année pour surveiller quelque 830 points sensibles sur son territoire, la France veille en connaissance de cause.  

État d’urgence, renforcement des contrôles aux frontières, conseil des ministres extraordinaire, deuil national : les autorités françaises ont réagi promptement aux attentats terroristes survenus dans la nuit du vendredi 13 novembre, en plein cœur de Paris, faisant plus d’une centaine de morts et des dizaines de blessés dont certains grièvement. Ces actes insoutenables ont soulevé un émoi général en France et à l’étranger, ainsi qu’en témoignent les nombreuses réactions de condamnation de la part de plusieurs dirigeants du monde.

Il semble que l’alerte sur la menace qui pesait sur la France ait été donnée depuis les attaques terroristes perpétrées en début d’année (7,8 et 9 janvier) dans la capitale française, contre Charlie Hebdo, les forces de l’ordre et les clients du super marché Cacher. Dix-huit personnes avaient trouvé la mort au cours de ces événements qui avaient marqué les consciences par leur extrême violence, en particulier le sang froid avec lequel leurs auteurs donnaient la mort à des inconnus désarmés. À ce titre, le 13 novembre est une récidive qui montre que les instigateurs et les exécutants de ces attentats ne sont pas prêts de désarmer.

À l’instar des attaques du mois de janvier, celles du 13 novembre ont été revendiquées par l’Organisation État islamique contre laquelle combat une coalition de pays dont la France. Des témoignages recueillis auprès de quelques rescapés et relayés par la presse française ont indiqué que certains assaillants reprochaient à Paris de s’être engagé en Syrie et en Irak. C’est donc, pourrait-on dire, en représailles à la présence des forces françaises au sein de cette coalition que les djihadistes importent la guerre en plein cœur de Paris.

Des experts signalent la posture délicate dans laquelle se trouve la France aujourd’hui, car ceux qui agissent en terroristes sur son territoire ne sont pas des étrangers. Ou ne le sont plus comme ce fut le cas dans les années 1970-1980. Ce sont à présent de jeunes Français, nés et grandis chez eux, en France, qui se sont radicalisés. De tous les pays européens, poursuivent les analystes, la France est celui qui compte plus de djihadistes ayant fait allégeance à l’Organisation État islamique. Au mois de mai dernier, d’après les chiffres communiqués par le ministre de l’Intérieur français, Bernard Cazeneuve, à la Commission d’enquête sur la surveillance des filières djihadistes de l’Assemblée nationale, on comptait un peu plus de 1 683 Français partis combattre en Syrie et en Irak.

Des statistiques qui donnent le tournis et compliquent le travail des services de sécurité, car en même temps qu’augmente le nombre de jeunes français en partance pour les zones de conflit, en même temps se produit le mouvement inverse de retour d’ex-combattants djihadistes sur le sol français. Quelque 4000 « suspects » seraient concernés par des activités qui appellent au renforcement de la surveillance policière autour de ce qu’ils font. La France est donc en guerre contre un ennemi qui n’est pas toujours facilement repérable et les attentats du 13 novembre en sont sans doute la preuve.

Des questions à se poser...

Ces attentats tombent si mal pour la France qui doit accueillir, dans deux semaines, l’important sommet mondial sur le climat. François Hollande et son gouvernement y travaillaient avec une telle détermination qu’il est évident d’affirmer qu’avec ce qui est arrivé, les doutes plombent le succès de cette rencontre sur un double plan. En termes de participations, d’abord parce que les mesures prises sur l’État d’urgence et le contrôle aux frontières ont besoin d’un peu de temps pour être évaluées. En termes de décision ensuite, car dès lors que le cœur n’y est plus à l’ouvrage chez l’hôte de la rencontre, le calendrier des discussions pourrait ne plus s’appliquer comme prévu. C’est un coup dur pour la ville Lumière, Paris, qui après la COP21, cette année, doit accueillir, l’année prochaine, l’excitante Euro 2016 de football. Comment redonner confiance aux Français, comment réarmer les Parisiens de leur liberté d’aller et venir, de fêter, danser, se promener, prendre de l’air, fréquenter les musées et d’autres lieux de spectacles et de mémoire ? Tel est le défi que le gouvernement français doit relever maintenant.

S’adressant à ses concitoyens au lendemain des attentats, le président français a promis un « combat impitoyable » contre les terroristes. C’est vrai que se trouvant sur plusieurs fronts, la France doit être courageuse. Elle était prévenue au regard des dispositions que ses hautes autorités avaient prises comme rappelé plus haut, elle l’est encore plus aujourd’hui car ses campagnes en Syrie, en Irak, au Mali, en Centrafrique, et bien avant cela, en Afghanistan et en Libye, lui ont attiré autant de sympathie que de haine.

La France peut néanmoins se consoler de ce qu’elle n’est pas seule dans ce combat contre le terrorisme. La chaîne de solidarité qui s’est formée spontanément pour condamner les attentats qui se multiplient sur son sol permet de croire qu’elle a le soutien de ses partenaires. Mais ce soutien doit aller au-delà de la complainte, il doit épouser une approche globale des relations internationales de sorte qu’entre les États s’établisse un dialogue de tous les instants en mesure de leur assurer une stabilité bénéfique aux peuples qui les habitent.

Gankama N'Siah

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