Denis Sassou N’Guesso : « Nous n’avons pas eu tort d’engager nos forces dans la réalisation des infrastructures de base »

Lundi 7 Décembre 2015 - 15:00

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Le sommet sur la coopération sino-africaine qui s’est tenu les 4 et 5 décembre derniers à Johannesburg, en Afrique du sud, a débouché, entre autres, sur l’octroi de 60 milliards de dollars par la partie chinoise à ses partenaires africains. Dans une interview accordée à la presse nationale, le 6 décembre à son retour à l’aéroport international Maya-Maya, à Brazzaville, le chef de l’Etat congolais commente les grandes décisions prises à l’issue de cette rencontre.

Les Dépêches de Brazzaville (LDB) : Monsieur le président, vous venez de participer à ce sommet placé sous le thème : « La Chine et l’Afrique avancent ensemble : coopération gagnant-gagnant pour un développement commun ». Quelle a été, selon vous, la principale décision prise à l’issue de cette rencontre ?

Denis Sassou N’Guesso (D S N'G) : Il faut d’abord dire que, effectivement à Johannesburg nous venons de tenir, aux dires de tous les dirigeants africains et chinois, un sommet historique parce que, au cours de ces assises, il a été établi que la Chine et l’Afrique représentent à elles seules, le tiers de la population du monde. En établissant un partenariat entre elles pour le développement, la Chine et l’Afrique peuvent sérieusement marquer le cours des affaires du monde. Il a été aussi établi que la Chine et l’Afrique ont connu en quelque sorte un parcours similaire, ce sont les deux peuples qui ont été dominés, exploités et même humiliés et qui ont dû lutter longtemps pour se libérer. Aujourd’hui, ils ont réalisé qu’ils peuvent représenter ensemble une force.

Ces peuples ont les possibilités humaines, des ressources naturelles et une certaine maitrise des technologies. L’Afrique a une population jeune, il y a aussi la volonté politique. Ces derniers temps, on a vu que depuis le dernier forum jusqu’aujourd’hui, la Chine est en train d’intervenir massivement et appuie les efforts de développement des pays africains. Les statistiques ont été déclinées. Des projets ont même été présentés d’un pays à un autre. Par exemple, l’aéroport de Brazzaville a été exposé lors du sommet parmi les projets emblématiques si l’on peut le dire réalisé par la Chine en Afrique dans plusieurs pays, pour ne pas dire dans tous les pays.

Pour répondre à votre question, au cours de ce sommet, la volonté politique d’amener le partenariat global stratégique entre l’Afrique et la Chine a été exprimée. Les partenaires chinois ont annoncé qu’ils mobiliseront, au cours des trois prochaines années (2016, 2017 et 2018), 60 milliards de dollars. Parfois en don pour aider les pays les plus pauvres, parfois en prêt préférentiel, dans tous les cas, dans de bonnes conditions. Ces 60 milliards vont être injectés en Afrique, principalement dans le secteur des infrastructures. Vous voyez bien que dans notre pays, nous n’avons pas eu tort d’engager nos forces dans la réalisation des infrastructures de base sans lesquelles aucun développement n’est possible. Cela a été réaffirmé au cours du forum de Johannesburg.

Sur les 60 milliards de dollars, 35 milliards seront consacrés à l’effort de réalisation des infrastructures de base, notamment les routes, les aéroports, chemins de fer, électricité, télécommunications et j’en passe. La modernisation de l’agriculture a été retenue comme un autre axe. Tous ces axes ne sont pas loin de ce que nous avons arrêté ici au niveau national, dans notre projet, le Chemin d’avenir.

LDB : La coopération sino-congolaise est particulièrement basée dans les domaines de la santé et des infrastructures. Est-ce que cette dynamique peut être élargie dans les autres secteurs tels que l’agriculture, l’élevage ?

D S N'G : Cela a été dit de manière explicite, il nous suffit, au fond, de lire la déclaration de Johannesburg. Lisez la déclaration de Johannesburg, décortiquez le discours prononcé par le président chinois à l’ouverture du forum. Je parlais tout à l’heure de modernisation, c’est un axe de programme des trois prochaines années. La modernisation de l’agriculture en Afrique pour atteindre  l’autosuffisance, ce sont des axes retenus. Vous voyez que dans tout ce programme, il y a un problème de fond : la question de l’emploi parce que, là aussi, il a été clairement dit qu’il faut former des hommes compétents, qualifiés. Dans le discours du président Xi Jinping, il annonce comment son pays va former de dizaines de milliers de cadres en Chine et de dizaines de milliers d’autres en Afrique. La formation qualifiante a été retenue comme l’un des axes importants parce qu’on ne peut pas exécuter tout ce programme sans les hommes et les hommes qualifiés.

LDB : Monsieur le président, vous êtes très préoccupés par la composition de plus en plus critique du Conseil de sécurité des Nations unies, la question a été évoquée à Johannesburg, mais dans quels termes ?

D S N'G : Dans les mêmes termes. Dans les axes de coopération qui ont été retenus, il y a la coopération politique, les échanges, le soutien mutuel au plan politique. Eventuellement, le partenaire reconnait que l’Afrique, au niveau international et notamment au niveau des Nations unies ne pourrait continuer de rester comme la 5e roue du Carros. Et l’Afrique se bat pour la réforme du système des Nations unies, surtout pour qu’elle ait sa place parmi les membres permanents du Conseil de sécurité avec droit de Véto. Cette position de l’Afrique a été toujours soutenue par la Chine.

Avant le sommet Chine-Afrique, vous avez participé à la COP21 au cours de laquelle vous avez appelé à des accords contraignants. Est-ce qu’en Afrique du sud, vous avez épilogué sur la question et que disent les deux partenaires : la Chine et l’Afrique ?

D S N'G : Nous ne pouvions plus ouvrir un autre débat sur les changements climatiques en Afrique du sud. Des positions des partenaires chinois ont été exposées par le président Xi Jinping à Paris, celles des dirigeants africains aussi. Comme la négociation se poursuit à Paris, nous ne sommes pas encore arrivés au 12 décembre, il serait, à notre avis, maladroit d’ouvrir un autre débat sur la question à Johannesburg alors que les négociations se poursuivent à Paris. Les positions des parties sont connues, suivons les négociations et on va voir quel sera le dénouement.

Parfait Wilfried Douniama

Légendes et crédits photo : 

Le président de la République répondant aux questions de la presse au salon d’honneur de l’aéroport Maya-Maya ; crédit photo Adiac

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