Les souvenirs de la musique congolaise : création et épopée de l’orchestre Viva la Musica (suite et fin)Jeudi 19 Octobre 2023 - 20:27 Nonobstant le départ massif de certains musiciens au cours de la période 1977-1980, Viva la Musica tient la dragée haute dans le paysage musical Kinois grâce à l’arrivée dans le groupe d’autres musiciens aux qualités artistiques de Papa Wemba chef coutumier du village Molokaï, Bakala Dia Kuba, Fula Ngéngé, Kuru Yaka, vieux Bokul qui ont permis à Viva la Musica de prendre de l’envol. Au fil des temps, papa Wemba se maintient en tant que leader et récupère plusieurs fois certains chanteurs, dont le secret réside dans sa qualité de dénicher les talents et de les propulser au summum de la gloire, exemples Réddy Amisi, Eménéya Kester, Lidjo Kwempa, Awilo Longonda, Stino L’AS de la chorale. Les mélomanes lui ont attribué le sobriquet de Foredole qui veut dire le formateur des idoles dont les titres emblématiques « Anibo », « Ngonda », « La vie est belle », « dernier coup de sifflet » en sont une parfaite illustration. Au regard de ses œuvres, la démarche musicale de Papa Wemba est très variée, ce qui l’éloigne de la monotonie et qui le singularise des autres artistes. Sa discographie comprend plus d’une quarantaine d’Albums et des tubes qui ont marqué des milliers de fans à travers le monde tels que « La vie est belle », « Kolo histoire » en passant par « Oko ni ngana » ou encore « référence ». En 1980, papa Wemba fait le tour de l’Afrique avec son tube « Analengo » qui se vend à 60 000 exemplaires. En 1988, Viva la Musica est l’un des premiers groupes congolais qui se rend en tournée au Japon, aux Etats Unis en passant par l’Europe, notamment en Belgique. Au milieu des années 1990, papa Wemba fait la connaissance de l’homme qui va donner un second souffle à sa carrière musicale Peter Gabriel qui assurera la première partie de sa tournée américaine et européenne. En 1993, Papa Wemba connaît un succès immense en matière de World music avec des titres comme « Maria Valencia », « Yolélé », « Sofélé ». Par la suite Papa Wemba s’installe en France où il débute une carrière dans le cinéma avec le film « La vie est belle » et se fait connaître aux Etats-Unies grâce à la revue Africa Oyé, deux de ses tubes « Maria Valencia » et « Le Voyageur » sont choisis par le réalisateur italien Bernado Bertolucci pour son film « Paradiso inferno ». Papa Wemba paraît également dans le film « Combat des fauves » de Benoit Lamy dont les principaux acteurs sont Ute Lemper et Richard Bohringer. Après 50 ans de carrière, Papa Wemba est considéré comme une des légendes de la musique congolaise et africaine, s’il n’est pas créateur de la rumba congolaise, il en est le pilier et propulse ce genre de musique à l’échelle Internationale. Il a participé tout de même au début du soukous, la rumba est restée sa référence malgré le fait qu’il a abordé d’autres styles comme le rock, le ndombolo et la world music. Il sied de noter que Papa Wemba est l’un des représentants les plus célèbres de la Sape, l’Album Molokaï sorti en juin 1998 fut le troisième album de Papa Wemba sur le label Real Word. En 1999, il se produit au Forest national de Bruxelles, sa participation au Festival Mawazine à Rabat au Maroc est une autre étape de l’épopée de Viva la Musica. Au cours d’un voyage de Viva la Musica en Europe, une affaire de trafic de visas et d’aide à l’immigration clandestine fut à l’origine de l’incarcération de Papa Wemba par les services de l’ordre de France. En effet, en 2003 Papa Wemba est suspecté de se trouver au cœur d’une affaire de trafic de visas et d’aide à l’immigration clandestine à travers ses tournées musicales entre son pays la RD Congo, la France et la Belgique. Le 17 février 2003, il est interpellé à Paris et maintenu en détention pendant trois mois et demi, le 16 novembre 2004 le tribunal de Bobigny le condamne à 30 mois de prison dont 4 mois fermes déjà purgés en 2003 et 10.000 € d’amende pour aide aux séjours irréguliers des clandestins sous couvert de ses activités artistiques (Tindika Ngulu, en lingala veut dire tenir le cochon en laisse et assurer sa protection au cours d’un voyage en Europe), terme utilisé dans le jargon des passeurs clandestins de la RD Congo à l’époque. Après avoir passé 4 mois en prison, sa peine fut revue et il bénéficia de 6 mois de prison avec sursis. De retour à Kinshasa, il fut reçu en triomphe par ses fans. Son épopée avec Viva la Musica fut marquée également par plusieurs prestations en RD Congo, en Afrique notamment en Côte d’Ivoire où il mourut le 24 avril 2016 en plein concert à la suite d'un malaise cardiaque à l’âge de 66 ans. Après un deuil national de trois jours, il fut inhumé au cimetière de la Nécropole entre ciel et terre situé dans la commune de Nsélé en présence de plus d’un millier de personnes. Des honneurs et distinctions : Papa Wemba est kora du meilleur artiste masculin d’Afrique à l’édition de 1996. A titre posthume, il est commandeur de l’ordre de la Côte d’Ivoire, grand officier dans l’ordre national des héros nationaux Kabila- Lumumba. A noter qu'à cause du décès de Papa Wemba, c’est au cours d’une réunion tenue à Kinshasa que les musiciens du groupe Viva la Musica ont placé Marie Rose Luzolo, dite Maman Amazone, à la tête de cette formation musicale et dont le chef d’orchestre est Tosha Fulakanda jusqu’à ce jour. Papa Wemba, bon défenseur de la musique congolaise, chanteur à la voix d’or, auteur d’innombrables œuvres, roi de la rumba congolaise, restera pour les artistes et mélomanes africains le symbole de l’âge d’or de la musique des deux rives du fleuve Congo en particulier et africain en général. Auguste Ken-Nkenkela Notification:Non |