Justice internationale : le président kenyan accepte de se présenter devant les juges de la CPILundi 6 Octobre 2014 - 19:30 Le chef de l’Etat Uhuru Kenyatta a annoncé le lundi 6 octobre qu’il répondra à la convocation de la Cour pénale internationale (CPI) qui doit faire le point de la préparation de son procès. Le chef de l’Etat kenyan est accusé de crimes contre l’humanité par la CPI après les violences électorales de 2007 et 2008 qui avaient fait plus de 1000 morts et entraîné plus de 600 000 déplacés de son pays. « J’assisterai à titre personnel à l’audience sur un éventuel report du procès, convoquée mercredi par la CPI à La Haye », a déclaré le président devant les parlementaires des deux Chambres à Nairobi. « Pour protéger la souveraineté de la République kényane, je (...) vais rapidement publier le décret nécessaire pour nommer le vice-président William Ruto comme président en exercice pendant que je participe aux audiences à La Haye, aux Pays-Bas », a-t-il ajouté. Durant son séjour à La Haye, a indiqué Uhuru Kenyatta, ses pouvoirs seront délégués à son vice-président, William Ruto. « Rien dans mes fonctions ou mes devoirs de président ne justifie ma présence devant le Tribunal », a poursuivi le chef de l’Etat qui a en outre souligné que cela ne signifiait pas qu’il assistera à la « Conférence de mise en état en tant que président du Kenya » En acceptant de se plier à la décision des juges qui l’ont convoqué à La Haye, Uhuru Kenyatta devient donc le premier chef d’État en exercice à se présenter devant la Cour pénale internationale. Pourtant, la menace d’un procès contre sa personne semblait déjà s’éloigner puisque l’accusation avait demandé un report sine die de l’ouverture de ce procès, faute de preuves suffisantes. La procureure Fatou Bensouda qui admet n’avoir pas assez de preuves, accusait néanmoins le gouvernement kenyan de ne pas coopérer avec la cour, notamment sur la question des avoirs financiers du chef de l’État kényan. Agé de 52 ans, Uhuru Kenyatta n’a comparu pour sa responsabilité dans les crimes présumés qui ne lui sont reprochés qu’une fois devant la CPI, notamment avant son élection à la magistrature suprême en mars 2013. Depuis lors, il ne s’est jamais rendu à La Haye pour être entendu devant les juges dans le cadre de cette affaire. Après l’ouverture le 10 septembre 2013 du procès de William Ruto, accusé aussi de crimes contre l’humanité dans le cadre des violences post-électorales sus évoquées, le tour est maintenant arrivé pour le président kenyan dont le procès a été à plusieurs reprises reporté du fait de la rétractation de ses témoins de se présenter à la CPI. Les deux personnalités comparaissent libres devant la cour qui, il faut le souligner, n’a jamais délivré de mandat d’arrêt à l’encontre de chacun d’eux. La CPI avait néanmoins exigé la présence physique de l’actuel président kenyan aux audiences des 7 et 8 octobre, qualifiées de stade crucial de la procédure. Le procès du président Kenyan devait en principe s’ouvrir en novembre 2013, mais il n’a cessé d’être reporté non seulement faute de disponibilité de ses témoins, mais aussi et surtout parce que l’Union africaine faisait pression sur la CPI en vue de son annulation. L’Afrique en effet, continue de menacer de se retirer de la juridiction estimant que les procès de la CPI ne sont qu’une « distraction » et que pour le cas du Kenya, ils empêchent Uhuru Kenyatta de s’occuper des vrais problèmes de son pays. La plupart des dirigeants africains voient dans cette affaire et dans bien d’autres visant les dirigeants des pays du continent « une humiliation pour l’Afrique en général et pour leur pays en particulier ». La comparution d’Uhuru Kenyatta, premier chef d’État en exercice à être jugé par la CPI est donc fortement critiquée par les pays africains et de nombreux Kényans. Tous disent que cette juridiction est « au service du néocolonialisme ». Outre le Kenya, la CPI a ouvert des enquêtes dans huit pays africains depuis son entrée en fonction en 2003. Il s’agit notamment de la Côte d’Ivoire, de la Libye, du Soudan, de la RD-Congo, de la Centrafrique, de l’Ouganda et du Mali. Ce qui vaut des critiques à la cour, notamment de la part de l’Union africaine qui l’accuse de mener « une sorte de chasse raciale ».
Nestor N'Gampoula |