Nelson Mandela : un héros nous a quittés

Vendredi 6 Décembre 2013 - 13:45

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Invictus

Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Noires comme un puits où l’on se noie,
Je rends grâce aux dieux quels qu’ils soient,
Pour mon âme invincible et fière,

Dans de cruelles circonstances,
Je n’ai ni gémi ni pleuré,
Meurtri par cette existence,
Je suis debout bien que blessé,

En ce lieu de colère et de pleurs,
Se profile l’ombre de la mort,
Et je ne sais ce que me réserve le sort,
Mais je suis et je resterai sans peur,

Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.

William Ernest Henley – 1888.

Invictus est l’un des poèmes qui a guidé Nelson Mandela dans sa lutte pour la liberté. Il aurait griffonné ces vers sur une feuille de papier, lue et relue pendant ses 27 ans de captivité dans la prison de Robben Island puis de Pollsmoor. « Je suis le maître de mon destin, je suis le capitaine de mon âme ». L’âme d’un libre-penseur qui a sauvé le destin d’une nation.

De saboteur à président de la République

En xhosa, Rolihahla, le prénom qui lui a été donné à sa naissance en 1918, signifie au sens figuré « fauteur de trouble ». Il en a gardé un esprit rebelle et insoumis en s’élevant contre le régime raciste de l’apartheid, en afrikaans « séparation », mis en place en 1948 en Afrique du Sud. Cette politique instituée par le Parti national dirigé par le pasteur Malan repose sur un principe de développement séparé. Le gouvernement affecte les citoyens dans des zones selon des critères raciaux et ethniques dans une Afrique du Sud, à majorité noire et minorité blanche, déjà marquée par le racisme. Les lois de ségrégations s’enchaînent et s’intensifient, écrasant les moindres libertés accordées aux noirs.

Quatre ans plus tôt, Nelson Mandela, avocat de formation, avait rejoint le Congrès national africain (ANC) afin de lutter contre la domination politique blanche. Lorsque les lois de l’apartheid entrent en vigueur, il rédige la charte de la liberté contre ce régime et participe à la lutte non violente jusqu’en 1960. Le gouvernement supprime l’ANC et l’action pacifiste ne porte pas ses fruits. Madiba (son nom de clan) créé alors une branche militaire et mène une campagne de sabotage contre des installations publiques et militaires. Il se fait arrêter le 12 juillet 1963 sur ordre de la CIA. Le prisonnier 46664 devra purger sa peine à perpétuité. À compter de cette date, Nelson Mandela, soutenu par sa femme Winnie qui poursuit son combat pendant sa détention, devient l’icône de la lutte pour l’égalité. Après vingt-sept ans d’emprisonnement, il est libéré le 11 février 1990 tandis que l’apartheid s’essouffle. Il prend alors le rôle de négociateur avec Frederik De Klerk, son libérateur et le dernier chef d’État de l’apartheid, dans la fin de la domination blanche en Afrique du Sud. Ensemble ils reçoivent le prix Nobel de la paix en 1993 pour avoir pacifiquement mis fin au régime et pensé conjointement les bases d’un pays démocratique. En 1994, Nelson Mandela est élu premier président noir de l’Afrique du Sud.

Toute sa vie, Nelson Mandela s’est battu pour l’égalité, la justice et la liberté, un combat reconnu par le monde entier. L’homme a libéré son pays, s’est ensuite illustré dans beaucoup de combats, et faisait preuve d’une sagesse infinie. « Le pardon libère l’âme, il fait disparaître la peur. C’est pourquoi le pardon est une arme si puissante », disait Madiba, tel un credo. Mais les héros ne sont pas immortels. Madiba s’est éteint jeudi 5 décembre 2013, à l’âge de 95 ans.

Morgane de Capèle