Justice : Hashi Omar Hassan reconnu innocent après 16 ans de prisonJeudi 20 Octobre 2016 - 18:25 Le Somalien accusé d’avoir assassiné une journaliste italienne et son cameraman a passé 16 ans en prison avant d’être innocenté et libéré. La Cour d’appel de Pérouse, centre-nord de l’Italie, s’était prononcée de manière définitive en 2000 : Hashi Omar Hassan avait été reconnu unique coupable de la mort de la célèbre journaliste de la 3è Chaîne Rai de télévision italienne, Ilaria Alpi. La journaliste-reporter était tombée dans un traquenard tendu par des criminels en Somalie où, avec son cameraman Miran Hrovatin, elle enquêtait sur un trafic de déchets dangereux. La piste l’avait menée du sud de l’Italie vers la Somalie où les milices shebabs n’avaient pas encore acquis leur force de nuisance actuelle, mais dans un pays qui était déjà en déliquescence avancée quand-même. Un chef de village leur avait fixé rendez-vous pour leur révéler les noms des barons locaux et ceux qui, de l’autre côté du continent, les fournissaient en déchets et en armes. Ils étaient tous deux tombés sous les balles d’un groupe d’hommes dans lesquels un témoin avait cru reconnaître Hashi Omar. Une véritable opération à la James Bond avait ensuite été montée par la force d’interposition italienne Folgore alors présente en Somalie, pour attirer le jeune homme à Rome où il avait été arrêté et conduit en prison. Audiences après audiences, la Cour d’assises de Pérouse avait fini par rendre un verdict sans autre contradicteur que… les propres parents des deux victimes italiennes. La mère Luciana Alpi, surtout, n’a cessé depuis de clamer son indignation au monde, estimant qu’on leur avait fourni « un » coupable mais pas « le » coupable, et que sa fille resterait certainement à jamais enterrée au cimetière romain de Flaminio sans que soit désigné le responsable véritable de sa mort. Mafia ? Cercles d’affaires douteux? Djihadistes en herbe voulant s’affirmer sur le front de la haine de l’Occident ? Le verdict de 2000 n’avait pu trancher entre les différentes pistes, même si des indications reportées par la journaliste dans un agenda désignaient clairement la piste brûlante des trafiquants d’armes. La Somalie, après la chute du régime de Mohamed Siad Barre en 1991, était devenue incontrôlable. En 1992, les Etats-Unis y conduisirent une mission d’aide et de pacification sous mandat de l’ONU, la mission Restore hope (Redonner de l’espoir), mais durent se replier un an et une cinquantaine de morts plus tard. L’Italie, ancienne puissance coloniale y envoya alors le bataillon Folgore, qui sera ensuite accusée des pires exactions. C’est dans ce contexte que les deux journalistes italiens furent assassinés. Et qu’un procès un peu sous pression d’une opinion frustrée fut précipité avec Hasi Omar Hassan à la barre se proclamant toujours innocent. 16 ans en prison jusqu’au jour où son principal accusateur, un Somalien du nom d’Ahmed Ali Rage, alias Gelle, avoua avoir tout inventé contre son compatriote. La justice n’avait dès lors pas d’autre choix que de libérer le faux coupable, et de maintenir son accusateur derrière les barreaux. Une justice a été rendue, mais un ou des coupables courent toujours. En Somalie ou en Italie. Ce pays de la Corne de l’Afrique est devenu au fil des années la poubelle de tout ce qui peut provenir d’une activité industrielle ou hospitalière nocive en Occident. D’autres équipes de journalistes ont pu attester que cela représente l’une des raisons pour lesquelles la Somalie continue d’entretenir le chaos et d’être terre de provenance de milliers de Somaliens tentant de gagner l’Europe par l’Italie. Pays uni sous Mohammed Siad Barre (mort en exil, au Nigéria, en 1995), la Somalie s’est émiettée après lui. Des pans de territoire s’en sont détachés proclamant unilatéralement leur indépendance sous les noms de Puntland et de Somaliland. Deux entités jamais reconnues par la communauté internationale mais qui fonctionnent en autonomie et ne semblent trouver aucun intérêt à revenir sous le giron de Mogadiscio, la capitale fédérale, malgré les efforts de l’ONU. Lucien Mpama Notification:Non |