« Vous portez le voile islamique ? Désolé ».Mercredi 13 Juillet 2016 - 18:48 Elle pensait avoir décroché un emploi, mais les recruteurs lui ont fait savoir que son voile islamique représentait un embarras. Le verdict que va rendre la Cour d’appel de Milan va faire date. En sommant une société italienne de recruter, comme c’était son intention initiale, une musulmane voilée, elle va introduire un élément de débats dans un contexte de crainte contre l’islamisme et de méfiance des musulmans même en Italie. Les juges se sont appuyés sur l’interprétation des annonces ambiguës de la société recruteuse pour dire la loi, infirmant deux premiers jugements qui avaient donné tort à la persévérante plaignante. L’affaire commence lorsqu’une Italienne que nous appellerions Fatma répond à une annonce. « Cherchons une hôtesse pour distribuer des prospectus à la foire MICAM de Milan. Conditions exigées : parler l’anglais, chausser du 37, belle prestance, taille 1,65mm et 40-42 de tour de taille. Qui ne répond pas même partiellement à ces critères est invitée à s’abstenir ». Fatma ne fait ni une, ni deux : elle va au miroir, se mesure, se pèse, recontrôle la pointure de ses chaussures et fait acte de candidature, par internet. La réponse qui lui revient est rassurante : venez rencontrer nos équipes pour passer un entretien. Le jour dit elle se présente devant les examinateurs, sûre d’elle car elle maîtrise l’anglais à la perfection étant née de parents égyptiens naturalisés mais absolument polyglottes et qu’elle a une taille de mannequin. Mais ce jour qui devait être celui de la joie pour un premier emploi les choses se gâtent. Car dès le premier regard, les chargés du recrutement lui font clairement savoir qu’elle ne répond résolument pas aux critères. Le motif ? « Vous ne nous aviez pas fait savoir que vous portiez le voile islamique ! Nous ne sommes pas certains que nos clients pousseraient l’ouverture d’esprit jusque-là. Merci quand-même d’être venue, mademoiselle ! » Mais Fatma ne se tient pas pour battue, et elle engage un procès. Deux premiers degrés de juridiction lui donnent tort : « les exigences de l’employeur spécifiaient la condition de la belle prestance. Cette notion laisse entendre qu’à première vue votre présentation générale soit correcte, ce qu’exclut le fait que vous vous présentiez avec un visage caché par un voile islamique ». Mais là aussi, la plaignante, musulmane certes mais née en Italie dont elle détient la nationalité, crie à la discrimination manifeste. Son combat a fini par payer : cette semaine la Cour d’appel de Milan a donné tort aux agents recruteurs. Elle a souligné l’ambiguïté de l’annonce passée. « Vous n’aviez pas souligné que vos critères d’embauche excluaient les personnes portant le voile islamique et ne voulant pas l’enlever par conviction religieuse ». Qui plus est, « vous recherchiez une personne aux cheveux longs et vaporeux. Ceux-ci peuvent le rester sous un voile! ». Verdict dans les tout-prochains jours. Lucien Mpama Notification:Non |