Afrique : François Loncle livre son analyse prospective sur la démographieJeudi 24 Décembre 2015 - 12:20 Le député français François Loncle, membre de la commission parlementaire des Affaires, livre son constat après plusieurs missions en Afrique, sur les avantages et les inconvénients possibles de l’augmentation de la population africaine à l’horizon 2050. La population africaine poursuit sa croissance. Vers 1950, la population africaine était estimée à près de 240 millions d’individus. A présent elle est à plus d’un milliard et devrait atteindre deux milliards en 2050, selon les démographes. La population africaine, une croissance jamais constatée dans le monde… Une partie de l’Afrique subsaharienne concentrera une fois et demie la population de la Chine. Trois pays: l’Ethiopie, le Nigeria et la République démocratique du Congo entreront dans le Top 10 des pays les plus peuplés au monde. En moins d’un siècle, entre son indépendance en 1960 et 2050 – 90 ans exactement, le Niger aura vu le nombre de ses habitants multiplier par 20, sa population sera passée de 3 à 63 millions. D’autres projections tablent même sur des chiffres encore plus élevés, 76 millions voire 89 millions si le taux de fécondité ne connaît pas de changement. L’augmentation accélérée de la population africaine –de l’ordre de 2,7% par an – C’est le résultat de la baisse constante de la mortalité et du maintien d’un taux important de fécondité. En moyenne, une Africaine donne naissance à 5,4 enfants. Le record mondial est détenu par le Niger avec plus de 7 enfants par mère. Cette véritable explosion démographique a des conséquences immédiates et à long terme. … aux conséquences multiples Elle provoque un exode rural massif et une urbanisation anarchique : l’Afrique est le continent où la croissance urbaine (4,5% par an) est la plus rapide du monde. D’ici à 25 ans, les citadins représenteront 60% de sa population, contre 40% actuellement. Au lieu de 2 en 1960, les mégalopoles sont à présent au nombre de 57. On estime qu’en 2025, Luanda et Kinshasa compteront davantage d’habitants que Pékin et Los Angeles, qu’un Sénégalais et un Ivoirien sur quatre habiteront respectivement Dakar et Abidjan. Non seulement la poussée démographique risque de faciliter la propagation des épidémies, mais elle peut aussi constituer un facteur d’appauvrissement, en pénalisant les politiques publiques en matière de santé, de scolarité et d’emploi. Par exemple, le PIB par Nigérien a diminué d’un tiers en un demi-siècle, chutant de 476 dollars en 1960 à 297 en 2014. Au Gabon, dont la population a triplé depuis l’indépendance, le pourcentage de cotisants à la sécurité sociale n’a pas progressé en 50 ans. Une transition démographique qui peut se transformer en dividende Certes, la transition démographique a pris du retard en Afrique. Mais son poids n’est pas une fatalité inéluctable. Il peut se transformer en dividende, comme des Etats asiatiques l’ont démontré dans un passé récent, même si les méthodes intrusives, voire coercitives, pratiquées en Chine populaire et en Inde ne sont heureusement pas transférables en Afrique. Il est encore temps de freiner des tendances hasardeuses et de les inverser. Certains pays africains ont déjà œuvré dans ce sens, comme le Sénégal et l’Afrique du Sud où s’enregistre une forte baisse de la fécondité. Depuis la conférence de 2011 à Ouagadougou sur la planification familiale, les responsables politiques africains se sont emparés de cette problématique. La maîtrise de la taille des familles n’est plus un tabou. En Afrique comme ailleurs, on sait maintenant que l’émergence des classes moyennes et l’essor économique sont liés à une diminution du taux de natalité. Dans ce but, il convient de promouvoir les méthodes de contraception qui sont deux à trois fois moins utilisées en Afrique qu’ailleurs. Il faut faciliter l’accès à l’information, en implantant dans les villes et à la campagne des services de planification familiale. En la matière, une étroite coopération entre les pouvoirs publics et les églises s’avère nécessaire et efficace, comme en témoignent les exemples sénégalais et indonésien. Il convient, en même temps, de lutter contre les mariages précoces et de favoriser, par des incitations financières notamment, le maintien à l’école des jeunes filles. L’Afrique et l’exode rural L’exode rural sera ralenti par la mise en œuvre de programmes de développement agricole et d’infrastructures. L’encadrement scolaire est également une priorité puisque 43% de la population africaine a moins de 15 ans et, chaque année, près de 15 millions de jeunes arrivent sur le marché du travail. Le Niger l’a bien compris puisqu’il consacre 21% du budget national à l’éducation. D’ailleurs, le taux de scolarité y est passé de 31% en 2000 à 84% en 2014. Mais tous les efforts se révèleront vains si le continent africain n’est pas stabilisé et si les menaces ne sont pas écartées, conclut François Loncle. Noël Ndong Notification:Non |