Italie: L’Eglise aux prises avec les politiques sur l’immigration

Samedi 22 Août 2015 - 11:15

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La très catholique Italie se découvre anticléricale après les pesantes critiques des évêques sur la gestion de la question de l’immigration.

C’est un évêque, au nom presque prédestiné, qui a mis le feu aux poudres. Mgr Nunzio Galantino (Nunzio = nonce, ambassadeur du Vatican, Ndlr), secrétaire de la conférence des évêques, s’est élevé contre le populisme autour de la question sur l’immigration.  Mgr Galantino s’en était d’abord pris aux « racoleurs de quatre sous qui disent des choses extraordinairement bêtes pour quelques votes ». Puis, il avait remis une couche contre l’ensemble du gouvernement, accusé de n’être pas à la hauteur des enjeux du moment, parce que traitant la question des migrants sans grandeur de vue.

Pour sa première sortie, tout le monde avait vu dans la prise de position de l’évêque une attaque contre le mouvement populiste de la Ligue du Nord qui soutient une politique de tolérance zéro face à l’immigration, appelant à les renvoyer tous chez eux. « Il ne faut pas africaniser l’Italie », martèle à longueur de meetings Matteo Salvini, le charismatique leader de la Ligue. « Si le pape veut des immigrés, il n’a qu’à les prendre chez lui au Vatican », a-t-il dit.

Un peu plus tard, il a rectifié le tir : « je n’ai rien contre l’Eglise dans son ensemble, moi le catholique pécheur. Je m’en prends à un évêque communisant, pour ne pas dire plus », a soutenu M. Salvini. Il n’empêche : même le gouvernement de l’autre Matteo, le premier ministre Matteo Renzi, s’est senti touché par cette critique du haut-prélat, jugée « injuste » et « démotivante ». Le fondateur de la communauté Sant’Egidio, le très catholique Andrea Riccardi avait, en effet, estimé qu’« il manque une vision d'ensemble. Les factions politiques jouent une vilaine guerre électoraliste, réduisant un phénomène global, complexe et inarrêtable à la seule urgence des débarquements. Il faut à tout prix raisonner ».

« Nous faisons jusqu'au bout notre travail de grande démocratie », a répondu le ministre de l'Intérieur, Angelino Alfano. « Nous sauvons des vies et nous rapatrions ceux qui ne fuient pas la guerre ou les persécutions. Nous faisons un métier différent de l'Eglise ». Différent peut-être, mais pas pour cela plus efficace aux yeux de Mgr Galantino car l’Italie, selon lui, ressemble à « un puzzle d'ambitions personnelles au sein d'un petit harem de cooptés et de fourbes ». Or, a-t-il pesamment attaqué, le peuple n’est « pas seulement un troupeau à conduire et à tondre ». Propos incendiaires et attaqués de partout, au point où Mgr Galantino a été invité par certains de ses pairs à se faire plus « diplomate » et moins présent sur les médias.

Il devait prendre la parole jeudi à une rencontre dans le Trentin pour rendre hommage à la figure d’Alcide de Gasperi, un catholique italien fervent donné comme symbole du service par la politique. Il a renoncé à se présenter préférant envoyer son discours qui a été lu par d’autres. A Rome, le pape François a publié un message dans lequel il rappelle que « migrants et réfugiés nous interpellent », et que ce défi appelle « la réponse de l'Evangile de la miséricorde ».

Lucien Mpama

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