Investissement : l’Afrique doit-elle attendre l’aide extérieure pour se développer ?

Vendredi 4 Novembre 2016 - 11:35

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L’assemblée nationale française a procédé à l’examen du budget de son aide au développement le 2 novembre, qui a reçu la désapprobation des députés.

Le budget de l’aide au développement n’a pas arrêté de dégringoler depuis près de cinq années. Les députés parlent de quinquennat « catastrophique », alors que le gouvernement promet de  mieux faire pour 2017. L’aide française au développement est en constante diminution depuis 2012. Une baisse de plus d’un cinquième, soit au total de 20,8%, équivalent à 646 millions d’euros. « Un effondrement incompréhensible » pour le député Jean-François Mancel, rapporteur de la commission finances.

Des promesses à la hausse en année électorale

En décembre 2013, le Président François Hollande avait annoncé l’engagement de 20 milliards d’euros pour l’Afrique, puis en septembre 2015 un surplus de 4 milliards d’euros de financements d’ici à 2020.  Le projet de budget pour 2016 confirmait déjà la tendance à la baisse des crédits budgétaires de la mission (- 170 millions d’euros).

« A l’exception des anciens combattants, l’aide publique au développement est la mission qui a le plus souffert des diminutions de crédité », a-t-il regretté. Précisant : « pour la première fois depuis cinq ans, la mission aide au développement augmente, légèrement, mais elle augmente. En revanche, sur l’ensemble du quinquennat c’est une véritable catastrophe ».  Un probable inversement, pour une tendance à la hausse  pourrait avoir lieu en 2017, une année électorale en France, avec ses lots de promesses.

Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault a promis de « veiller à ce que le budget 2017 soit en forte augmentation ». Il a avancé que l’aide au développement de la France va bénéficier de 403 millions de plus par rapport à 2016. Ce qui remettra la France dans les rangs des pays  prêts à consacrer 0,7% de son Revenu national brut (RNB), aujourd’hui à 0,38%. Une aide pourrait s’élever à 0,48%  en 2017. Le patron du Quai d’Orsay a reconnu le retard de la France « qu’il faut rattraper », sans préciser quand et comment, alors que l’aide du Royaume-Uni a atteint le seuil de 0,7% depuis  2013, et  que celle de l’Allemagne « devance » l’aide française.

Un front de critiques

La « gaine » mise à l’aide au développement par la France est critiquée par ses partenaires, qui l’appellent d’aider l’Afrique d’urgence. Ce continent devrait passer de 1,2 milliard d’habitants en 2015 à 4,4 milliards en 2100. Si l’Afrique reste un partenaire incontournable pour la France, elle est désormais courtisée par des économies développées et fait nouveau, de la coopération Sud-Sud. Elle constitue un marché présent et futur pour le Brésil, l’Inde ou pour la Chine. L’Afrique fait l’objet d’une âpre guerre économique, dont on occulte l’existence.

En raison de ses richesses en matières premières, sa croissance économique et démographique, son potentiel d’achat de ses classes moyennes, de la gravité des crises qui la secouent, mais également des guerres civiles qui poussent ses populations vers le chemin des migrations, de certaines épidémies comme celle d’Ebola, qui alimentent les flux migratoires, ou des systèmes de santé rapidement débordés - épidémie d’Ebola -, l’Afrique c’est le rendez-vous qu’il ne faut pas manquer. La France, pionnière d’antan semble négliger  ce continent au moment où il a vraiment besoin d’elle, pour soutenir son agriculture, son éducation de base, son électrification…

L’Afrique connaît une évasion fiscale évaluée à 37 milliards d’euros, selon un rapport de 2013 présidé par l’ancien président d’Afrique du Sud Thabo Mbeki. A en croire certains experts, les entreprises du G7 seraient responsables de la moitié de ce manque à gagner. Mais la France ne propose pas son expertise pour renflouer les caisses des Etats africains. Même si l’amélioration de la gouvernance financière est lente, on constate beaucoup plus  de volontarisme du côté de l’Afrique anglophone que francophone. Or, l’arrêt de la fuite des ressources fiscales permettrait au continent africain à diminuer sa dépendance à l’aide extérieure.

Les atouts de l’Afrique pour financer son développement durable

L’Afrique connaît une croissance durable qui ouvre des voies à des ressources financières à long terme. On estime aujourd’hui à plus de 200 milliards de dollars, les recettes intérieures mobilisables dans le continent. Et l’Afrique, par le biais les banques centrales et les banques de réserve, détient plus de 400 milliards de dollars de réserves internationales. Les envois de fonds de la diaspora africaine  étaient estimés en 40 milliards de dollars en 2012 par la Banque mondiale et pourraient atteindre 200 milliards de dollars d’ici à 2020. On peut ajouter des sommes qui pourraient être récupérées sur des flux financiers illicites. Or, l’aide extérieure reçue représente 50 milliards de dollars.

Pour que l’Afrique puisse assurer son propre développement, elle doit mettre en œuvre 80% de ses programmes et projets de développement.  Ce qui appelle à la mise au point d’instruments innovants de mobilisation des ressources intérieures, l’amélioration de l’efficacité des systèmes en place, ainsi que la réforme de la gouvernance, de sa politique institutionnelle, la mise en place de cadres juridiques et réglementaires rendant l’environnement général favorable à l’investissement et à la mobilisation des ressources intérieures, selon des experts. Ce qui n’est pas encore le cas. 

Noël Ndong

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