Révision de la Constitution : les signaux peu rassurants pour la suite du processus électoral

Mercredi 6 Août 2014 - 18:30

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L’arrestation de Jean-Bertrand Ewanga fait monter d’un cran la tension entre l’opposition et la majorité.

Le débat sur des modifications à apporter à la Constitution a gagné l’opinion et semble à jamais empoisonner les relations entre l’opposition et la majorité présidentielle. De part et d’autre, les discours politiques se multiplient et l’on promet de respecter la loi fondamentale du pays en la modifiant ou en la laissant telle qu’elle. L’une des conséquences logiques de l’envolée verbale observée autour de la Constitution est l’arrestation, le 6 août, de Jean-Bertrand Ewanga, cadre de l’Union pour la Nation congolaise (UNC).

À bien y penser, il s’agit de la première arrestation en lien étroit avec les prochaines élections. L’opposition congolaise n’a jamais cessé d’exprimer ses craintes quant à une quelconque tentative de révision de la Constitution visant à offrir au président de la République une possibilité d’’un troisième mandat. C’est le principal point d’achoppement des grands noms de l’opposition politique et le socle de tous les débats. La publication d’un calendrier électoral global et l’organisation des élections provinciales ne seraient alors que stratagèmes pour empêcher à la majorité présidentielle d’atteindre ses objectifs.           

Pression supplémentaire

Des déclarations dans les médias et autres pétitions, à la manifestation publique du 6 août, l’opposition a certainement décidé de changer de fusil d’épaule en vue de mettre davantage de pression sur la majorité. La communauté internationale qui a déjà fait connaître sa position notamment sur la question de la Constitution en invitant les uns et les autres au strict respect dudit document ne peut que recenser les évènements marquants de cette période préélectorale surtout ceux portant les germes de violence électorale. Les observateurs à long terme, en cours d’accréditation à Kinshasa, ne sauraient manquer un aspect aussi important du processus électoral congolais.

Si le débat actuel peut être interprété comme l’expression de la démocratie, il laisse tout de même perplexe certains observateurs qui ne comprennent pas l’opportunité d’une révision des articles à problème de la Constitution sachant que les changements y apportés en 2011 avaient eu des fâcheuses conséquences sur l’apaisement des élections. Les conflits naissant de la présidentielle de novembre 2011 ont été à l’origine de la convocation des concertations nationales boudées par quelques leaders de l’opposition. Quatre ans après cette échéance électorale déplorée par plus d’un, la RDC garde encore les marques des violences d’autrefois.

Signes avant-coureurs

Les professionnels des élections sont unanimes sur le fait que les élections ne  doivent  pas  être traitées  uniquement  comme  une  opération  technique  exécutée  le  jour  du scrutin.  Dans le souci des élections apaisées, les acteurs politiques et les différentes parties prenantes sont appelés à identifier des points d'embrasement  des  conflits ou des  signes  avant-coureurs  de  conflits potentiels, afin d'être mieux préparés à bénéficier du suivi et de la médiation finale des acteurs nationaux et internationaux.

Au regard du travail abattu par la Commission électorale nationale indépendante à travers les cadres de concertation pour rétablir la confiance vis-à-vis des parties prenantes, toutes les institutions de la République devaient s’investir pour faire oublier le mauvais souvenir de 2011. L’objectif commun serait celui de mobiliser l’ensemble de la population congolaise en prévision des élections locales urbaines et municipales de 2015 annoncée au mois de mai 2014 afin de présenter le pays sous une image positive.

Instruments juridiques

L’on note qu’en Afrique,  comme  partout  dans  le  monde,  le  succès  ou  l'échec  d'un processus  électoral  est  conditionné  en  grande  partie  par  la  nature  des instruments  juridiques  qui  définissent  son  contexte politique  global  et  ses différentes composantes. Mis en  application dans la Constitution et les lois électorales,  ces  instruments  permettent  habituellement  de  savoir  si  un processus sera inclusif et équitable pour tous les candidats et leurs partisans, et s'il sera possible de garantir l'égalité sur le terrain.

En général, le processus par lequel ces instruments sont adoptés, que ce soit à travers un référendum, un  accord  de  paix,  des  lois  votées  par  un  organe  représentatif  ou promulguées après une large consultation populaire, modèle la vision que la population  a  de  l'impartialité  de  la  structure  électorale  nationale.  Plus  les citoyens considèrent cette structure comme équitable et indépendante, plus la mise en place de celle-ci  est susceptible d'être pacifique et efficace. D'autre part,  un  cadre  juridique  partisan,  qui  vise  à  empêcher  la  participation effective de certains individus ou groupes sociaux  aux élections est  susceptible d'attiser les conflits. Pour l’heure, les actes et les discours des politiciens congolais, opposition et majorité confondues, ne privilégient pas un climat propice aux élections apaisées. Ils servent au contraire à raviver la crise et à dresser le lit de la violence électorale.

Jeannot Kayuba

Légendes et crédits photo : 

L'opinion s'attend à des élections transparentes, apaisées et crédibles