Rythmes de chez nousJeudi 22 Novembre 2018 - 21:07 Nul doute que la chanson reste une expression culturelle et sociale. Et, comme telle, en véhiculant les valeurs de la société qui la génère, elle en influence le mode de vie. En scrutant la musique congolaise, on constate qu’elle a non seulement accompagné l’histoire du pays, mais elle a aussi mis en exergue les spécificités de celui-ci : l’indépendance, la « révolution », le marxisme-léninisme, le parti unique et ses grands challenges économiques, la forêt, la vie sur le fleuve Congo avec les voyages par bateau, la vie le long du rail avec l’amour comme thématique par excellence. Cette musique servait de miroir de la société congolaise et de média pour la promotion des valeurs. Surtout quand elle chantait l’unité nationale ou l’intégration sociale. Aujourd’hui, si les choses n’ont pas tellement changé dans la forme, elles le sont par le contenu car, outre le message qui est verrouillé, la chanson congolaise a cessé de promouvoir les bonnes mœurs. Elle les avilit plutôt. Difficile désormais d’écouter les chansons actuelles en famille ! Dangereux aussi de suivre les clips vidéo devant les enfants ! On a l’impression d’une poubelle retournée qui vous renvoie toutes les mauvaises odeurs. De quoi parle-t-on ? De « Dubaï qui est fermé », de l’araignée qui grimpe, du Congo qu’il faut porter au dos, du piment qu’on mange. Autant de thématiques difficiles à décrypter. Parce que le message n’est pas à prendre à la lettre. Interrogés par les médias, les musiciens congolais ont d’ailleurs de la peine à expliquer leurs chansons. Il s’agit des piques, des paraboles, des réparties, des provocations pour tout dire. La chanson devient cette arène aménagée pour des combats entre adversaires invisibles. C’est telle épouse trahie qui paye tel artiste pour chanter contre sa rivale ou son mari. Ici, on clame le divorce de tel couple, là on pousse au divorce par la révélation des activités extraconjugales des uns et des autres. Dans un contexte où la musique naît des faubourgs, il n’est pas étonnant que les vices l’emportent sur les vertus. Et quand on sait que la musique est la chose la mieux partagée au Congo, le risque est là de la voir détruire tout l’édifice culturel et social que l’école a construit. On ne chante plus pour éduquer. On ne chante plus pour gagner la vie comme le disait le Grand maître Franco : « na yemba ka po na zua mosolo na bokolo bana na ngaï » (« Je chante pour gagner de l’argent et nourrir ma progéniture »). Aujourd’hui, on chante pour nuire ou détruire. La chanson congolaise sert désormais à l’autopromotion. Des nantis supportant mal l’anonymat se font chanter pour être visibles.
Résultat : la musique perd en qualité. D’où le rejet d’un genre de chansons par des vrais médias et certaines communautés. Et, rares sont désormais ces chansons à même de pénétrer tous les milieux et de se faire accepter au-delà du Congo avec un rayon limité à l’arrondissement, voire au quartier. La musique congolaise n’existe plus. Il existe la musique de Pointe-Noire, de Brazzaville, de Dolisie, d’Owando, de Ouesso ou de Nkayi.
On y est. Sinon, on y va à pas de géants. Le dire est exagéré ? Van Francis Ntaloubi Notification:Non |