CPI : Paris demande à trois pays africains de réintégrer les rangsMercredi 2 Novembre 2016 - 16:15 Paris vient de demander aux pays africains qui veulent quitter la CPI à « reconsidérer » leur décision. Trois pays africains, le Burundi, l’Afrique du Sud et la Gambie ont annoncé leur retrait de la juridiction internationale qu’ils considèrent partiale et ciblant essentiellement les pays africains. Un communiqué du Quai d’Orsay appelle « instamment les pays ayant fait ces annonces à reconsidérer leur intention et reste disposé à entretenir un dialogue constructif sur le fonctionnement du système de justice pénale internationale […] La lutte contre l’impunité est essentielle pour permettre le respect des droits de l’Homme, une réconciliation et une paix durables ». L’Afrique du Sud et le Burundi ont déjà informé les Nations unies de leur décision, qui aura effet dans un an. « La Cour pénale internationale joue à cet égard un rôle unique en tant que seule juridiction pénale permanente à vocation universelle », ajoute le communiqué. Cet universalisme a été critiqué par l’Union africaine (UE) et le président soudanais, Omar El Béchir. Fin janvier 2016, les 34 pays africains signataires du statut de Rome avaient déjà émis la possibilité d’un retrait collectif. Déjà en 2014, Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, directeur de l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire déclarait : « dés-africaniser la CPI est une condition sine qua non pour rétablir sa crédibilité, [appelant] à la fois à réfuter l'accusation de néocolonialisme et inciter la Cour à s'intéresser à des affaires non africaines, car ce problème de perception ne cessera que lorsque les personnes poursuivies viendront de plusieurs continents ». Sur les 10 enquêtes ouvertes par la CPI depuis 2003, neuf sont des pays africains. La procureure Fatou Bensouda n’en démord pas Malgré la sortie fracassante de l’Afrique du Sud, du Burundi et de la Gambie, Fatou Bensouda ne recule pas. La CPI « n’est pas sur le point de fermer ». Pour elle, l’Union africaine (UA) ne doit pas fermer ses portes à la CPI, étant entendu que « nous partageons les mêmes valeurs : la paix; la sécurité; la stabilité et la justice. Et qu’il est essentiel de poursuivre des enquêtes, en Afrique et hors d'Afrique ». La procureure a récemment ouvert sa première enquête en dehors de l’Afrique, sur la guerre entre la Géorgie et la Russie en Ossétie du Sud, et elle mène des examens préliminaires en Colombie, en Afghanistan, en Irak et en Palestine. A Banjul, on fait remarquer qu’à chaque fois que « la Cour commence à élargir son terrain d’action dans des endroits où des Etats occidentaux sont impliqués », ses enquêtes ne progressent pas. Certains experts font remarquer que les Etats africains qui veulent quitter la CPI « tentent de camoufler leurs agendas politiques internes par des vieilles critiques populaires contre la dominance occidentale». Un retrait orchestré ? A trois semaines de l’assemblée annuelle des Etats parties de la CPI, l’enseignante en droit public international à l’Université libre d’Amsterdam, Marieke de Hoon, n’exclut pas que cette vague de retraits soit « orchestrée ». Mais elle rassure aussi : « en Afrique, il existe un puissant lobby pro-CPI, qui la critique et veut l'améliorer ». Parmi les acteurs, elle cite le Gabon, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Botswana. « Ce sont ces voix que nous devons écouter, plutôt que rejeter », a-t-elle dit. Elle invite à comprendre l’environnement politique dans lequel la CPI fonctionne, avec « des ressources limitées, une juridiction limitée ». Elle convie la communauté internationale à « prendre au sérieux les critiques pour repenser l'institution, sinon, ce sont les dictateurs, tentant d'échapper à la justice qui l'emporteront ». Un groupe de personnalités africaines appellent les trois pays à reconsidérer leur décision Le groupe est composé, entre autres, d'anciens acteurs de la justice pénale internationale. Il appelle les trois pays à « reconsidérer [leur décision] et à se réengager en faveur du Statut de Rome », texte fondateur de la CPI. Ce groupe recommande aux Etats africains de discuter de leurs divergences avec la CPI, lors de l'Assemblée des Etats parties, dont la prochaine session se déroulera du 16 au 24 novembre à La Haye. Pour l’un des membres du groupe, Mr Jaloow, « les retraits de la CPI constituent un grave obstacle aux droits des victimes à la justice et à l'obligation pour les Etats de faire en sorte que des comptes soient rendus pour des atrocités de masse. Ils bloquent un important recours à la justice, et compromettent la lutte mondiale contre l'humanité ». Le Burundi fait l’objet d’un examen préliminaire à la suite des violences perpétrées depuis l’annonce de la candidature et l’élection du président Pierre Nkurunziza. L’Afrique du Sud est accusée par la CPI pour avoir refusé en 2015 d’arrêter le président soudanais, Omar el-Béchir. La Gambie accuse la CPI de « persécution envers les Africains, en particulier leurs dirigeants ». Retrait de la CPI ne signifie pas fin de la CPI Ces départs ne peuvent empêcher à la CPI de poursuivre son combat de juger les criminels de guerre, contre l’humanité et génocides. Mais ils sont un signal pour la Cour. Plusieurs autres pays, comme le Kenya, l’Ouganda, la Namibie, ont suggéré leur retrait. Sachant que le retrait ne suspend pas la poursuite de l’examen des affaires commencées. L’action prenant effet seulement un an après la date de réception de la notification. Mais un retrait en masse, à l’échelle du continent semble improbable. Certains pays africains s’étant prononcés pour le soutien de la CPI. C’est le cas du Mali, du Botswana et de la RD Congo. Sur les 194 Etats membres des Nations unies, seulement 124 sont signataires du Statut de Rome, entré en vigueur le 1er juillet 2002, 34 sont africains, tandis que les pays comme la Russie, la Chine, les Etats-Unis ne sont pas Etats parties. Fondée en 1999, la CPI est chargée de juger les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et les génocides que les Etats sont incapables ou refusent de poursuivre. Les 34 pays africains signataires du statut de Rome 1- Afrique du Sud; Noël Ndong Notification:Non |