Rome : la direction municipale essuie sa première tempête

Vendredi 2 Septembre 2016 - 18:53

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C’est à la surprise générale qu’une équipe « 5 Étoiles » s’était emparée de la mairie de Rome en juin. Mais aujourd’hui, les ennuis commencent.

Dans une Italie qui connaît une grave désaffection de l’électorat vis-à-vis de la chose  politique, les partis étant éclaboussés à répétition par des scandales, le Mouvement dit des 5 Étoiles se présente volontiers comme le symbole de modernité et de la rupture. Son fondateur, le comique Beppe Grillo, est un iconoclaste assumé dont la ligne grappille aussi bien à gauche qu’à droite pour asseoir un populisme avéré. Chaque matin, la lecture de son blog est une obligation. Car la plupart des actes du mouvement se passent par Internet, de la sélection de ses candidats, aux choix politiques majeurs.

En juin dernier, à la suite d’un scandale insignifiant en apparence – le dépassement de notes de frais du précédent maire, le chirurgien Ignazio Marino, apparenté à gauche – avait conduit à la dissolution du conseil communal. C’est une jeune avocate de 37 ans, Virginia Raggi, sans grande expérience en politique mais figure emblématique du Mouvement 5 Étoiles qui avait conquis la mairie. Ensemble avec sa formation politique, elle s’annonçait comme le symbole d’une autre manière de gérer la capitale italienne qui croulait sous les ordures et la dette ; elle était empêtrée dans des scandales de recrutements abusifs et de gabegie à sa régie des transports publics.

Mais aujourd’hui, seulement deux mois après son installation au capitole, Virginia Raggi, qui a dû affronter entre-temps les tiraillements d’une séparation d’avec le père de son enfant, commence à se heurter à la rigidité du système. Sa réticence à épouser la cause des Jeux Olympiques à Rome en 2020, sa volonté d’assainir les comptes publics mais aussi l’amateurisme de son mouvement qui ne peut se priver de déclarations-bulldozer ont de nouveau fait l’unanimité contre la mairie. Leaders de gauche et de droite parlent de « vrais charlots » qui n’étaient pas préparés à la tâche d’assumer la gestion de la plus grande ville d’Italie.

L’équipe municipale a enregistré jeudi sa plus grave crise, avec la démission tout d’un coup de cinq de ses membres. Virginia Raggi a d'abord renvoyé son chef de cabinet, impliqué dans un scandale en raison de son salaire de près de 200.000 euros brut (130 millions de francs CFA) par an, et perdu le responsable financier de la mairie, un ancien dirigeant de la Consob, le gendarme boursier italien. Dans le même temps, les principaux patrons des deux sociétés municipales les plus critiquées par les Romains ont claqué la porte: la société des transports publics (Atac) et celle de ramassage des ordures (AMA).

Les médias expliquaient vendredi qu’une lutte de pouvoir se joue au sein du Mouvement 5 Étoiles. Alors que le fondateur Beppe Grillo d’habitude si disert continue de se taire, la maire aurait choisi la manière forte pour se libérer des collaborateurs qui lui avaient été imposés par l’un ou l’autre courant du Mouvement 5 Étoiles. Mais, ce faisant, elle a déclenché une guerre intestine dont on ne mesure pas encore jusqu’où elle pourrait précipiter la capitale italienne.

À son élection en juin, Virginia Raggi, première femme à gouverner Rome, avait suscité commentaires et quolibets parce qu’elle avait mis plus de trois semaines avant d’annoncer son équipe. Un échec de sa part à Rome aurait aujourd’hui un effet domino sur les ambitions du Mouvement 5 Étoiles à pouvoir, un jour, diriger l’Italie. En juin avec Raggi, une autre femme 5 Étoiles s’était emparée d’une autre grande ville dirigée de longue date par des caciques de gauche : Chiara Appendino, une végétarienne, avait grillé la politesse à Piero Fassino, un notable jusque-là réputé indéboulonnable à Turin (nord).

Le Mouvement 5 Étoiles est entré comme une bourrasque sur la scène politique italienne avec des propositions chocs. L’une d’elle consiste à imposer à ses élus de renoncer à leurs émoluments, une mesure qui a provoqué du ‘tangage’ à l’Assemblée où des députés n’ont pas hésité à changer de parti pour conserver leur salaire. La crainte est que la plupart de ces mesures n’épuisent vite leur effet d’annonce. Déjà, en interne, le Mouvement est accusé de dérive autoritaire. Beppe Grillo interdit à quiconque de ses membres de se rendre sur un plateau de télévision.

Lucien Mpama

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