Les souvenirs de la musique congolaise : Cercul Jazz, l'un des grands groupes historiques du Congo (Suite et fin)

Jeudi 16 Janvier 2025 - 18:02

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Après avoir effectué avec succès une tournée africaine qui le conduit au Gabon, au Tchad, au Cameroun et au Nigeria, puis à Pointe-Noire et à Dolisie, Cercul Jazz revient à Brazzaville et élit domicile au « Club Lomeka », dans la rue des Martyrs, à Moungali, et devient « Cercul Jazz Lomeka » .

Au fil du temps, Franklin Boukaka et Albert Ntounta Mamadou vont former un magnifique duo et s’imposer comme les meilleurs chanteurs et leaders incontestés du groupe dans les titres comme "Honoré na Mossaka", "Nitwani ya Biya", "Louzolo", "Pont sur le Congo" de Franklin Boukaka et "Loufoua tolo" de Ntouta Mamadou, titres produits par les éditions Pathé Marconi et Stenco et qui occupent une place de choix dans le catalogue musical congolais. En 1967, Atis Sita, jeune chanteur de l’orchestre Ok Band de Dolisie, découvert par Franklin Boukaka et Ntouta Mamadou lors de la semaine culturelle d’août 1967, fait son entrée dans le Cercul Jazz. A noter également l’arrivée dans le groupe d’autres musiciens et la défection de Franklin Boukaka en 1968, qui traversa le Pool Malebo pour l’orchestre Vox Africa de Jeannot Bobenga.

La recomposition de l’orchestre place Albert Ntounta Mamadou en tête, avec Atis Sita, Dors Mpassi, Joris Malonga (chanteurs), Sterling (guit solo), Simaro Malonga (guitare acc.), Elgy Ntounga (guitare mi solo), Nelly (guitare basse), Domsis (Toumbas). Au cours de ses différentes prestations dans les bars dancing de Brazzaville, le Cercul Jazz tient tête face à ses rivaux qui occupent déjà la sphère musicale, à savoir Les Bantous de la capitale, le Négro band, Tembo et autres. Le séjour de quatre mois dans les localités de Nkayi, Madingou, Makabana, Loutété et Sibiti est une étape du palmarès élogieux de l'orchestre.

Ayant constaté la vétusté de ses instruments de musique, le groupe sollicita un crédit auprès de la Banque nationale de développement du Congo en vue d’acquérir un nouveau matériel. La commande fut adressée en République allemande par le biais d’une maison de commerce de la place. Après avoir acquis ce nouveau matériel flambant neuf, lCercul Jazz se rend à Kinshasa en juin 1969 où il est accueilli avec enthousiasme par  les mélomanes et autorités, en l’occurrence le ministre Justin Marie Bomboko, le général Boumba, le colonel Tchikeva, très contents de voir arrivé un orchestre de Brazzaville et à qui ils apportèrent un soutien multiforme.

Cercul Jazz livra sur place plusieurs concerts dans les bars dancing tels que Vis-à-Vis, Parafifi, Malandila, Vata 69, et 123 où les titres "Pont sur le Congo", "Louzolo" connurent un franc succès. L'orchestre acquit une certaine notoriété sur l’échiquier musical kinois au point où Albert Ntounta Mamadou, galvanisé par le succès et sur conseil de certains leaders des orchestres kinois de l’époque, s’arrogea le leadership de l’orchestre. Il devint le patron du groupe à l’image de Franco, de Rochereau et autres. Une attitude qui ne trouva pas l’assentiment des autres membres du groupe car Cercul Jazz est leur patrimoine commun et nul ne peut être au-dessus des autres.

Le comportement déviant de Ntounta Mamadou incita la plupart de musiciens constituant l’ossature à quitter le groupe et regagnèrent Brazzaville. Parmi eux, le chanteur Atis Sita qui alla monnayer ses talents dans le Négro band, Domsis qui opta pour l’orchestre Les Grands Maquisards. Resté seul maître à bord du navire Cercul Jazz, Ntounta Mamadou reconstitua le groupe avec certains musiciens zaïrois mais il vécut le temps d’une rose. Terrassé par la maladie, Ntounta Mamadou tira sa révérence à Kinshasa en 1972, neuf mois après la mort de Franklin Boukaka en fevrier. Il fut inhumé à Brazzaville avec tous les honneurs en présence des grands musiciens kinois dont Gérard Madiata qui prononça l’oraison funèbre avant de faire un vibrant tour de chant à la mémoire du défunt.

Notons qu’avec la mort de Ntounta Mamadou, le Cercul Jazz cessa pratiquement d’exister. En 1975, le chanteur Matingou et le batteur Tochino Biniakounou tentèrent d’exhumer le groupe mais sans succès. 

Auguste Ken-Nkekela

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