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Jane Vialle

Vendredi 9 Janvier 2015 - 13:02

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Dispensaire, rue et marché Jane Vialle à Brazzaville, dispensaire Jane Vialle à Pointe-Noire ; Jane Vialle, ce nom fait partie du décor de ces deux grandes villes congolaises. Ancien sénateur, comme on disait à l’époque, et fondatrice de l’Association des femmes de l’Union française, Jane Vialle incarne le combat pour la libération de la  femme africaine du joug masculin.

Métisse, Jane Vialle est née le 27 août 1906 à Ouesso, d’une mère congolaise (Lari) et d’un père français. Elle effectue ses études secondaires à Paris, au Lycée Jules Ferry puis dans des cours privés. Elle obtient son baccalauréat et se lance dans le journalisme. Elle débute comme rédactrice à l’agence d’information Opéra Mundi.

Elue au Conseil de la République, elle y siège dans les rangs du Rassemblement de la Gauche, du 10 octobre 1947 au 2 juin 1952. En raison de sa connaissance de l’Afrique noire, elle fait partie de la délégation française lors des travaux des sixième et septième assemblées générales de Nations unies. Elle est, d’autre part, désignée à siéger au Comité spécial de l’esclavage constitué par le Conseil économique et social français.

Elle est victime d’un accident d’avion à l’aéroport de Mérignac (Bordeaux),  et décède quelques jours après, le 9 février 1953, dans une ville de la banlieue bordelaise. La femme africaine, et singulièrement, celle d’Afrique centrale, avait, en sa personne, une avocate intrépide et acharnée, usant avec intelligence de sa qualité de parlementaire.

Dans un article intitulé : « La femme africaine et son évolution », paru dans « La Semaine de l’AEF », quelques jours avant son décès, elle écrivait : 

[…] Depuis la constitution de 1946 et la création de toutes les institutions parlementaires qui en découlent, la formule « Evolution de la femme africaine » est devenue très à la mode.

En réaffirmant l’égalité des droits de l’homme, et en particulier l’égalité de l’homme et de la femme, et  en transposant cette formule en Afrique, les législateurs, les éducateurs, les missionnaires ont réalisé quels progrès restaient encore à accomplir pour que cette égalité soit manifestée dans les faits. […]

Mère, éducatrice des enfants par vocation, animatrice et gardienne du foyer, la femme africaine a, dans la plupart des cas, cinquante années de retard dans son éducation, par rapport à celle de son compagnon.

Cette éducation était certes plus délicate à faire, car par elle on touchait au cœur même des traditions de la structure sociale africaine ; mais il est cependant aujourd’hui admis que sans faire de révolution, donc créer de désordre, la femme africaine puisse évoluer dans son milieu.

[…] L’évolution de la femme n’est pas le rejet systématique des coutumes pour l’adoption aveugle des enseignements nouveaux, elle doit être une recherche de l’origine des traditions qui, pour la plupart, reposaient sur des bases logiques et morales, une comparaison avec les facteurs actuels d’existence, et une adaptation suivant les nécessités présentes en synthèse avec les connaissances nouvelles.

L’évolution de la femme n’est pas, comme trop souvent certains le croient, une prise de position contre l’homme ; elle doit être une connaissance chaque jour plus poussée des problèmes de la vie et des méthodes capables de les résoudre, ce qui fera de la femme non pas un être supérieur à l’homme, mais son égale capable d’être une compagne avisée avec laquelle il sera agréable de créer un foyer harmonieux.

La tâche est belle, elle sera longue, mais si les femmes le veulent, et en cela je leur fait confiance, avec l’aide toujours présente des éducateurs, des législateurs et des missionnaires, elles créeront cette nouvelle génération de femme africaine, qui n’aura rien à envier  aux femmes des autres continents du monde. »

Depuis plus de soixante ans, le combat pour l’évolution de la femme africaine s’est accéléré. Dans de nombreux secteurs de la vie, elle a réussi à s’imposer. Dorénavant, il est admis que la femme est l’égale de l’homme, quoique…

On parle désormais de parité pour franchir un palier supplémentaire dans la voie de l’égalité pleine homme-femme. Ce n’est pas gagné d’avance. Les adeptes du statut quo  s’opposent subrepticement au  plein exercice de cette égalité. La femme doit donc affronter ce conservatisme rampant. C’est pourquoi,  elle continue sans cesse de vitupérer : « Seule la lutte libère ». 

MFUMU

MFUMU

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Édition Quotidienne (DB)

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