Germain Guymack : roi de la peinture ponténégrine

Jeudi 8 Septembre 2022 - 20:24

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Paysages naturels, portraits abstraits, représentations de Tintin au Congo… Voici les peintures hautes en couleur exposées depuis des décennies sur le parvis de la poste de Pointe-Noire. Pendant toute promenade dans le quartier de la gare, il est impossible de ne pas remarquer le talent des artistes qui contribuent au charme de la ville océane.

Germain Guymack est l’un d’eux, il expose ses œuvres sur les marches de la poste depuis 1981.

Pendant son enfance à Pointe-Noire, Germain et ses quatre frères observaient avec attention le travail de leur père, le grand peintre Jean Roger Guymack. “Notre père travaillait d’abord à l’école de Poto Poto puis il s’est installé devant ce bâtiment avant 1968”, explique Germain Guymack assis sur les marches de la poste devant ses sculptures et ses peintures. C’est à la mort de leur père que les quatre frères ont décidé de rallumer le flambeau en devenant eux aussi artistes peintres.

Bien qu’il soit le fils d’un peintre, c’est tout seul que Germain a perfectionné son coup de pinceau, “je suis vraiment autodidacte… Mais je pense qu’il y a quand même eu une sorte de transmission du talent de peintre, ça coule un peu dans nos veines”, raconte-t-il.

Si ce peintre autodidacte vend ses œuvres devant la poste depuis plus de 40 ans, son business est aujourd’hui moins fructueux et les clients se font rares. “Ces dernières années, il y a moins d'appréciation de l’art… A cause de la crise économique, beaucoup de sociétés ont fermé et de nombreux étrangers sont partis alors qu’ils étaient nos principaux clients”, déclare M. Guymack avec une pointe d’amertume dans la voix.

A l'époque où les étrangers pullulaient dans la ville, de nombreux collectionneurs d’art ancien le contactaient “ dans les années 80, beaucoup d'étrangers portaient un intérêt pour l’art ancien et je partais à pied, à la chasse aux objets anciens, aux vieux masques ethniques dans  les villages congolais”. Depuis, l'intérêt de ses clients pour l’art ancien a diminué et l’artiste de 54 ans se contente de vendre ses tableaux et ses sculptures devant la poste.

Depuis ses débuts en 1981, l’artiste a même dû adapter son style de peinture aux goûts des clients exigeants. “ Dans les années 80, on était beaucoup dans le réalisme, on peignait beaucoup de paysages de villages… mais les temps changent, aujourd’hui, beaucoup de clients veulent des tableaux abstraits et des portraits”, explique-t-il en désignant quelques tableaux exposés au soleil. “La vie de peintre n’est pas facile, mais on se bat car on a des femmes et des enfants”, souffle Germain, comme pour s’encourager.

Pour boucler leurs fins de mois et propager leur art aux nouvelles générations, les artistes de la poste proposent des formations de peinture qui durent six  mois.  Dans leur atelier appelé “la voûte des artistes” caché sous une structure en béton arrondie juste en face de la gare de Pointe-Noire, ils partagent leur passion pour l’art à tous ceux qui souhaitent affiner leur coup de pinceau.  

Mais aujourd’hui, ce père de famille  ne souhaite pas transmettre son métier à ses cinq enfants, “ la peinture maudit son maître, et je ne veux pas que mes enfants passent par ça, (...) je sens que mon art n’a pas de valeur ici’, explique-t-il. Dans les prochaines années, le peintre sculpteur rêve de pouvoir voyager plus et partager son art avec d’autres cultures, “dans les autres pays et en Europe, ils ont une valeur de l’art. Mais ici non, quoique l’on fasse”,  se désole M. Guymack.

 

Nessrin Ali Ahmad

Légendes et crédits photo : 

Germain Guymack, artiste peintre

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