Majorité présidentielle : chambardements en vueJeudi 12 Février 2015 - 15:30 Le premier allié visé serait le MSR de Pierre Lumbi qui n’a jamais eu sa langue en poche lorsqu’il s’est agi de donner sa position sur une question cruciale et déterminante de l’avenir du pays indépendamment des thèses de la plate-forme. Ce n’est plus qu’un secret de polichinelle les dissensions qui minent actuellement la famille politique du chef de l’État, Joseph Kabila. L’édifice de la majorité présidentielle s’est fissurée avec, en toile de fond, des coups de butoir lui assénés par des membres entêtés et indépendants d’esprit n’ayant pas leur langue en poche. La position de ces derniers notamment sur la révision de la Constitution et sur la perspective de la modification de la loi électorale dans ses dispositions intangibles les avait mis à porte-à-faux avec l’idéal politique de leur plate-forme. Alors que la majorité attendait fédérer ses forces pour obtenir la révision de la Constitution et, par ricochet, la revisitation du Code électoral au motif que certaines de ses dispositions étaient devenues anachroniques et nécessitaient une retouche, quelques cadres se sont vite interposés. En récusant cette démarche, quoiqu'elle ait bénéficié du sceau de l’autorité morale, ils ont, pour ainsi dire, apporter l’eau au moulin de l’opposition qui la considère comme une stratégie dissimulant quelques velléités de prolongation du mandat présidentiel au-delà de 2016. Le MSR de Pierre Lumbi aura été le pionnier de cette dynamique contestataire qui a fini par faire tâche d’huile au sein d’un regroupement politique où tous les membres ne jouent pas forcément franc jeu. En disant tout haut ce que les autres pensaient tout bas, le conseiller spécial du chef de l’État en matière de sécurité venait de franchir un seuil que de nombreux cadres de la majorité n’osaient pas percer par peur des représailles. Sa position contraire à celle de la plate-forme avait fait boule de neige au point de créer des émules dans le camp présidentiel aujourd’hui écartelé entre les faucons et les colombes, ou mieux entre les courtisans et les indomptables qui entrevoient déjà l’après Kabila. Ces deux camps se livrent actuellement à une guerre sans merci dans un contexte de fin de règne où chacun essaie de jouer sa partition. Les masques tombent. Les départs enregistrés tout récemment dans cette famille politique sont symptomatiques du malaise qui y règne. Imminent coup de balai C’est dans cette optique qu’il faudrait inscrire la cure d’assainissement que le chef de l’État voudrait administrer dans son camp politique où le cercle des fidèles s’est nettement rétrécit. Selon des indiscrétions, le MSR de Pierre Lumbi est principalement visé par ce coup de balai en préparation pour n’avoir pas soutenu les actions de la majorité dans des moments difficiles. Non seulement le parti de Pierre Lumbi pourrait perdre ses portefeuilles au sein du gouvernement de cohésion nationale, mais en plus son leader est en passe de quitter ses fonctions de conseiller spécial. On lui préférerait, d’après des sources, un Katangais en la personne de Daniel Ngoy Mulunda, l’ancien président de la Commission nationale électorale indépendante afin de se mettre en phase avec une communauté katangaise un peu trop frondeuse. Dans la foulée, d’autres cadres du parti soupçonnés de ne plus partager le même idéal politique que la majorité pourraient aussi être priés de faire amende honorable à défaut de libérer carrément le plancher. OLivier Kamitatu de l'ARC et Bahati Lukwebo de l'AFDC seraient aussi dans le collimateur à cause de leur bagout aux accents très revendicatifs. Des partis politiques affiliés au sein de la majorité réputés proches du MSR seraient aussi dans le viseur. Pour le cas du Parti lumumbiste unifié (Palu), l’allié fidèle de la majorité, des indiscrétions font état des menaces de rupture qui planeraient sur l’alliance électorale conclue depuis 2006. Le fait que le parti d’Antoine Gizenga a, dans une récente déclaration, exigé à la commission Céni de publier un calendrier global des élections qui doivent se tenir au plus tard en 2016 dans le respect de la Constitution, l’a automatiquement mis à porte-à-faux avec la majorité. Les Kabilistes qui auraient mal digéré cette prise de position proche de l’opposition seraient sur le point de tout chambouler. D’où la tempérance observée dans le camp de Gizenga dont le basculement dans l’opposition à une année et quelques mois de la fin du mandat de Joseph Kabila risque d’être interprété comme une trahison. Une chose est vraie, c’est que très bientôt la famille politique du chef de l’État sera restructurée. Pour n’avoir pas fait preuve de loyauté envers les idéaux de la majorité présidentielle en se comportant comme des rebelles, la plupart de ses cadres sont en passe de perdre leurs postes. L’option est déjà levée, quoique le suspense soit encore gardé quant à la date et l’heure où seront annoncés lesdits chambardements. Ceux-ci pourraient toucher le gouvernement et même la présidence de la République. Wait and see.
Alain Diasso Légendes et crédits photo : Pierre Lumbi |