Election au poste de directeur général de l’Unesco : audition des candidats

Jeudi 10 Avril 2025 - 10:45

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La procédure pour la proposition d’un candidat au poste de directeur général de l’Unesco a permis à son Conseil exécutif, sous la présidence de Vera El Khoury Lacoeuilhe, d’auditionner tour à tour Khaled Ahmed El-Enany Ali Ezz, candidat de la région arabe;  Gabriela Ilian Ramos Patino, du groupe électif de l’Amérique latine; et Firmin Edouard Matoko, de la République du Congo. La campagne est lancée.

Firmin Edouard Matoko - Unesco - République du CongoAprès de brèves présentations suivies d’une explication respective de leurs visions lors de la plénière de l’Unesco du 9 avril, les trois candidats sont bien entrés en campagne de l’élection lancée pour postuler à la direction générale de cette institution.

« Je me considère comme le candidat de toutes les nations et de tous les peuples qui luttent pour défendre nos idéaux », a déclaré Firmin Edouard Matoko, s’exprimant simultanément en Français, en espagnol et en anglais pour l’explication concrète de son programme proposant des innovations majeures dans l’éducation, la science et la culture.

Il brigue le poste de directeur général, non pour prolonger une trajectoire, mais plutôt pour ouvrir un cycle. Étant le serviteur fidèle de l’Unesco depuis des années, il pense modestement connaître cette institution onusienne dans ses moindres recoins. « Je l’aime profondément. J’en mesure les grandes réussites, et elles sont très nombreuses », a-t-il confié tout en affirmant être également conscient de ses fragilités : la dispersion des programmes, le poids des processus bureaucratiques, l’instabilité des ressources, la politisation excessive. « Ces faiblesses suscitent, à juste titre, des appels à la réforme », a-t-il confié. « Mais au-delà des ajustements de programmes que j’ai amplement proposés dans mon document de « vision » (…..), l’époque exige un nouveau regard sur l’avenir et, en conséquence, que l’Unesco se réinvente. Non pas dans la rupture, mais dans un nouvel élan conforté par nos acquis les plus significatifs », a-t-il expliqué.

Firmin Edouard Matoko croit que le temps est venu d’un aggiornamento, autour de trois grandes évolutions qui doivent nous amener au-delà de l’horizon 2030.

Dans un monde bouleversé par des conflits multidimensionnels, il lancera un programme spécial “Femmes pour la paix”, soutenu par la société civile, pour donner de la visibilité et des moyens aux nombreuses femmes bâtisseuses de paix.

"Leur rôle est souvent méconnu. Il est temps de le reconnaître, de le soutenir, de l’amplifier. Et à notre jeunesse, si souvent sollicitée, et pourtant si rarement entendue, nous devons offrir autre chose que des slogans", a-t-il souligné.

Une fois élu, il prévoit de mettre en place le programme “Générations Unesco”, pour former chaque année des jeunes (spécialement dans les zones de conflit – post-conflit) aux enjeux de la citoyenneté mondiale, de l’éthique scientifique, du leadership culturel. « Car en outillant la jeunesse, nous consolidons la paix, en semant les germes d’une culture de la paix », a-t-il assuré.

À propos du financement de l’Unesco, Firmin Edouard Matoko s’est étendu en ces termes : « Je n’ai aucune illusion : sans base financière stable, notre ambition restera vaine, une promesse sans suite ! Nous diversifierons nos leviers : renforcer la coopération Sud-Sud et triangulaire (N-S-S), élargir les contributions volontaires en établissant des critères innovants alliant flexibilité et prévisibilité, développer des partenariats éthiques, et créer des espaces de dialogue durables et inclusifs avec les partenaires publics et privés. Je proposerai un mécanisme systématique de revue des dépenses de gestion et de l’ensemble des programmes de l’Unesco afin d’évaluer leur impact dès le premier dollar investi. C’est une exigence de rigueur, de transparence, mais aussi un acte de confiance envers les États membres, nos partenaires et nos concitoyens, envers lesquels nous sommes redevables ».

L’Afrique, une priorité globale

L'ambition du candidat de la République du Congo est de faire de l'Afrique une force dynamique sur la scène internationale. Il voudrait également que l’Unesco devienne un accélérateur de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, et non simplement un partenaire technique et financier. Selon sa vision, l’Afrique ne doit plus être la périphérie de l’action de l’Unesco mais en devenir le laboratoire. Il propose de créer un Africa Lab, incubateur d’innovations éducatives, scientifiques et culturelles, pensé sur le continent, avec le continent, pour le monde. Il a rappelé qu’il s’agit d’un schéma qui pourrait être développé dans d’autres régions méritant autant d’attention. « Je resterai également ouvert à toutes propositions visant à redessiner l’architecture de nos priorités globales et de nos groupes-cibles », a-t-il promis.

Firmin Edouard Matoko se refuse le rôle d’un directeur général de procédure, de projets. Il envisage plutôt d’être un directeur général de vision. Pas celui d’un appareil, mais celuiFirmin Edouard Matoko - Unesco - Plénière des idées. Pas celui d’une ambition personnelle, mais celui d’un service universel. Pas celui du bruit, mais celui d’une construction sereine, durable, partagée. Quant à sa vocation, elle ne consiste pas à imiter les autres. Elle implique « de rester fidèles à ce que nous sommes, et de nous hisser à la hauteur de ce que le monde attend de nous ».

Au terme de son exercice de tour de chauffe électoral, Firmin Edouard Matoko a remercié chaleureusement l’auditoire pour avoir bien voulu accorder du crédit à sa candidature, longuement mûrie et décidée par lui-même, et souverainement portée par les plus hautes autorités de son pays, la République du Congo.

La candidature d'un fils du Sud global

Il a rappelé son parcours singulier : « Je suis un fils du Sud global (de par mes origines), enfant de l’école publique, l’école du peuple, pur produit de la solidarité internationale et de la coopération intellectuelle prônée par l’Unesco », l’Unesco où il était entré sur un programme de jeunes experts associés, exceptionnellement financé par le gouvernement de l’Italie pour un étudiant étranger. « Je voue une gratitude éternelle à ce pays qui m’a accueilli dès mes premières années d’études universitaires ».

Il avait intégré cette institution onusienne avec la passion de tous les jeunes aspirant à construire un monde meilleur muni de sa foi envers les idéaux de l’Unesco pour laquelle il militait déjà au sein des Clubs Unesco. « Ma passion et ma conviction sont restées intactes et elles motivent ma candidature aujourd’hui », a-t-il témoigné, déclarant: « Je me revendique de la culture de Hamadou Hampaté Ba, Wole soyinka, Tchickay U’Tamsi, Henri Lopes, et de bien d’autres que j’ai appris à connaître tout au long de mon parcours professionnel, Jorge Luis Borges, Paolo Coelho. Je crois, comme eux, que la culture n’est pas un supplément d’âme, mais une condition de l’humanité. Et je crois que l’Unesco est l’ultime lieu où cette conviction peut devenir action ».

« Je voudrais réaffirmer ici solennellement, si vous m’accordez cette chance unique d’assumer les destinées de cette organisation, mon engagement à la servir sans parti-pris, dans la transparence et l’équité, et grâce à une éthique inclusive en défendant les valeurs du multilatéralisme et de la paix, ce dont le monde a le plus besoin aujourd’hui ».

« Je serai un directeur général proche du terrain, attentif aux plus petits États comme aux plus grands, respectueux des équilibres, mais ferme sur les principes. Je crois en la force du dialogue lorsque l’essentiel est en jeu : la paix, la liberté, la dignité humaine ».

Marie Alfred Ngoma

Légendes et crédits photo : 

1-Firmin Edouard Matoko, candidat de la République du Congo / DR 2- Une vue de la salle lors de la plénière / DR

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