Musique : la rumba congolaise désormais sur la liste du patrimoine de l’humanitéMercredi 15 Décembre 2021 - 17:51 L’inscription de la rumba congolaise sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité s’est faite à l’issue des assises de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), tenues à Paris (France), le 14 décembre. genre musical et cocktail des danses populaires nées sur les deux rives du fleuve Congo, Comme Cuba dont la rumba a été inscrite en 2016, le dossier d’inscription de la rumba congolaise sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité porté conjointement par les deux Congo auprès de l’Unesco a abouti. En dépit du fait que les capitales des deux pays, Brazzaville et Kinshasa, sont désignées comme villes créatives de l’Unesco en 2013, les deux Congo deviennent du coup, au terme de cette inscription, des destinations touristiques à travers des festivals qui pourront être organisés conjointement. A l’issue de cette inscription, le ministre de la Culture et des Arts de la République du Congo, Dieudonné Moyongo, a adressé les compliments au nom du gouvernement congolais à l’endroit de la communauté internationale, notamment à la représentation africaine à l’Unesco, au Secrétariat de la Convention 2003, à l’Organe d’évaluation et à la directrice générale de l’Unesco. Tout comme son homologue du Congo-Brazzaville, la ministre de la Culture, Arts et Patrimoine du Congo-Kinshasa, Catherine Kathunbu Furaha, a indiqué elle aussi que l’inscription de la rumba congolaise sur la liste représentative du patrimoine culturel et immatériel de l’humanité est un événement majeur dans l’histoire de la culture et des arts des deux pays. « Cet honneur rejaillit sur tous les professionnels de la culture congolaise à travers le monde ainsi qu’à tous les artistes. Pour nous, l’essentiel commence ici en termes de politique culturelle novatrice et de promotion des industries culturelles et créatives. Nos remerciements s’adressent aux experts des deux Congo mais aussi aux responsables et membres de l’Unesco en Afrique centrale, avec mention spéciale à la directrice générale de l’Unesco et à tous les organes techniques pour leur accompagnement professionnel et efficace », a-t-elle déclaré. Un moment historique dans l'histoire musicale des deux Congo Pour la directrice générale de l’Unesco, Audrey Azoulay, l’inscription de la rumba congolaise est un moment historique quand on connaît l’histoire de cette musique. Et le fait pour les deux Congo de porter conjointement ce dossier a joué un rôle déterminant dans la décision de l’Unesco, a souligné la directrice générale. « C’est ça aussi le sens du travail qui se fait ici à l’Unesco, celui de montrer que le patrimoine immatériel réunit par-delà les frontières, par-delà certains antagonismes, on avait bien réussi à faire inscrire un élément aux deux Corée, Corée du nord et Corée du sud. On est très heureux aussi que les deux Congo aient travaillé la main dans la main pour porter cette candidature. Et puis, c’est un moment historique quand on connaît l’histoire de cette musique, tout ce qu’elle porte, l’histoire à la fois de l’esclavage, du Bassin du Congo jusqu’aux Amériques, jusqu’à Cuba, et puis le retour de cette musique au vingtième siècle, qui a accompagné toutes les luttes politiques, la mémoire, la dignité mais aussi l’indépendance politique dans les années 1960 », a-t-elle signifié. Audrey Azoulay a précisé également qu’il y a tout un ensemble des valeurs, d’histoire, de mémoire qui est porté par cette musique. Au-delà de l’esthétique, au-delà de l’émotion, c’était important que la communauté internationale le reconnaisse. Et cette inscription au patrimoine mondial pourrait donner une notoriété nouvelle à cette musique, y compris auprès des Congolais eux-mêmes. « Je sais qu’il y a beaucoup de Congolais qui vont être très émus. Je pense à eux, parce que pour certains, c’est leur enfance, c’est le lien avec des générations qui les ont précédés mais les générations actuelles aussi, et cette reconnaissance peut amener à l’embarquer encore plus à la création contemporaine et puis aussi à accélérer les politiques de soutien aux industries culturelles qui sont des industries d’aujourd’hui, modernes, créatrices d’emplois où il y a des jeunes qui sont employés dans des industries musicales. C’est donc à la fois un coup de chapeau et un coup de projecteur important pour eux », a souligné Audrey Azoulay. L’obtention de l’inscription de la rumba pas une fin en soi Obtenir l’inscription de la rumba au patrimoine immatériel de l’Unesco n’est pas une fin en soi, car les villes de Brazzaville et Kinshasa doivent tenir leurs engagements en lien avec la concrétisation de ce projet. Il s’agit, par exemple, d’emmener les artistes musiciens à vivre de façon descente de leur art. Un comité d’experts devrait se constituer à ce propos pour permettre aux artistes de fonctionner comme des entreprises. Il faut aussi œuvrer pour le respect véritable des droits d’auteur, pour que chaque artiste jouisse du fruit de son travail, tel que cela se passe déjà dans plusieurs pays. Avec la technologie qui évolue, les artistes seront aussi emmenés à s’y adapter et à considérablement en profiter. Les musiciens des deux rives du fleuve Congo seront accompagnés, eux-mêmes aussi seront partie prenante à tout ce qui va se faire. Au cas où ces engagements ne seraient pas respectés, les deux Congo pourront être biffés de la liste. Ce qui sera honteux et triste. Mais, entre-temps, les deux comités scientifiques nationaux présidés respectivement par les Prs Joachim Emmanuel Goma-Thethet pour le Congo Brazzaville et André Yoka Lye Mudaba pour le Congo-Kinshasa, ont élaboré et adopté une feuille de route à court terme jusqu’en 2025 qui a été envoyée à l’Unesco. Aussi, les deux Congo recommandent l’inscription de la rumba dans les enseignements scolaire et universitaire. Notons que la candidature conjointe pour l’inscription de la rumba congolaise sur la liste représentative du patrimoine immatériel de l’humanité découle de la volonté des deux chefs d’État, Denis Sassou N’Guesso et Félix-Antoine Tshisekedi-Tshilombo. Ce dossier a été déposé à l’Unesco, le 26 février 2020. Bruno Okokana Légendes et crédits photo :Photo : illustration de la rumba congolaise / DR Notification:Non |