Interview. Reddy Amisi : « Brazzaville la ville magnifique, j’arrive »

Vendredi 7 Octobre 2022 - 16:30

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Reddy Amisi a annoncé deux concerts mémorables ce week-end à Brazzaville. En dépit d’un programme surchargé à cause des concerts qui se tiennent actuellement à Kinshasa, il a interrompu une séance de répétition pour s’entretenir avec notre rédaction. 

Le Courrier de Kinshasa (L.C.K.) : Depuis septembre dernier, votre nouvel album intitulé « Bailo Canto » est sur le marché. On parle de plusieurs chansons mémorables, dont « Carte de visite », « Je t’en prie », « Merci Maman » et « Camarade ». Parlez-nous un peu plus de cet album et surtout de l’accueil du public après une longue pause ?

Reddy Amisi (R.A.) : Pour l’accueil du public, il m’est difficile de me prononcer dans l’immédiat. En effet, mon dernier opus remonte déjà à plus de dix ans. Entre temps, j’ai habitué mon fidèle public à un nouvel album de Reddy Amisi tous les deux ans. Pour la sortie de « Baïlo Canto », j’ai pris une pause pour réfléchir sur ma carrière. Ne dit-on pas qu’il faut parfois reculer pour mieux sauter ? Aujourd’hui, je confirme le lancement d’un nouvel album sur le marché. Comme vous le dites si bien, il y a plusieurs sujets : « Carte de visite », « Mama merci », etc. Je recommande cet album à tous les mélomanes et pourquoi pas à tous les Congolais et au monde. Mon équipe s’attèle à réunir les premières réactions Dans l’ensemble, l’accueil est élogieux et chaleureux. Certains fans me collent l’étiquette d’éducateur de masse, tandis que d’autres classent mes œuvres dans la catégorie de « Musique intelligente » (rires).   

L.C.K. : Vous avez choisi de baptiser l’album « Baïlo Canto » en hommage à Papa Wemba. C’était important pour vous de lui rendre cet hommage ?

R.A. : Le nom de « Baïlo Canto » vient directement de Papa Wemba. Il m’a surnommé ainsi lors d’un concert livré dans les années 1984, alors que j’interprétais la chanson « Petite Gina ». Papa Wemba m’a choisi pour faire le vocal, et il m’a surnommé à cette occasion Baïlo Canto. Je lui ai fait un clin d’œil dans le choix du nom de mon nouvel album. Pour la seconde partie de votre question, il était important de lui rendre cet hommage. J’ai travaillé avec lui pendant vingt ans. Papa Wemba m’a tout appris de la musique. Six ans après sa mort, je ne peux que lui rendre cet hommage pour témoigner de ma reconnaissance. Je ne lui dirai jamais assez merci.

L.C.K. : Vous avez réalisé de nombreux featuring dans cet album, notamment celui avec Héritier Wata. Beaucoup de Congolais gardent en tête votre mémorable duo avec le défunt Dindo Yogo. Pour eux, vous êtes parmi les artistes qui ont révolutionné le featuring dans la musique congolaise. Pourquoi ce choix artistique ?

R.A. : Non, je n’ai pas révolutionné le featuring qui a existé, d’ailleurs, dans la musique congolaise bien avant moi. Il y a eu des duos de choc avec Sam Mangwana et Ndombe Opetum, Rochereau et Franco (Album Lisanga ya banganga) ainsi que d’autres géants de notre musique.

L.C.K. : En tout cas, le duo avec Dindo Yogo a été un bel exemple de collaboration entre deux grands de la musique. Par ailleurs, vos chansons ont résisté à l’épreuve du temps…

R.A. : Je n’ai fait que réaliser mon rêve. J’estimais que Dindo Yogo avait une voix unique en son genre. Vers les années 1975, il a été dans le groupe « Maquis » qui a chanté à l’époque la chanson « Lola muana ». J’avais moins de 15 ans, et déjà très fan de Dindo Yogo. Je tenais à faire ce featuring avec lui. C’est la même chose aujourd’hui avec Sam Mangwana que je mets au même rang que d’autres grands comme Ntesa Diambu et Josky Kiambukuta. En outre, il s’agit d’un mélange qui se justifie aussi par la réalité de la mondialisation. De leur vivant, ces gens d’expérience ont accepté de partager avec nous leur savoir-faire. A notre tour, nous essayons également de partager notre expérience avec les plus jeunes, comme Wata.

L.C.K. : Dans le nouvel album, vous avez approfondi vos thèmes de prédilection qui touchent essentiellement le vécu quotidien. Reddy Amisi, comment définiriez-vous votre musique ?

R.A. : S’il faut définir ma musique, je fais de la rumba. Lorsque nous déclarons nos chansons à la Sacem (France), la Sabam (Belgique) ou la Soneca (République démocratique du Congo), il y a une rubrique qui concerne le genre musical. Et il est bien écrit « rumba ». En fait, la rumba est notre identité culturelle, notre façon de vivre et même de s’habiller. Aujourd’hui, nous essayons de « métisser » cette musique pour la rafraîchir. Pour le reste, je tiens à ce que ma musique soit consommée sans gêne dans les familles, voire dans les milieux religieux.   

L.C.K. : Reddy Amisi serait-il tenté par les nouvelles tendances qui influencent actuellement la musique congolaise, surtout au niveau des jeunes artistes ?

R.A. : Vous parlez de la nouvelle vague ! Ce n’est pas notre musique. Moi, je viens de l’école de Papa Wemba, lui-même venait de l’école de Rochereau et de Zaïko. Je suis fier de mon identité. Il ne faut surtout pas se limiter à copier les autres, au risque de faire disparaître notre propre style. Vous vous appelez Laurent, je ne peux pas vous appeler François. En définitive, je suis fier de revendiquer ma musique, la musique de chez moi. Et puis, notre musique a bien triomphé en Afrique depuis la nuit des temps. En abandonnant ma musique pour faire autre chose, je trahis ma propre identité. J’ai composé « Miss Okito » à 16 ans et « Zakina » à 17 ans. Plus de quarante ans plus tard, ces tubes marchent toujours. Nous avons énormément de bons témoignages sur la chanson « Bomengo ata kala ». La liste n’est pas exhaustive.

L.C.K. : Ce week-end, vous êtes attendu à Brazzaville pour des productions musicales. Parlez-nous un peu du lien particulier entre vous et le Congo de l’autre rive ?

R.A. : Oui, j’ai à cœur de faire un spectacle unique au Congo Brazzaville. Je suis très attaché aux Brazzavillois, et ils m’ont rendu la pareille en de nombreuses circonstances. Nos deux peuples sont en communion. Je vous raconte une petite anecdote : il y a eu une rumeur qui circulait avec insistance sur mes « origines ». Chaque fois que j'allais au Congo Brazzaville, on disait que j’allais chez moi (rires). J’ai de nombreux amis à Brazzaville, je peux vous citer, par exemple, Ange Pongault, Rémy Ayayos, etc. Effectivement, quand je me produis au Congo Brazzaville, je me sens chez moi.

L.C.K. : Comment se présente le programme ?

R.A. : Je donne un premier concert le 8 octobre à 19 h au restaurant bar Bolingo, à La Corniche. Le second concert se tiendra le lendemain 9 octobre, toujours à 19 h, au Privilège club. L’orchestre Casa Do Canto sera au grand complet pour offrir aux Brazzavillois un concert digne de Reddy Amisi.

L.C.K. : Peut-être un dernier mot pour vos fans qui vous attendent de pied ferme à Brazzaville ?

R.A. : Je suis très heureux de venir à Brazzaville après une si longue absence. Je profite aussi de votre micro pour saluer un pote qui m’a produit là-bas, en l’occurrence Serge Mayebo. Je suis très excité à l’idée de revenir dans la capitale verte pour m’y produire de nouveau. Je demande aux Brazzavillois de venir nombreux pour écouter mon groupe. Et puis, il y aura des anciennes chansons mythiques comme « Bomengo ata kala », « Orphelin », « Justice », « Mbongwana ya Guy », etc. Le répertoire est tellement immense que j’invite les Brazzavillois à venir nombreux à mes deux concerts.

 

Propos recueillis par Laurent Essolomwa

Légendes et crédits photo : 

Photos 1 et 2 : Reddy Amisi, artiste musicien de la RDC

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