Charles Richard Mondjo: Loango 2014 vise à soutenir la paix en Afrique centrale

Mardi 14 Octobre 2014 - 18:15

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~~Après le Tchad et l’Angola il y a quelques années, le Congo accueille du 15 au 29 octobre, à Pointe-Noire et dans le Kouilou, l’exercice militaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), intitulé Loango 2014.
A quelques heures de son lancement, le ministre à la présidence de la République, chargé de la Défense nationale, Charles Richard Mondjo, a dégagé dans une interview exclusive aux Dépêches de Brazzaville l’intérêt de cet exercice pour lequel 3000 hommes venus des dix pays de la sous-région sont engagés. Il souligne le désir de la CEEAC de « partager  ses valeurs communes de paix pour le bien-être des populations dans un espace sécurisé et stabilisé », et ajoute : « Loango 2014 est placé sous le signe de la montée en puissance de la FOMAC dans son aspect de capacité de déploiement rapide »

Les Dépêches de Brazzaville : Monsieur le ministre, quel est le but visé
par l’exercice Loango 2014 ?
Charles Richard Mondjo : Je vous remercie pour l’opportunité qui m’est offerte d’informer l’opinion nationale et internationale de la tenue, dans notre pays, de l’exercice militaire « Loango-2014 ». Cet un exercice multinational qui regroupe les armées de l’Afrique centrale. Le but de l’exercice est d’entraîner nos troupes, nos états-majors et la composante civile de nos États, à mettre en œuvre le concept de la capacité de déploiement rapide, chère à l’Union africaine.
LDB : Qu’est ce qui justifie le choix du Congo pour abriter cet exercice et sous quel signe se déroule t-il ?
CRM : Il n’ya pas de raison particulière pour justifier le choix du Congo. Il faut seulement retenir que c’est un exercice tournant organisé dans notre communauté économique régional, la CEEAC, tous les trois ans. Les États se portent volontaires et les structures du Conseil de paix et de sécurité d’Afrique centrale (Copax), c'est-à-dire, la commission défense et sécurité (CDS), le conseil des ministres du Copax et la conférence des chefs d’État, valident la candidature en fonction d’un certain nombre de pré requis. Mais dans tout cela, la solidarité prime sur tout, particulièrement le désir de partager nos valeurs communes de paix pour le bien-être de nos populations dans un espace sécurisé et stabilisé.
LBD : Peut-on connaître la nature des forces engagées par les pays et le format de l’exercice ? 
CRM : dans un esprit de solidarité, tous les pays de la communauté participent à travers les composantes des forces de police et gendarmerie, l’armée de terre, l’armée de l’air, la marine et la composante civile pour les missions humanitaires qui sont essentielles dans les opérations de maintien de la paix aujourd’hui. Le format de l’exercice est d’environ 3000 hommes repartis dans les différentes composantes telles que je viens de l’énumérer. L’exercice est placé sous le signe de la montée en puissance de la FOMAC dans son aspect de capacité de déploiement rapide. Dans la pratique, il s’agit d’être capable d’envoyer des unités sur le terrain dans un délai de 14 jours, quand une crise surgit, pour stabiliser la situation afin de conduire progressivement toutes les actions de retour à une situation normale.
LDB : Le renforcement des capacités opérationnelles de la FOMAC (Force multinationale d’Afrique centrale) est donc au cœur des préoccupations des pays de la CEEAC. Peut-on dire, aujourd’hui, qu’elle dispose de moyens suffisants pour assurer le succès de ses missions ? En d’autres termes, les Etats membres contribuent-ils au niveau qu’il faut au budget de fonctionnement de la FOMAC ?
CRM. La FOMAC n’est pas une vue de l’esprit. C’est un outil de paix indispensable dans notre sous-région. Depuis l’année 2003 par exemple, nous sommes déployés en RCA dans le cadre d’une mission multidimensionnelle. En ce qui concerne son fonctionnement, il faut dire que c’est d’abord une question de solidarité. Son financement est assuré par les États membres qui y contribuent selon une clé de répartition décidée par les chefs d’État et de gouvernement de la CEEAC.
Pour les effectifs, nos États ont validé depuis 2007 un catalogue de forces et des matériels qui impose à chaque État membre de toujours tenir à la disposition de la CEEAC, un format bien précis pour armer les différents contingents selon les missions exigées par la situation. Et enfin, nos armées dans les programmes d’instruction des hommes prennent en compte les standards de formation définis dans la directive de formation de la CEEAC et de l’Union Africaine dans le cadre de la force africaine en attente.
  LDB : La Centrafrique est effectivement le terrain sur lequel le FOMAC s’est essayée à la concrétisation de sa mission de maintien de la paix. Quel commentaire vous inspire le déploiement de la FOMAC dans ce pays, son renforcement ensuite par la MISCA (Mission internationale de soutien à la Centrafrique), et finalement la relève de la MISCA par la mission onusienne MINUSCA ?
CRM. J’adhère à votre approche quant à l’évolution de la FOMAC. Elle intègre bien la nécessité de la mise en place et la consolidation de l’architecture de paix et de sécurité en Afrique.
Ce concept est cher à notre Chef de l’État, son excellence Monsieur Denis SASSOU N’GUESSO qui, vous le savez, est un des grands promoteurs de la sécurité collective en Afrique. Et à ce propos, nous avions été instruits en début d’année, le ministre de l’Intérieur et de la décentralisation et moi-même, de tout mettre en œuvre pour que cet exercice « Loango 2014 » se déroule dans les conditions optimales, en appui au cadre organisationnel de la CEEAC.
Cette évolution de la FOMAC que vous venez de mentionner, marque la complexité de la crise en RCA, où nous avons commencé en 2003 avec la FOMUC, ensuite la Micopax1 et la Micopax2, sous mandat de la CEEAC. S’en est suivie la MISCA en 2013, sous mandat de l’Union africaine et aujourd’hui c’est la MINUSCA, sous mandat des Nations Unies. 
Nous sommes là devant une situation où comme disent les parachutistes du GPC (Groupement para commando Ndlr) : « jusqu’au bout, faire face ». La FOMAC reste disponible. C’est pour cette raison que l’entrainement reste une fonction essentielle dans le renforcement de ses capacités. 
LDB. La criminalité transfrontalière menace l’Afrique dans son ensemble. Combattre ce phénomène suppose une coopération active des armées et des services de sécurité des Etats. En la matière les  pays de la CEEAC coopèrent-ils parfaitement ? 
CRM. La criminalité transfrontalière est une des menaces de notre temps. Elle est considérée de par le monde comme une grande menace réelle. En ce sens, nos États collaborent parfaitement avec les moyens qui sont les nôtres, en mettant en place des synergies.
À ce propos, une structure interétatique est même déjà entrain d’être mise en place par le secrétariat général de la CEEAC de lutter contre cette menace. Les frontières maritimes dans le golfe de guinée sont concernées, nos frontières terrestres aussi. Le centre régional de sécurité maritime  de l’Afrique centrale va être remis officiellement par le Congo à la CEEAC en vue de son opérationnalisation, en marge de l’exercice « Loango-2014 ». Ce centre concourt à la sécurité transfrontalière.
LBD. Quel bénéficie le Congo pourra-t-il tirer de l’organisation de  Loango 2014 ?
CRM. Le bénéfice à tirer c’est la traçabilité sur les plans politique, diplomatique et opérationnel de la mise en œuvre de l’architecture de paix et de sécurité en Afrique en général et en Afrique centrale en particulier. Tout cela se fait sous la conduite des nations unies, de l’Union africaine, de la CEEAC et d’un partenaire important qui est l’union européenne. Et nous espérons que dans ce processus, le message de notre communauté économique régional sera plus audible auprès de  beaucoup d’autres partenaires. L’objectif ici est de faire que nos troupes gagnent en professionnalisme et deviennent plus crédibles et éligibles au cours des opérations de soutien à la paix.
LDB. Avez-vous un message en direction des populations congolaises en général et en particulier celles de Pointe-Noire et du Kouilou qui abritent l’exercice ?
CRM. Le peuple congolais est un peuple naturellement accueillant et hospitalier. Nous travaillons déjà avec les autorités politiques du département du Kouilou et de la ville de  Pointe-Noire pour que nos compatriotes réservent un joyeux et chaleureux accueil aux participants à l’exercice, mais aussi aux autorités politiques invitées à ce grand rendez-vous. Nous avons déjà mis à contribution les notables du Kouilou pour qu’ils nous ouvrent les portes du Kouilou.
Nous souhaitons pour nos hôtes un grand geste de solidarité de nos compatriotes de Pointe-Noire et même de Brazzaville, car certaines troupes de pays amis transiteront par Brazzaville pour se rendre au lieu de l’exercice.
LDB. Quelle attitude les éléments de la force publique congolaise engagés pour Loango 2014 et ceux qui resteront dans les casernes doivent-ils observer? 
CRM. Notre pays, notre gouvernement, notre force publique sont honorés par l’organisation de cet exercice sur notre territoire.
Le message pour les agents de la force publique participant à la manouvre Loango est le suivant : la discipline, la dignité, l’honneur et le professionnalisme.
Pour les agents de la force publique qui ne sont pas déployés dans Loango : discipline, dignité, honneur, professionnalisme mais surtout demeurez vigilants dans le cadre de la posture permanente de sureté.

Gankama N'Siah et Thierry Noungou

Légendes et crédits photo : 

Charles Richard Mondjo, Photo Adiac