Tony C. Bolamba : « Nous devons plus penser à la République et au peuple qu’à nous-mêmes ».

Mardi 21 Juillet 2015 - 16:15

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Sous sa double casquette de président du Mouvement associatif mouvement pour le Congo (Moco) et d’analyste politique, Tony Bolamba décrypte la situation sociopolitique de l’heure en mettant une emphase particulière sur le découpage territorial et sur le dialogue qui se profile à l‘horizon.   

Les Dépêches de Brazzaville( LDB) : Quelle est votre perception en rapport avec le processus de découpage territorial tel qu’actionné par le gouvernement ?

Tony Bolamba (TB) : Le découpage, c’est constitutionnel. C’est nous, le peuple, qui avions voté cette constitution sous menace de certains partis et leaders politiques. Comme je l’ai toujours dit, lorsque le gouvernement fait quelque chose, c’est qu’il a eu le temps de réfléchir en prenant des précautions utiles. Je n’aime pas trop me prononcer au début ou au milieu de quelque chose. J’aime attendre la fin.

L.D.B : Certains redoutent un déséquilibre au regard du potentiel naturel de chaque nouvelle province, les unes étant mieux loties que les autres.    

T.B : Bien au contraire. Cela peut constituer un déclic dans le chef des nouveaux gouverneurs pour s’impliquer dans le développement de leurs entités respectives.  Il faut que l’on songe à  développer l’agriculture. Et d’ailleurs, les pays les plus riches sont les pays agricoles. La banque la plus riche en France, c’est bien le crédit agricole. Pourquoi doit-on toujours se focaliser sur les minerais alors que nous avons des terres arables, le fleuve, la forêt etc ? Dans une République, personne n’est en retard, personne n’est en avance. Tout cela dépendra des compétences de chaque gouverneur qui devra créer des moyens pour autofinancer sa province.

L.D.B : Quelle chance accorder au découpage lorsqu’on sait que la rétrocession de 40% des recettes aux provinces n’a été qu’une simple vue de l’esprit ?   

T.B : Tout est question de volonté politique.

L.D.B : Le premier cycle électoral débute d’ici le mois d’octobre. Croyez-vous que cette échéance sera respectée ?

T.B : Nous irons aux élections parce que le gouvernement s’est préparé pour que nous puissions avoir ces élections maintenant. Chez nous au Moco, nous aimons souvent aller à l’essentiel. L’essentiel, c’est que nous avons déposé nos candidatures. Nous continuons de travailler, de peaufiner nos stratégies dans l’optique d’une victoire électorale de sorte à amener de nouvelles  propositions de loi au sein de l’Assemblée provinciale parce qu’actuellement, on n’a pas de politique de la ville. En pleine capitale, figurez-vous, nous avons des endroits où il n‘y a ni eau ni électricité. Nous nous préparons parce que nous voulons apporter quelque chose de nouveau pour développer Kinshasa. Nous sommes des républicains, nous proposons des choses pour la bonne marche du pays.

L.D.B : Le calendrier global de la Céni est en proie à des perturbations…. 

T.B : Le retard que nous avons pris nous met dans l’impossibilité de respecter ledit calendrier. Toutefois, dans une République, il y a toujours moyen d’harmoniser les vues pour repartir sur de nouvelles bases. Tout est consensuel. On peut toujours postposer les locales et commencer par les élections provinciales qui déboucheront sur l’élection des sénateurs et des futurs gouverneurs avant d’atterrir l’année prochaine sur les législatives et la présidentielle.   

L.D.B : De quoi va-t-on débattre dans ce forum ?

T.B : Nous devons débattre de tous les sujets qui mettent tout le monde inconfortable au sein de la République. Autour d’une salle de concertations, on arrive toujours à dégager un consensus. Nous sommes des démocrates et nous ne devons pas cracher sur la démocratie que nous avons toujours défendue. Il importe que nous allions dans ce dialogue pour dégager un consensus qui, soit nous amènera aussitôt aux élections, soit nous conduira directement vers une autre façon de gouverner avec, à la clé, un réaménagement du calendrier électoral. Il est temps de trouver un compromis pour que l’alternance que veut notre peuple puisse se négocier dans le calme pour le bien du pays. En République, il n’y a ni vainqueur ni vaincu. Le seul vainqueur, c’est le peuple.

L.D.B : Une certaine opposition n’adhère pas au dialogue qu’elle juge inopportun.    

T. B : Mieux vaut que nous puissions trouver une solution qui mette tout le monde à l’aise plutôt que de risquer des scenarios catastrophes pour le pays. Nous devons plus penser à la République et au peuple qu’à nous-mêmes. Je suis totalement opposé à nos amis de l’opposition qui ne sont pas d’accord d’aller échanger pour le bien de la République parce que si l’on doit se dire des vérités en face et exposer notre mécontentement au gouvernement, nous avons un cadre bien défini qui nous offre l’opportunité de le faire. En République du Congo par exemple, ils ont eu cinq jours de dialogue franc où chacun est allé exposer ses joies ou encore ses peines. C’est à l’issue de ces échanges que naitra peut être quelque chose qui pourra apaiser les esprits ou faire évoluer les textes conformément aux aspirations légitimes du peuple. Même Satan et Dieu ont dialogué (Job 1,7-12) et ont trouvé un compromis. L’Eternel n’avait-il pas livré à Satan tous les biens de Job tout en lui interdisant de porter la main sur son serviteur ! 

L.D.B : Les dernières concertations nationales n’ont-elles pas suffi pour régler les questions qui se posent en interne ? 

T.B : Tout a été dit mais tout n’a pas été fait. J’avais proposé en son temps qu’on crée un cadre d’échange permanent de la République avec des personnalités neutres pour régler des problèmes ou faire des évaluations périodiques sur la conduite des affaires de l’Etat. Si cela avait été acté, peut-être qu’on n’arriverait pas là.

L.D.B : Quel crédit accorder à un dialogue boudé par les principales forces politiques de l’opposition avec l’UNC en tête de liste ?  

T.B : Ceux de notre qui vont m’élire demain savent comment j’ai toujours été modéré. Depuis 18 ans, nous combattons pour la bonne cause, celle de la démocratie, alors que ceux qui dirigent l’UNC (mouvement dissident du PPRD) actuellement, filtraient avec le pouvoir. Pourquoi dans la République, il y a toujours des dissidents qui s’opposent plus par rapport à ceux qu’ils rejoignent dans l’opposition ? Le président de l’UDPS, un dissident du MPR dont il a été un des co-fondateurs, s’est illustré par un extrémisme outrancier. Pourquoi c’est toujours des dissidents qui amènent l’Afrique à l’extrémisme ? Dans tout ceci, certains veulent prendre le peuple en otage en voulant porter leurs problèmes personnels avec leurs familles politiques au niveau des institutions.

L.D.B : Un mot sur le Moco….

T.B : Nous sommes neutres et nous avons une idéologie libérale. Nous essayons d’avancer à petit pas. De plus en plus, des congolais nous connaissent. Ils savent ce que nous voulons exactement pour notre peuple. Il y a encore beaucoup à faire par rapport à d’autres formations qui ont commencé avant nous à Kinshasa. Certains ont une vingtaine d’années d’existence alors que nous ne sommes qu’à notre troisième année. Je suis content parce que tout ce que je dis s’accomplit. Le 27 janvier 2012, lorsqu’il y avait contestation des résultats, j’avais dit à l’époque que vu que le président était mal élu, il fallait que nous échangions entre nous dans une perspective de composition d’un gouvernement d’ouverture. Ce qui fut fait plus tard avec le gouvernement de consensus. Au mois de février, après les émeutes de Kinshasa, j’avais lancé un appel au dialogue qui tend à se matérialiser aujourd’hui.  

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Tony C. Bolamba

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