L’empire du silence à Kinshasa : des projections réclamées en citéMardi 30 Août 2022 - 17:33 Les deux soirées publiques des 26 et 27 août au Centre Wallonie-Bruxelles du documentaire de Thierry Michel ont convaincu la salle de la nécessité de le présenter au commun des Kinois afin de lever le voile sur le contexte réel de la guerre de l’Est dont les contours décrits dans le film indignent résolument. « Société civile, la seule cause qui vous égosille serait-ce les élections ? », s’est indigné un jeune discutant avec des proches après l’échange avec Thierry Michel. Le réalisateur qui ne s’est pas arrêté au film en menant campagne contre ce mutisme incompréhensible qui couvre telle une ombre malfaisante le malheur de la RDC. Contrairement à la capitale où les initiatives sont soutenues et menées par une institution étrangère, à Bukavu particulièrement, c’est la société civile qui porte à bras-le-corps la campagne Justice pour le Congo dont les projections du 30 et 31 août sont le support. Peut-être parce que directement concernées par le film qui décrit leur triste sort, les sociétés civiles de l’Est se mettent en avant en annonçant avec vivacité les projections. Lamentable et piètre excuse qui ne tient pas la route pour Kinshasa. N’es-tu pas le Congo au même titre que le sont les provinces ? Loin du peuple, le commun des Kinois, qui peut changer la donne et prendre son destin en main, les projections de Gombe autant que les précédentes de Lingwala, au Palais du peuple sont vécues comme une insulte, une injustice. « C’est dans les quartiers que devrait être programmé le documentaire et non ici en ville», a dit au Courrier de Kinshasa, Justin, un artiste au bord des larmes. Pour lui, c’est invraisemblable que Kinshasa soit à peine sensible, en tout cas pas assez pour épouser la cause de ses frères, il lui faut voir le film pour réaliser son indifférence coupable face à cette partie tourmentée dont les échos lui viennent à peine audibles. « L’empire du silence maintenu sur les horreurs de la RDC, ses vingt-cinq ans de malheur endurés par les populations victimes de sa partie est ne s’explique pas», s’est indigné un cinéphile à la suite de la projection de la matinée du 26 août. Impensable après avoir vu ce film qui porte bien son nom, aucune autre expression ne saurait mieux traduire cette déroutante réalité autour des atrocités commises impunément. Déconcertant au point de faire perdre toute contenance aux cinéphiles, sans filtre, le documentaire montre la cruelle vérité des guerres de l’Est. L’Empire du silence a tout pour rallier Kinshasa à la cause défendue par le Dr Mukwege, la terrible terreur à peine chuchotée que vivent ses frères des provinces meurtries dont le quotidien est fait de tueries à répétition. Et dire que cela dure si longtemps et les voix ne s’élèvent pas assez pour le décrier. Ce sont des clameurs d’indignation qui devraient remplir la nation et pas ces faibles discours que ne portent qu’une poignée de Congolais. Une impasse meurtrière Passée, oui, elle est passée l’étape de Kinshasa pour l’instant seulement, espère-t-on, L’Empire du silence poursuit sa route vers Bukavu. Les messages se relaient sur les réseaux sociaux, une mobilisation tous azimuts est faite. L’un d’eux est celui d’un internaute soulignant avec force et détails : « Après Kinshasa ce week-end, voici le programme de projections / débats du film L’Empire du silence qui commencera ce mardi 30 août à Bukavu avant de se poursuivre a Goma et Kisangani. Nous invitons les mouvements des jeunes, les femmes, les députés nationaux en vacances, les députés provinciaux, les confessions religieuses, les avocats, les médecins, les infirmiers, les commerçants, les enseignants, les journalistes, les professeurs, agents de l’état, les acteurs de la société civile à se mobiliser comme un seul homme pour participer massivement à ces différentes projections. Que toute la population de Bukavu se joigne massivement à ces activités. Nous rappelons que ce film retrace le calvaire des 25 ans de souffrances, d’atrocités, violences et de massacres subis par la population congolaise ». Oui, il s’agit du Congo tout entier, mais Kinshasa semble ne pas s’identifier à la population congolaise. À entendre son slogan du moment « Congo mbok’elengi ! », cela nous renseigne assez sur sa propension à l’autodérision, la politique de l’autruche maintient dans une impasse meurtrière. Pourtant, elle s’y complaît. Justin est d’avis que « voir L’Empire du silence serait utile pour mener le Congo, que dis-je, Kinshasa à réaliser et affronter sa triste réalité et condition, celle de son membre mutilé, l’Est, pour arrêter une hémorragie qui n’a que trop duré ! » En effet, l’histoire nous rapporte que l’impulsion la plus forte, celle qui fait bouger, cause les plus grands bouleversements à l’échelle nationale vient de la capitale.
Nioni Masela Légendes et crédits photo :Photo 1 : Thierry Michel échangeant avec l’assistance après la projection de L’Empire du silence au Centre Wallonie-Bruxelles (DR)
Photo 2 : L’Empire du silence poursuit sa route vers l’Est en commençant par Bukavu (DR)
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