Italie : la région de la Vénétie se mobilise pour la libération de ses missionnaires enlevés au Cameroun

Vendredi 30 Mai 2014 - 15:35

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Le Cameroun et l’Italie sont sans nouvelles des deux prêtres et de la religieuse canadienne enlevés à Maroua-Mokolo en avril

Quel lien y a-t-il entre la secte islamiste nigériane Boko Haram et la Vénétie, une région du nord-est de l’Italie ? À première vue aucun, mais à première vue seulement. Car depuis le début du mois d’avril, deux missionnaires italiens de cette région qui œuvraient dans le diocèse camerounais de Maroua-Mokolo sont aux mains de ces extrémistes. Venus en voisins, ces derniers n’ont eu qu’à franchir la frontière poreuse entre le Cameroun et le Nigéria, une zone habitée par les mêmes populations, pour réussir leur enlèvement. Armés jusqu’aux dents, les fondamentalistes ont opéré dans la nuit du 4 avril, ont encerclé la paroisse Saint-Marc de Tchere-Tchakidjebe et kidnappé les trois serviteurs de Dieu.

Giampaolo Marta (57 ans, vicaire de paroisse) et Gianantonio Allegri (47 ans, curé) sont tous deux originaires de Vénétie. Les preneurs d’otages ont également enlevé la sœur Gilberte Bissière, une religieuse canadienne, et les ont contraints à franchir avec eux la frontière pour aller se terrer dans quelque coin de savane, côté nigérian. Et depuis, aucune revendication, aucune demande particulière, aucune justification. Mais tous les doigts pointent la secte islamiste Boko Haram très coutumière de ce modus operandi au Nigéria. Au Cameroun également, la secte, qui mène un violent activisme anti-occidental et anti-chrétien, s’était déjà signalée par des faits similaires.

En effet, Boko Haram avait revendiqué les enlèvements, en 2013, dans cette même région, du père Georges Vandenbeusch et de la famille Moulin-Fournier, tous Français, qui avaient ensuite été relâchés au début de cette année. Si, au Cameroun, la mobilisation des forces armées semble évidente, en Italie, l’affaire n’avait jusqu’ici fait l’objet d’aucune publicité particulière. À la limite, l’enlèvement par la même secte de plus de 200 jeunes filles nigérianes il y a un mois avait eu plus de retentissement que celle de ces deux missionnaires. C’est ce déséquilibre dans l’information que tente de briser le président de la région de Vénétie depuis quelques jours. Luca Zaia craint que le silence ne joue en défaveur des victimes qui risquent à tout instant la mort.

Il estime qu’il faut « se mobiliser à tous les niveaux pour faire entendre au monde entier qu’une religion doit toujours être synonyme de paix et de fraternité et non de pratiques abominables comme l’enlèvement, les tortures ou, pire, l’assassinat de personnes qui ne sont coupables que de professer une foi différente ». Le président de région estime par ailleurs que les prières de l’Église catholique sont utiles, mais que le ministère italien des Affaires étrangères doit aussi entrer concrètement en action pour obtenir la libération de ses citoyens.

Des messes et des prières sont récitées chaque jour dans le diocèse de Maroua-Mokolo pour que les trois otages soient relâchés. Dans une tribune ferme, le cardinal camerounais Christian Wyghan Tumi, ancien archevêque de Douala, a récemment enjoint les islamistes à revenir à des sentiments de croyants. Car la religion est paix et fraternité : « La voie de la violence ne mène à rien », soulignait-il. On ne peut pas dire si et à quel point ce genre de condamnation agit sur ceux que, même au Nigéria, on appelle les « fous de Dieu ». Mais Luca Zaia ne veut pas se résigner à une attente chapelet en main.

Sur les réseaux sociaux, il a lancé la campagne #bringbackourmissionaries (rendez-nous nos missionnaires) à l’instar de la campagne mondiale réclamant le retour dans leurs foyers des adolescentes nigérianes enlevées par la secte. « Il est normal que la communauté ecclésiale se resserre en prière autour de l’évêque. Mais la Farnesina [le ministère italien des Affaires étrangères, NDLR] doit accomplir aussi des pas plus décisifs vers les autorités africaines pour mettre fin à cette affaire incroyable et aider nos missionnaires qui sont venus sur ces terres par amour et par extraordinaire générosité, des gestes qui reçoivent une telle récompense ! », ajoute Luca Zaia.

Lucien Mpama