Révision de la loi électorale : un coup de force de l’opposition contenu par la police

Lundi 12 Janvier 2015 - 15:45

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La police nationale congolaise (PNC) a étouffé, le 12 Janvier, la tenue d’une marche de l’opposition qui devrait partir du siège de l’UNC jusqu’au Palais du peuple en vue d’empêcher l’examen du projet de loi électorale.

Journée fort agitée que celle vécue dans la matinée du lundi. Des esprits avertis l’avaient pressenti eu égard aux appels à la mobilisation contre la révision du Code électoral lancé la veille par des leaders de l’opposition. Ces appels se sont multipliés devenant de plus en plus acérés démontrant, par ricochet, le côté suicidaire de cette démarche parlementaire tendant à faire glisser le calendrier électoral aux fins de prolongation du mandat présidentiel. À chacune de leur sortie, les opposants ont invité la population à transcender la peur pour investir le Palais du peuple où devraient débuter lundi l’examen du projet de loi modifiant et complétant la loi électorale. Le Mouvement de libération du Congo (MLC) sous la houlette de sa nouvelle secrétaire générale, Eve Bazaïba, avait demandé à la population de se prendre en charge face à l’incapacité des députés de l’opposition à ramener leurs collègues de la majorité aux bons sentiments.

C’était sans compter avec les forces de l’ordre qui, tout le week-end, se sont déployées à travers la ville pour faire échec à ce projet de l’opposition. La marche de la plate-forme « Sauvons la RDC » censée avoir lieu le 11 janvier sur le boulevard Triomphal en guise de protestation contre la modification de la loi électorale a été étouffée dans l’œuf. Les organisateurs de la manifestation ainsi que des militants des partis politiques affiliés à ce regroupement politique ont été empêchés de se rassembler par les éléments de la police déployés sur le site. Ces derniers, à en croire des sources, ont eu recours à la force brutale pour disperser les manifestants dont plusieurs avaient été interpellés.

Cette scène était prémonitoire de ce qui allait se passer le lendemain, le jour où les députés rationaux étaient censés débattre du projet de la loi électorale. Tôt le matin déjà, les Kinois étaient surpris par la forte présence policière aux abords du Palais du peuple. Le siège de l’Union pour la Nation (UNC) qui se situe à quelques encablures de là devrait servir de point de ralliement d’une marche populaire improvisée qui devait avoir pour point de chute l’hémicycle du Palais du peuple. C’était la stratégie qu’avait choisie l’opposition pour faire échec à toute tentative de révision du Code électoral. Ils étaient là, tous ou presque, les têtes couronnées de « l’opposition kabiliste » qui s’opposent au troisième mandat de Joseph Kabila. Vital Kamerhe de l'UNC, Eve Bazaiba du MLC, Fabien Mutomb de l'UDPS, Jean-Lucien Bussa du CDER, Jean-Claude Mvuemba du MPCR, Franck Diongo du MLP, Gabriel Mokia du MDCO, Ingele Ifoto du DDC, Lisanga Bonganga du FP, Joseph Olenga Nkoy du Fonus, Kudura Kasongo du FIS, Martin Mukonkole et tant d’autres n’avaient qu’une seule idée en tête : empêcher à tout prix l'examen dudit projet électoral. Tout autour de l’enceinte du siège de l’UNC pris d’assaut par une foule immense des partisans, des policiers dépêchés par le commissaire provincial de la police veillaient au grain.

La réaction des policiers au premier mouvement des manifestants cherchant à gagner le Palais du peuple a été à la hauteur de leur hargne à les contenir dans leur périmètre. Et face à l’hystérie d’une foule prête à en découdre, même à main nue, avec leurs bourreaux, le gaz lacrymogène paraissait être la seule voie d’issue pour des policiers visiblement débordés. Soudain, des balles réelles ont commencé à retentir. Dans le sauve-qui-peut qui s’en est suivi, quelques opposants s’en sont tirés avec des égratignures, d’autres molestés à défaut d’être poignardés à l’instar d’un cadre du CEDR. Kudura Kasongo, ancien porte-parole de Joseph Kabila passé désormais dans l’opposition, s’en est tiré avec une jambe blessée pendant que son collègue Jean Lucien Bussa avait du mal à se relever après avoir été rué des coups. Certaines sources ont allégué le décès d’un homme en uniforme à coup des projectiles.

Encerclés au siège de l’UNC pendant de longues heures, les opposants ont du passer de longues heures dans une pièce minuscule, tenus en respect par les éléments de la police avant d’être relaxés. Ce qui ne fait qu’annoncer les turbulences sociopolitiques censées marquer les prochaines échéances électorales. À moins que les deux camps - majorité et opposition -  fassent preuve de dépassement en arpentant la voie du consensus, l’unique alternative pour tirer le pays du gouffre dans lequel il s’est empêtré.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Un groupe de manifestants devant le siège de l'UNC