Sécurité alimentaire : «Nous avons des atouts indéniables », déclare Henri DjomboJeudi 2 Juin 2016 - 17:45 Le nouveau ministre d’Etat en charge de l’Agriculture, de l’élevage et de la pêche a pris part au Conseil de la FAO à Rome, les dossiers pour lui ne sont pas nouveaux. Les Dépêches de Brazzaville(LDB) : Monsieur le ministre d’Etat, il y a peu vous étiez ministre de l’Économie forestière, vous avez aujourd’hui la charge d’un plus grand département : nouvelles et plus grandes responsabilités ? Henri Djombo(HD) : C’est exact : les responsabilités sont nouvelles et plus importantes. Il s’agit de promouvoir trois secteurs importants pour le pays : agriculture, élevage et pêche qui concourent majoritairement à la sécurité alimentaire du pays. J’ai coutume de dire qu’il s’agit ici du ventre des Congolais, que nous devons traiter avec responsabilité pour qu’ils se portent bien sur les plans de la santé et de leur porte-monnaie. Et, aussi, il nous faut réduire ou, pourquoi pas !, éliminer les importations massives des denrées alimentaires et que nous puissions nourrir les Congolais avec une production interne. LDB : Des défis énormes ! Y-a-t-il des chances que le Congo puisse jamais les relever ? HD : Nous avons toutes les chances ! Nous avons des atouts indéniables : des terres arables qui ne sont occupées qu’au niveau insignifiant de 2%, des pluies abondantes ; nous sommes traversés par l’Equateur, nous pouvons donc pratiquer une agriculture en contre-saison ; nous avons des apports agricoles mobilisables. Il faut, bien sûr, des appuis financiers et techniques suffisants pour que nous puissions, même à court terme, relever ces défis mais les atouts, nous les avons. LDB : Des forêts à l’agriculture : deux secteurs complémentaires où il y a des chances que vous continuiez des dossiers entamés dans le précédent ministère… HD : Oui. Nous sommes d’ailleurs dans un même bâtiment, ce qui permet une certaine synergie. Nous avons participé à la sécurité alimentaire pour une bonne exploitation de la biodiversité. Nous avons toujours pensé qu’il fallait réduire l’agression des espaces forestiers par une agriculture productive. C’est certainement le moment de le faire, sur la base de semences améliorées, la maîtrise de l’eau, de la fumure, l’enrichissement des sols. Bref : des actions qui nous permettent d’accroître sensiblement la productivité, donc la production, et de réduire les besoins en sols. Nous avons également à poursuivre la mise en œuvre de la stratégie sectorielle de développement durable en faisant en sorte que l’agriculture participe activement à l’émergence de l’économie verte, et l’aquaculture à l’économie bleue. Nous sommes engagés à œuvrer ensemble pour aller dans cette direction, parce que nous avons eu à protéger la faune maritime et aquatique. Nous devons maintenant savoir l’exploiter en tant que pêche, pour la mettre au service du développement économique et social de notre pays. LDB : Venons-en maintenant à l’objet de votre présence à Rome, la participation à la 154è session du Conseil de la FAO… HD : C’est une session qui a été consacrée aux questions de procédures administratives et financières, mais il y a le programme 2014-2015 avec beaucoup d’objectifs assignés, dont beaucoup ont été atteints. Mais les pays en développement sont loin d’avoir combattu la faim. Il nous faut accélérer le pas contre la faim, la malnutrition et la sous-alimentation. Il nous faut aussi lutter contre les pertes après production ou après capture ; une bonne conservation des aliments, la transformation des produits agropastoraux ou halieutiques, sans oublier une meilleure circulation des personnes et des biens pour un commerce juste. LDB : Question éternelle : à Maputo, il y a quelques années, l’Union africaine avait recommandé que les Etats consacrent 10% des budgets nationaux à l’agriculture. Le Congo y arrive-t-il ? HD : La résolution de l’Union africaine fut prise à Maputo, en 2003. Il s’agissait que cinq ans plus tard, les Etats puissent consacrer 10% de leur budget national au développement rural. Aujourd’hui, nous constatons qu’on est encore très loin de ce taux. Dans tous les cas, peut-être qu’on n’aurait pas besoin de toute cette somme pour engager les programmes. C’est pourquoi il faut déjà considérer les besoins réellement exprimés par le secteur rural. Je suis sûr que si les moyens sont mis en place, n’importe quel pays peut atteindre l’autosuffisance alimentaire, la sécurité alimentaire. LDB : Vous avez été à la FAO et au FIDA : sur quoi ont porté les entretiens avec ces organismes multilatéraux ? HD : J’ai effectivement rencontré le directeur général de la FAO. Nous avons fait le point de la coopération et de l’exécution des projets en cours, envisagé une coopération future qui tire les leçons des actions passées pour aller vers des actions porteuses et efficaces. Avec la FAO, nous maintenons une coopération très forte dans le domaine forestier, et maintenant nous la développons dans les domaines de l’agriculture et de l’élevage. La FAO appuie le Congo depuis plusieurs décennies à travers des projets, de petites actions d’appui et d’assistance. Avec le FIDA, il y a un projet, le programme de développement de la production en milieu rural, le PADF et un autre d’appui à la pêche et l’aquaculture. Nous avons fait le point de l’exécution du PADF et réaffirmé le besoin de mettre en œuvre, dans les conditions les plus rapides, le projet concernant la pêche et l’agriculture. Nous allons prospecter d’autres zones de coopération avec cette organisation. Nous aimerions que toutes les interventions des organisations internationales, en particulier des agences des Nations unies, puissent être mises en cohérence, qu’elles puissent mutualiser les moyens pour agir plus efficacement étant donné que, parfois, ce sont des initiatives qui visent le même objectif et qui opèrent sur les mêmes acteurs. Donc, harmoniser les actions pour les rendre plus efficaces. Notre objectif, je le répète, est qu’en trois ans on puisse atteindre la sécurité alimentaire. Ce n’est pas, je me répète ici aussi, un objectif impossible si la volonté politique est là, et si on y met les moyens. Les hommes sont là, peut-être pas en nombre suffisant ni en qualité suffisante, mais il faut les préparer à cela et en former d’autres. Et il nous faut aussi être assistés par des compétences extérieures qui nous mèneraient à accélérer la marche vers nos objectifs.
Lucien Mpama Notification:Non |