Afrique : la question du partage des données pour lutter efficacement contre l'évasion fiscaleMardi 17 Février 2015 - 12:28 La chargée de la fiscalité chez Oxfam Catherine Olier regrette l'absence de moyens pour les pays africains pour participer à l'échange automatique d'informations en matière fiscale, alors qu'ils sont les principales victimes des flux financiers illicites. Catherine Olier constate l'augmentation de la quantité d'informations partagées automatiques en Europe et son renforcement à partir de 2016. Elle regrette cependant l'absence d'impact sur les pays en développement (Ped), leurs administrations fiscales n'étant pas prêtes à mettre en place une telle norme. « Avec ce système nous allons créer deux mondes, a-t-elle dit : celui des pays développés qui pourront lutter efficacement contre l'évasion fiscale et celui des autres ». Pour éviter l'écueil, Catherine Olier plaide pour une réciprocité avec les pays du G20 « dans l'échange d'informations fiscales afin de permettre aux pays en développement de lutter eux aussi contre l'évasion fiscale », a-t-elle poursuivi, avant d'appeler au renforcement des administrations fiscales des pays du sud « afin qu'ils puissent – à moyen terme – participer pleinement au système d'échange ». « Ne pas impliquer les pays en développement dans le système mondial d'échange automatique de données fiscales c'est aussi prendre le risque que ces mêmes pays soient tentés de devenir des paradis fiscaux » prévient-elle. Et puis elle explique les raisons qui incitent un Etat à devenir un paradis fiscal : « le taux de taxation des étrangers est très bas, voire nul ; la culture du secret et l'absence de coopération en matière fiscale avec d'autres Etats ». Elle se dit convaincue de l'intérêt des Ped à intégrer un tel système mais en faisant remarquer l'existence de difficultés à connaître leur véritable priorité, étant donné que leur position n'est pas toujours prise en compte dans les négociations internationales entre les pays du G20. Selon les chiffres du Global Financial Integrity (GFI), les pays développés ont perdu 900 milliards de dollars en 2012, ce qui représente sept fois le montant de l'aide publique au développement (APD) consacrée par les pays développés aux pays du sud. En effet pour 1 dollar d'APD, ce sont 7 dollars qui ressortent sous forme de flux financiers illicites. Parmi les actes sur lesquels il faut avancer, Catherine Olier propose le renforcement des administrations fiscales des pays du sud via le financement et l'assistance ; la mise en place d'un cadre législatif adapté à la lutte contre l'évasion fiscale, par exemple en mettant en place le reporting pays par pays. Elle pense que ce qui existe déjà pour les banques devrait obliger les multinationales européennes investissant dans les Ped de dévoiler l'effectif de leurs employés, les bénéfices engrangés et le montant des impôts qu'elles versent afin de s'assurer de « la taxation des biens dans le pays où se trouve l'activité réelle et non dans les paradis fiscales ».
Noël Ndong |