Nomination des commissaires spéciaux : les provinces démembrées dans le giron de la majorité

Le suspense a été finalement levé le  jeudi dans la soirée concernant la nomination des commissaires spéciaux censés prendre les rennes des vingt et une nouvelles provinces issues du démembrement. Faisant suite à une recommandation de la Cour constitutionnelle demandant au gouvernement de prendre des mesures transitoires exceptionnelles en vue de garantir la sécurité et la continuité des services publics en attendant l’élection de nouveaux gouverneurs, le chef de l’État est vite passé à l’action. Il fallait parer au plus pressé devant le vide qui gangrenait la gestion desdites provinces abandonnées presque à leur triste sort. C’est dans cet état d’esprit que Joseph Kabila a donc signé l’ordonnance portant nomination des commissaires spéciaux et de leurs adjoints. Ces hauts fonctionnaires de l’État - tous issus de la coalition majoritaire MP/Palu - seront assistés des adjoints chargés respectivement des questions politiques, juridiques et administratives ainsi que des questions économiques, financières et de développement.

Quelques constats s’imposent d’emblée. Dans l’ex- Katanga par exemple, il s’observe une rupture totale avec l’administration de Moïse Katumbi Chapwé, entré en dissidence avec la majorité. Tous les potentiels candidats à l’élection - déjà remise aux calendes grecques - des gouverneurs et réputés proches de l’ancien gouverneur du Katanga ont été simplement écartés de la gestion de quatre nouvelles provinces issues de l’ex- Katanga. La province du Lualaba a été confiée à l’ancien ministre de l’Intérieur du gouvernement central, Richard Muyej, le Tanganyka à Richard Ngoy Kitangala tandis que Raymond Mande Mutombo prend le Haut-Lomami et Félicien Katanga, le Haut-Katanga. Une façon de tourner définitivement la page Moïse Katumbi qui n’a plus droit de cité au sein de la Territoriale. Une réalité qu’il avait, il y a plus d’un mois, devancé en quittant le parti présidentiel entraînant de fait sa démission du gouvernorat du Katanga. Le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie qui entend  avoir une mainmise sur le Katanga en prévision des prochaines joutes électorales vient, par ces récentes nominations, de confirmer ses velléités d’y maintenir son emprise.

Outre le diktat de la Majorité, l’opposition dénonce également une violation de la constitution qui ne prévoit, en aucun cas, la nomination des gouverneurs pour gérer les provinces. Le député Emery Okundji des Fonus est monté au créneau pour stigmatiser ce hiatus, la loi fondamentale ne prévoyant dans aucune de ses dispositions la nomination des commissaires spéciaux. Le fait que ces nominations n’aient concerné que les membres de la famille politique du chef de l’État et allié est jugé discriminatoire par l’élu de Lubefu qui interpelle, par la même occasion, le président de la République en tant que Garant de la nation et à qui revient l’obligation de veiller au respect de la Constitution. Pour lui, ces nominations tendent à diviser les congolais. D’autres voix au sein de l‘Hémicycle du palais du peuple mettent en relief le fonctionnement à deux vitesses de la nouvelle administration avec d’un côté des dirigeants provinciaux élus, et de l’autre, ceux qui sont nommés.

Quant aux organisations féminines, elles notent que sur les soixante-trois nominations, seulement deux femmes ont été promues. Ce qui, d’après elles, constitue un déséquilibre manifeste par rapport à la promotion du Genre pour laquelle le gouvernement a pris l’option d’en faire son cheval de bataille. Mais hélas !