Migration : l’UE tentée par des barricades à ses frontièresMercredi 15 Février 2023 - 10:30 Prêts à tout pour décourager les demandeurs d’asile de venir dans l'Union européenne (UE), des États membres exhortent à financer la construction de murs. La Commission cède… un peu. L’extrême droite jubile. L’heure est au repli sur soi. Incapables de s’entendre sur une répartition solidaire des migrants sur tout le territoire européen, les vingt-sept États membres de l’UE se heurtent à l’exaspération des pays en première ligne. Parmi eux, la Bulgarie, furieuse de se voir transformée en zone tampon servant de camps pour la migration illégale, résume son président, Rumen Radev. Au diapason, une douzaine d’États (Autriche, Hongrie, Pologne…) exhorte depuis des mois l’UE à payer la construction de murs et clôtures à ses frontières extérieures. L’Autriche en a même usé comme un moyen de chantage, en décembre dernier, en mettant son veto à l’entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l’espace Schengen tant que leurs frontières n’auront pas été renforcées. Ces pays hostiles à l’accueil des migrants peuvent compter sur le soutien de conservateurs du Parti populaire européen, première formation politique au Parlement européen. La Commission pressée de payer Le 9 février, les dirigeants des vingt-sept Etats se sont entendus pour demander à Bruxelles de financer des mesures qui contribuent directement au contrôle des frontières extérieures de l’UE. Fin 2021, alors que la Biélorussie « expédiait » des migrants vers la Pologne et la Lituanie dans le seul but de fragiliser l’unité européenne, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, avait juré qu’elle n’accepterait jamais de financer barbelés et murs. Mais l’Est n’est pas le seul point de crispation. En 2022, 330 000 migrants sont entrés illégalement dans l’UE, du jamais vu depuis le record de 2015 (un million) selon Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières. Et sur les 13 200 Afghans, Ivoiriens ou Syriens entrés en catimini, le mois dernier, 43 % ont emprunté la périlleuse route des Balkans et 49 % la mortifère mer Méditerranée. «Les murs ont déjà poussé à nos portes» Sommée de tarir ces flux, Von der Leyen a donc lâché du lest, le 10 février, en évoquant la prise en charge d’infrastructures mobiles et fixes, de voitures, de caméras, de tours de guet et de surveillance électronique. Le flou demeure quant aux murs. Mais qu’importe : le chancelier conservateur autrichien, Karl Nehammer, salue l’engagement clair de la Commission […] pour protéger les frontières extérieures. Au Parlement européen, le groupe d’extrême droite Identité et démocratie (soixante-quatre élus, dont ceux du Rassemblement national) se gausse aussi de voir Manfred Weber, chef des conservateurs du PPE, travailler pour [lui] et adopter [ses] politiques. Navrant, juge le Premier ministre libéral luxembourgeois, Xavier Bettel. « Je pensais que l’Europe, c’était la chute d’un mur et non la construction de nouveaux», estimait-il. L’Histoire lui donne déjà tort. Depuis 2014, sur les 12 000 km de frontières qui bordent l’UE, murs et clôtures ont poussé comme des mauvaises herbes, passant de 315 à 2 048 km. Noël Ndong Notification:Non |