Genre: les oubliées du 8 marsMercredi 13 Mars 2019 - 11:45 Les femmes déficientes mentales, errant jour et nuit dans les rues de plusieurs localités du pays, n’ont visiblement pas fait l’objet d’une attention particulière lors de la célébration de la Journée internationale des droits de la femme. Les défis liés à leur prise en charge, les abus sexuels dont elles sont victimes semblent passer sous silence, même pas une conférence-débat pour appeler à une prise de conscience collective.
Les Congolaises de toutes les couches sociales, notamment vulnérables, ont célébré avec faste la Journée internationale des droits de la femme sur toute l’étendue du territoire national. Femmes rurales, femmes en milieu carcéral, veuves…, toutes se sont mobilisées autour du thème national « L’implication de la femme congolaise dans la lutte pour l’autosuffisance alimentaire des produits de base ». Il est bien clair que le thème interpelle les femmes disposant de toutes leurs facultés mentales afin qu’elles mettent la main à la pâte pour créer de la richesse en aidant le Congo à relever le défi de l’autosuffisance alimentaire. Seulement, peu d’actions, sinon pas d’actions n’ont été orientées vers les femmes malades mentales dites « folles ». Un qualificatif jugé péjoratif pour nombre de psychiatres, notamment le Pr Alain Mouanga, neuro-psychiatre et chef de service de psychiatrie du Centre hospitalier universitaire de Brazzaville, qui préfère le terme « psychose chronique » à la « folie ». La vulnérabilité de ces femmes malades mentales, les abus sexuels dont elles sont curieusement victimes et le danger public qu’elles représentent, dans une certaine mesure, semblent passer sous silence. Elles sont parfois violées et engrossées. L’absence d’initiatives en leur faveur, à l’occasion de la célébration de la Journée internationale des droits de la femme, notamment le 8 mars, renforce ainsi le regard stigmatisant et discriminant que la société pose sur elles, considérées comme des laissées-pour-compte. « Penser que la maladie mentale est différente des autres maladies, c’est faire de la discrimination », selon le Pr Alain Mouanga. Un problème à prendre à bras le corps La célébration de la Journée internationale des droits de la femme devrait aussi être une occasion pour celles qui jouissent de leurs facultés mentales de prendre à bras le corps la situation de leurs sœurs souffrant de psychose chronique tant celles qui déambulent dans les rues, dans différentes localités du pays, que celles qui sont placées à l’asile. La fête peut aussi être belle à travers les plaidoyers sur l’amélioration de la prise en charge des femmes malades mentales, de leur protection sociale, des conférences-débats pour une prise de conscience collective ainsi que d’autres initiatives fortes sur le terrain. Pourtant, l’observation faite est telle que les femmes se désolent de voir leurs sœurs malades mentales se balader nues et livrées au regard de tous. Souvent, pour éviter ce spectacle, elles ont le réflexe de les couvrir par un pagne ou autre habit. La Journée internationale de la femme ne devrait pas donc uniquement être faite d'initiatives pour revendiquer les droits de celles ayant une bonne santé mentale car les soeurs malades mentales ont aussi des droits. Même si au Congo les efforts sont consentis dans le cadre des soins et l’encadrement des malades mentaux de façon générale, il y a encore du chemin à parcourir. Les services de la sécurité civile les prennent dans les rues pour les mettre à l’asile, mais peu de temps après, on les retrouve dans les artères de la capitale. La coordination entre les affaires sociales et la sécurité civile mérite d’être renforcée pour mieux contrôler les fuites des malades mentaux de l’asile vers la rue.
Rominique Makaya Légendes et crédits photo :Photo 1 : Une malade mentale déambulant au centre-ville de Brazzaville.
Photo 2 : Une malade mentale cherchant de la nourriture dans un bac à ordures, à Brazzaville. Notification:Non |