Sommet de Paris sur l'IA : deux visions du monde s'affrontent autour de la régulationMardi 11 Février 2025 - 18:16 Le sommet de Paris sur l'intelligence artificielle (IA) a vu s'affronter, le 11 février, deux visions du monde. Les Etats-Unis appelant à limiter la régulation pour ne pas tuer une industrie en plein essor qu'ils dominent et ne signant pas l'appel sur une IA ouverte, inclusive et éthique. A la clôture du sommet à la mi-journée, 58 pays, dont la Chine, la France et l'Inde (les deux co-organisateurs), ainsi que l'Union européenne et la Commission de l'Union africaine, se sont prononcés pour une coordination renforcée de la gouvernance de l'IA nécessitant un dialogue mondial et ont appelé à éviter une concentration du marché afin que cette technologie soit plus accessible. Une vision très éloignée de celle défendue par les Etats-Unis qui, comme le Royaume-Uni, ne figurent pas parmi les signataires de cette déclaration, voulue par le président français, Emmanuel Macron, et rassemblant des principes partagés de régulation, un thème maintes fois abordé lors de ce sommet. Le gouvernement britannique a fait savoir qu'il ne souhaitait adhérer qu'à des initiatives qui sont dans l'intérêt national du Royaume-Uni. Ce grand raout mêlant pendant deux jours dirigeants politiques et patrons de la "tech" dans l'enceinte du Grand Palais a été marqué le 11 février par le discours très offensif du vice-président américain, J.D. Vance, dont c'est le premier déplacement à l'international depuis la prise de fonction de Donald Trump fin janvier et l'annonce de "Stargate", un plan d'investissements dans l'IA américaine à hauteur de 500 milliards de dollars. A rebours d'une Europe voulant aller plus vite tout en définissant un cadre à l'essor de l'IA, il a souhaité faire "tous les efforts possibles pour encourager les politiques pro-croissance" en la matière. "Les Etats-Unis sont les leaders dans l'IA et notre administration entend qu'ils le restent", a-t-il souligné, quelques heures après la publication d'informations sur une offre non sollicitée d'Elon Musk, l'homme le plus riche du monde et membre de l'administration Trump, sur la start-up OpenAI, à l'origine de ChatGPT. Selon le Wall Street Journal, le milliardaire (qui dispose déjà de sa propre start-up d'IA générative, xAI, lancée en 2023) veut, avec un groupe d'investisseurs, racheter l'organisation à but non lucratif qui contrôle OpenAI pour 97,4 milliards de dollars. L'entreprise n'est pas à vendre, a rétorqué mardi Chris Lehane, vice-président en charge des affaires publiques, de passage à Paris pour un événement dédié aux entreprises de la "tech" à Station F, l'incubateur de start-up fondé par le français Xavier Niel. Avant de quitter la nef du Grand Palais, J.D. Vance a également mis en garde contre les partenariats avec les « régimes autoritaires », dans une référence à peine voilée à la Chine. En réponse aux ambitions américaines, Emmanuel Macron a insisté sur le besoin de règles et d'un cadre de confiance pour accompagner le développement de l'IA. "Nous avons besoin de ces règles pour que l'IA avance" et "besoin de continuer à faire avancer une gouvernance internationale de l'IA", a-t-il dit, en clôture du sommet qui s'est traduit pour la France en annonces, avec un plan d'investissements privés à hauteur de 109 milliards d'euros. Pour le Premier ministre indien, Narendra Modi, qui co-présidait le sommet IA et va accueillir le prochain, le défi est de ne pas laisser "le sud global", dont son pays et son 1,4 milliard d'habitants, à la traine d'une révolution technologique en plein boom. Mais pour Dario Amodei, patron de la start-up américaine Anthropic, ce sommet s'apparente à une "opportunité ratée". "Il est nécessaire de se concentrer davantage" sur les enjeux démocratiques de l'IA, ainsi que les risques liés à la sécurité et à l'emploi que fait peser cette technologie, a-t-il souligné. Alors que l'Union européenne tente d'avancer ses pions dans cette course à l'IA, elle a dévoilé le 11 février un plan d'investissements de 200 milliards d'euros, dont 150 milliards venant de grands groupes. Il s'agit du "plus grand partenariat public-privé dans le monde pour le développement d'une IA fiable", au sein de l'alliance "EU AI Champions Initiative" qui regroupe plus de 60 entreprises, a souligné la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen. Le "leadership mondial est toujours à saisir", a-t-elle estimé. Les signataires de la déclaration du sommet sur l'IA à Paris, qui incluent la Chine, la France et l'Inde (les deux co-organisateurs de l'événement), se sont aussi prononcés pour une coordination renforcée de la gouvernance de l'IA nécessitant un "dialogue mondial" et ont appelé à éviter "une concentration du marché" afin que cette technologie soit plus accessible. Londres n'a pas signé la déclaration pour des raisons d'intérêt national Le gouvernement britannique a mis en avant mardi l'intérêt national pour expliquer son refus de signer la déclaration finale du sommet sur l' IA à Paris. "Nous n'adhérons qu'à des initiatives qui sont dans l'intérêt national du Royaume-Uni", a déclaré un porte-parole du Premier ministre Keir Starmer. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ne figurent pas parmi les 61 premiers pays signataires de la déclaration pour une IA "ouverte", "inclusive" et "éthique". Le porte-parole du gouvernement britannique a précisé ne pas connaître les raisons pour lesquelles les Etats-Unis n'avaient pas signé la déclaration finale. Mi-janvier, Keir Starmer s'est engagé à faire du Royaume-Uni un "leader mondial" de l'IA. Il a annoncé un plan d'action visant à attirer les entreprises du secteur en leur laissant tester au Royaume-Uni leurs innovations avant toute régulation. "Nous allons suivre notre propre voie : tester et comprendre l'IA avant de la réglementer, afin de nous assurer que lorsque nous le ferons, ce sera de manière proportionnée et sur la base de données scientifiques", avait-il alors déclaré.
D'après AFP Notification:Non |