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Relancer la coopération entre l’Afrique, la France et l’Europe, oui, mais comment ?

Lundi 9 Décembre 2013 - 0:48

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Le sommet dit de l’Élysée qui s’est achevé samedi à Paris a, certes, tenu ses promesses en termes de discours, d’idées nobles, de vœux, d’engagements de principe, mais débouchera-t-il sur des actions concrètes ? Possible, mais hélas pas certain même si des indices donnent à penser que quelque chose est en train de changer dans les relations entre le Vieux et le Jeune Continent.

Dans la liste des obstacles qui freinent aujourd’hui l’instauration d’une véritable coopération entre l’Afrique et la France figurent les données suivantes : une très mauvaise connaissance de l’Afrique par l’État français – le secteur de la Défense mis à part –, la réduction continue des moyens financiers dont la France dispose en ce temps de crise pour développer sa coopération, la persistance de comportements coloniaux dans des domaines clés comme celui de la justice, une ignorance crasse des réalités africaines par les grands médias écrits et parlés, la désertion des marchés africains par les entreprises de l’Hexagone, l’affaiblissement continu des moyens mis en œuvre pour maintenir vivantes la langue et la culture françaises, la dilution du ministère de la Coopération dans un Quai-d’Orsay qui n’a jamais eu une idée réaliste, précise, objective de ce qui se passe sur le continent, les a priori de la cellule africaine à l’Élysée qui est visiblement déconnectée du réel.

Dans la liste des atouts dont la France dispose toujours pour réinstaurer un véritable partenariat avec l’Afrique, on trouve les données suivantes : la capacité de ses dirigeants et de ses diplomates d’ouvrir au continent les portes de l’Union européenne, la compétence technique et scientifique de ses entreprises dans les domaines les plus divers, la maîtrise de la formation acquise par ses universités et ses écoles, le partage d’une langue et d’une culture communes avec de très nombreux pays africains, la capacité d’intervention des forces armées françaises sur le terrain mais également de soutien sous les formes les plus diverses dans le domaine de la sécurité, la gestion des monnaies communes que sont les deux francs CFA et des réserves monétaires considérables qui appartiennent aux nations des deux zones, la forte présence des représentants de la France dans les institutions de la gouvernance mondiale, une longue histoire commune qui a tissé des liens étroits entre l’Afrique et la France.

Tout bien pesé, la liste des obstacles et la liste des atouts ainsi résumés en quelques mots ne sont pas aussi déséquilibrées qu’il y paraît au premier abord. Cela est d’autant plus vrai que chacun des défauts pourrait aisément se muer en qualité si une volonté politique réelle se substituait, dans la tête des dirigeants français, au rejet de l’Afrique qui s’y trouve plus ou moins ancré. D’où cette idée, qui paraîtra absurde à beaucoup mais dont les hauts responsables des deux bords feraient bien de s’inspirer, selon laquelle seul un effort de compréhension, et donc d’information réciproque, peut changer la disposition des cartes sur la table où se joue la présente partie de poker.

Si la France veut développer de véritables partenariats avec l’Afrique, elle doit faire l’effort d’observer avec attention l’évolution du continent et cesser d’en juger d’après les apparences, ou à partir de ce qu’en disent ses médias. Et si l’Afrique veut convaincre la France, l’Europe qu’elle est bien le continent de l’avenir, elle doit se préoccuper sérieusement de faire connaître elle-même ses avancées, ses capacités, ses objectifs.

Conclusion : se comprendre et apprendre à se respecter devraient figurer en tête des préoccupations des deux camps. On en est encore loin, mais la tâche n’est pas insurmontable.

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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