Interview. Rebecca Juliana Tshiabu : « Je devais entrer dans la peau d’une vraie fan »

Mardi 6 Septembre 2022 - 19:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

L'actrice fait ses premiers pas au cinéma dans Ima. La comédie romantique de Nils Tavernier lui donne un rôle à son opposé : fervente chrétienne, elle en sait plus sur le gospel que le style de musique joué dans le film. Et donc, le challenge est de tout apprendre pour pouvoir jouer Laëtitia, une jeune kinoise à peine sortie de l’adolescence et, de surcroit, branchée et avenante, puinée de celle qui fait battre le cœur de Dadju. Second rôle féminin d’Ima, elle raconte son aventure sur son premier plateau dans cette interview exclusive accordée au Courrier de Kinshasa.

 

Rebecca Juliana Tshiabu, Laëtitia dans Ima (DR)Le Courrier de Kinshasa (L.C.K.) : Répondiez-vous aux critères du personnage ou des ajustements  ?

Rebecca Juliana Tshiabu (R.J.T.)  : L’année passée, au moment du tournage, j’avais 22 ans alors que je devais incarner le rôle d’une adolescente de 16 ans. Dieu merci, avec le temps, le rôle a évolué pour finalement devenir celui d’une fille de 18 ans. C’était un peu plus proche de moi. Je devais avoir un look de gamine et donc, pour la styliste, j’étais censée porter des petits shorts et autres tenues du genre. Je lui ai dit que c’était certes une belle opportunité de jouer dans ce film mais que je ne pouvais pas m’habiller en mini-jupe, je n’allais exposer ni mes cuisses, ni mon ventre. Elle a tenté de me faire comprendre que j’étais une artiste et ne devait m’imposer aucune restriction de ce genre. J’en ai parlé avec Nils qui a dit à la styliste de me laisser choisir des tenues où je serai à mon aise. Il lui a expliqué que, dans le cas contraire, je ne serai pas bien dans ma peau. Cela ne cadrant pas avec mes valeurs, je serai coincée et pas naturelle. Mais, Dieu merci, on a pu se mettre d’accord là-dessus. C’était une très belle expérience.   

L.C.K. :  Comment avez-vous vécu  le tournage ?

R.J.T. : J’ai participé à deux semaines de tournage avec des intervalles, nous ne tournions pas systématiquement tous les jours. Et, je pensais qu’il suffisait d’une prise pour que tout soit dans la boîte. Ce qui, à ma grande surprise, n’était pas le cas. La première fois, j’en ai bavé. C’est là sur le plateau que j’ai fait ma première expérience : il fallait rejouer plusieurs fois la même chose et garder la même énergie, le même rythme du départ avant de passer à autre chose. Je me suis plaint car je n’arrivais pas à tenir le rythme, c’est alors que Nick Mukoko, Yavan dans le film, avec qui je jouais la scène du moment m’a calmée m’expliquant que les choses se passaient souvent de la sorte, il fallait donner le meilleur. Moi je n’en savais rien, personne ne m’avait prévenue ! J’étais sortie de la maison sans avoir rien mis sous la dent ! Séance de coiffure de Rebecca se préparant à jouer Laëtitia, sœur d’Ima (DR)J’apprenais sur le champ les réalités du métier. Après avoir vécu cette dure expérience la première fois, au prochain tournage déjà j’étais parée pour toute éventualité. Et, le dernier jour de mon tournage tombait le jour de mon anniversaire. Alors que nous étions sur le plateau depuis 11h00, tout n’était prêt qu’à 19h00 et le tournage a enfin commencé entre 23h30-minuit. J’étais là debout perchée sur des hauts talons à répéter la scène bougeant devant la caméra et il fallait garder la même énergie. Il y avait de quoi être à bout de force mais je tenais le coup, j’étais déjà bien rodée. Le réalisateur n’avait plus à revenir tout le temps sur moi, me dirigeant, corrigeant mon jeu parce que j’avais compris mon rôle. Je l’incarnais bien. Les scènes étaient reprises juste parce que l’on voulait avoir les meilleurs angles possibles et non pas parce que je n’étais pas à la hauteur. Au bout du compte, plusieurs dans l'équipe m’ont dit qu’ils ont pu tenir grâce à l’énergie que je dégageais de sorte que je les motivais à continuer. J’étais tellement gaie qu’ils arrivaient à s’efforcer. Le tournage avait pris fin aux alentours de 2h00 du matin. 

L.C.K. : Qu’est-ce qui vous a plu dans Ima  ?

R.J.T. : J’ai beaucoup apprécié que l’on montre Kinshasa sous une image positive. Une ville qui plaît au regard et donne envie car assez souvent c’est le côté misérable de cette ville que plusieurs films tournés ici mettent en avant. Tout n’était pas net, mais c’était au moins à l’image de la ville qui n’est pas seulement sale et repoussante. Kinshasa, notre pays, a été bien mieux présenté dans Ima comparé à ce que je vois d’habitude. La beauté de notre culture est apparente et aussi nos valeurs, notamment le respect de la femme. Et, j’aime beaucoup la personnalité d’Ima qui ne se laisse pas impressionner par la star qu’elle côtoie, elle reste simple.

Rebecca Juliana Tshiabu et le réalisateur français Nils Tavernier (DR)L.C.K. : A vous entendre, ce n’était pas trop difficile d’entrer dans la peau de Laëtitia  ?

R.J.T. : Non, à vrai dire, ce n’étais pas trop difficile. D’ailleurs, si j’ai fait l’unanimité au casting, c’est parce que je pouvais jouer en restant naturelle. Personne, de ceux qui me connaissant peuvent prétendre que j’ai surjoué. Par ailleurs, le rire c’est une option que j’ai adopté. Et, comme on le dit souvent, ceux qui rient beaucoup pleurent beaucoup, c’est mon cas. Je pense que le rire est thérapeutique. J’ai pu incarner le rôle d’une adolescente de 18 ans parce que j’ai gardé cette ingénuité des filles de cet âge. J’ai lu le script et j’ai travaillé pour incarner le rôle de cette jeune fille assez délurée et de bonne éducation mais un peu frivole sur les bords qui prend la vie comme elle vient. Je ne connaissais pas bien Dadju mais je devais apprendre à entrer dans la peau d’une vraie fan, adopter les manies des jeunes filles branchées qui vivent à fond dans l’air du temps.

L.C.K. : Au fond, vous n’êtiez pas spécialement fan de Dadju, mais c’est tout autre chose dans Ima …

R.J.T. : Après avoir lu mon texte, je me suis mise à travailler mon personnage à fond. J’ai commencé à regarder les vidéos de Dadju, à apprendre les paroles de ses chansons parce que pour certaines séquences, comme il s’agissait de ma fête, la caméra serait braquée sur moi. En tant que fan numéro un de Dadju, je devais connaître des paroles, quelques pas… J’ai vu et appris ses pas de danse, j’ai travaillé sur tout cela. Le plus dur c’était d'incarner le personnage d’une grande fan de Dadju. Pour cela, il fallait retenir ses chansons au point d’arriver à bien jouer mon rôle. Mais sinon, à mon avis, pour le reste, c’était plutôt facile. Je dégage déjà beaucoup d’énergie à la base, mon naturel a fait l’affaire. Je ne sais pas cacher mes émotions et sentiments. Ce que je ressens transparaît sur mon visage. Quand je suis d’humeur chagrine, je dois fournir beaucoup d’effort pour que cela ne transparaisse pas. Le plus souvent je n’y arrive pas. Tout se lit sur mon visage, et j’ai appris que c’est un atout pour le cinéma de savoir être vraie, pouvoir communiquer ses émotions.

Propos recueillis par Nioni Masela

 

 

 

 

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Rebecca Juliana Tshiabu, Laëtitia dans Ima (DR) Photo 2 : Séance de coiffure de Rebecca se préparant à jouer Laëtitia, sœur d’Ima (DR) Photo 3 : Rebecca Juliana Tshiabu et le réalisateur français Nils Tavernier (DR)

Notification: 

Non