Ebola : dangers pour les aspects méconnus de la maladieJeudi 5 Février 2015 - 18:24 Sur le front de la lutte contre l’épidémie, les nouvelles se suivent mais ne se ressemblent pas. La lutte contre l’épidémie d’Ebola, surtout dans les trois pays d’Afrique de l’Ouest où la maladie a le plus lourdement sévi depuis un peu plus d’un an, Guinée, Sierra Leone et Libéria, enregistre des avancées notables. Les essais des vaccins, notamment italiens en Sierra Léone, et japonais en Guinée, donnent des résultats encourageants. Le tout dans un contexte où l’OMS affirme que le tableau général est à la décrue. A ce jour, l’Afrique et le monde ont enregistré quelque 9.000 morts sur un peu plus de 23.000 cas reconnus de contamination au virus Ebola depuis décembre 2013. Le Favipiravir (Avigan), produit par une filiale de la société japonaise Fujifilm ; le ChAd3, développé par la firme britannique GSK (GlaxoSmithKline) et notamment produit par l’Italie, ainsi que le RVSV-ZEBOV de l'agence de santé publique du Canada (PHAC) sont actuellement les trois vaccins testés sur des volontaires dans les trois pays avec des succès avérés. Mais les scientifiques invitent à tempérer l’optimisme : la maladie n’est pas encore totalement vaincue. D’ailleurs jeudi, l’OMS a fait savoir que jamais depuis le début de cette année, les cas n’avaient été aussi nombreux que ce mois-ci. La presse britannique a révélé mercredi et des organisations humanitaires le soulignent : dans la préoccupation bien compréhensible de combattre d’abord le mal, une donnée essentielle a été négligée. Il s’agit de ce que les médecins appellent, si l’on en croit le Daily Mail, du Syndrome post-Ebola (PES). Par l’octroi de produits de soins avancés ou par un effet d’immunité naturelle, 5 à 10.000 (chiffres de l’ONU) personnes infectées ont été guéries d’Ebola en Afrique de l’Ouest. Mais nombreux d’entre ces anciens malades se plaignent aujourd’hui d’effets collatéraux : problèmes de vision, perte de cheveux et de mémoire et même crises d’anxiété. Les chercheurs italiens indiquent qu’il a bien été décelé de telles complications après l’administration du Chad3, mais ces inconvénients finissent par disparaître d’eux-mêmes. Dans tous les cas, il manque suffisamment de recul à la communauté scientifique qui a dû agir dans l’urgence pour savoir si les trois vaccins exposent aux mêmes désagréments et si ceux-ci sont durables ou passagers. Ebola est une réalité complexe, qui mêle à une grave problématique de santé publique des aspects sociologiques, scientifiques et même commerciaux. L’université d’Oxford qui œuvrait au Libéria a dû interrompre ses recherches. Certains laboratoires ne sont pas loin d’affirmer que le recul spectaculaire de la maladie ne rend plus la découverte d’un médicament suffisamment rentable. « Pour parvenir à des résultats probants, il fallait conduire le test (de la trithérapie d’Oxford, Ndl) sur un échantillon suffisamment représentatif de malades, ce que le recul du nombre des personnes infectées ne garantit plus », a expliqué MSF qui œuvre dans ce pays. Le paradoxe de la situation est donc que le recul significatif de la maladie puisse aussi sonner le glas de la recherche active contre elle. MSF prévient toutefois : la maladie n’est pas encore arrivée au point de son anéantissement et de son innocuité définitifs. Pour l’heure, les personnels de santé qui ont été ou qui sont encore sur le terrain sont donnés en exemple dans leurs pays, en Italie et en Grande-Bretagne. Dans ce dernier pays, le premier ministre David Cameron annonce que son gouvernement va décerner une médaille honorifique de reconnaissance aux quelque 2.000 Britanniques qui se sont déployés en Sierra Leone pour combattre l’épidémie. L’Italie, qui est l’autre pays qui s’est distinguée dans cette lutte par le nombre de volontaires envoyés, envisage elle aussi une « médaille de la santé ». La ministre de la santé, Beatrice Lorenzin, en avait fait l’annonce lors de la cérémonie marquant la guérison du Dr di Fabrizio Pulvirenti. Ce médecin de l’ONG italienne Emergenzy, fut infecté en Sierra Leone. Il a été soigné en décembre-janvier dans les structures de l’hôpital Spallanzani, à Rome. Guéri, il annonce qu’il va retourner en Sierra Léone. Lucien Mpama |