Italie : deux otages en Syrie libérées, la question des rançons en débat

Samedi 17 Janvier 2015 - 12:11

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Deux jeunes humanitaires enlevées en juillet dernier à Alep sont revenues au pays vendredi sous les interrogations des conditions de leur libération.

Les deux jeunes femmes ont reçu l’accueil chaleureux de leurs familles et de leurs amis, le 16 janvier, très tôt dans la matinée à l’aéroport militaire de Rome Ciampino. Le ministre des Affaires Paolo Gentiloni a même été le premier à les embrasser devant les caméras de toute l’Italie éveillée. Mais passé le moment de liesse commencent déjà les lourds points d’interrogation : combien a-t-il fallu payer aux terroristes syriens pour la libération de  Greta Ramelli (20 ans) et Vanessa Marzullo (21 ans) ? Naturellement la réponse ne peut venir des intéressées qui, dans de circonstances pareilles, sont tenues loin de toutes démarches et tractations. Il est arrivé des cas où ceux-ci ne voyaient la lumière du soleil que le jour de leur libération (ou, hélas, de leur décapitation). En décembre dernier, les deux jeunes filles s’étaient pliées au rituel éprouvant de la « preuve de vie » : face à une caméra, elles brandissaient un écriteau avec date (17 décembre 2014) et imploraient le gouvernement italien de leur venir en aide. Fondatrices d’une petite ONG, Horryaty, spécialisée dans le domaine de l'eau et de la santé, elles s’étaient rendues en Syrie attirées par un message d’invite sur Internet.

Mais combien a-t-il fallu payer au mouvement Front Al-Nosra qui avait revendiqué leur enlèvement pour qu’il les libère ? 18 millions d’euros, s’est vanté le mouvement terroriste sur les réseaux sociaux. Pas un sou, a martelé le gouvernement à Rome, tout en laissant entendre qu’il s’en tenait « aux règles ». Une réponse qui peut laisser place à toutes les interprétations. « Nous sommes opposés au paiement de rançons. Notre priorité est toujours, de toutes les manières, la protection de la vie et de l'intégrité physique de nos concitoyens », a dit le ministre des Affaires étrangères devant les députés vendredi.

Mais il a ajouté : « En matière de rançon, l'Italie s'en tient aux règles et comportements partagés au niveau international. Ce n'est pas la ligne de ce gouvernement, c'est la ligne de l'Italie », a-t-il dit. Alors, quid des affirmations d’Al-Nosra ? De simples ragots, a-t-il dit ; « des indiscrétions sans fondement réel et parfois véhiculées directement par des groupes terroristes » eux-mêmes. Soit. Mais la question agite la classe politique à l’instar du mouvement de la Ligue du Nord qui n’entend pas que le gouvernement finance indirectement le terrorisme : « ce serait un scandale », s’est indigné son leader Matteo Salvini. Il n’empêche que la question est vraiment essentielle, surtout parce qu’il reste encore deux otages italiens dans le monde : un prêtre jésuite en Syrie, et un coopérant au Pakistan. Dans l’un comme dans l’autre cas, des voix se sont exprimées pour demander si leur longue détention (plus de deux ans) n’était pas due précisément au fait que les modalités de payement ne prenaient pas la bonne direction.

Lucien Mpama