Interview : Édie Paulette Nanda : « J’invite les femmes à se battre pour leurs rêves »Jeudi 5 Août 2021 - 20:04 Développer et promouvoir les produits du terroir congolais tel est le but de Secret d'Edie, une initiative d'Édie Paulette Nanda âgée de 38 ans, entrepreneure camerounaise dans l’agro-alimentaire, résidant au Congo. Un projet qui voit le jour en février 2019 et fait son bout de chemin. Situé à Brazzaville, cet espace met en lumière les produits de seize entrepreneurs de la place, une façon pour la jeune femme de valoriser les produits faits au Congo par les Congolais.
Édie Paulette Nanda (E.P.N.) : Après avoir obtenu un diplôme en communication de masse, je me lance dans la vie active où j’ai pu travailler à la Commercial Bank-Cameroun. De retour à Brazzaville, je travaille tour à tour à express MTA, à N-Soft et à Design&Technology. En 2014, je prends le risque d’investir dans un restaurant de gastronomie africaine que je nomme « Les Noces de Cana ». Riche expérience avec ses hauts et ses bas, elle m’a donné un aperçu de l’entrepreneuriat que j’avais toujours espéré. Durant cette activité, j’ai pu tester la plupart de mes recettes, notamment la purée de piment douce et aromatisé, que j’ai commencé à commercialiser très vite. L.D.B.C. : Et quelles ont été les difficultés auxquelles vous avez été confrontée ? E.P.N. : Je dirai le manque de formation en transformation agroalimentaire, notamment sur la technique de conservation sans laquelle un tel projet ne peut être viable. Conséquence, la mise en œuvre de ce projet a été retardée vu que les premiers tests dans mon restaurant ont été lancés en 2014. C’est seulement en février 2019 qu’une recette a pu être conservée hors frais. Plusieurs autres difficultés se sont accumulées comme le manque d’expérience en entrepreneuriat et en techniques de gestion, le manque de moyens financiers suffisants, l’incapacité d’obtenir un financement conséquent d’une banque ou micro-finance de la place. Néanmoins, j’ai bénéficié des micro-crédits de Hope à deux reprises, 250 000 FCFA au départ, puis 350 000 FCFA au deuxième cycle avec leur système de remboursement hebdomadaire assez contraignant. Après le lancement du projet, d’autres problèmes se sont présentés comme celui de l’emballage et du conditionnement des produits, de la commercialisation spécialement l’absence de boutique dédiée à la commercialisation des produits locaux, les difficultés pour les grandes surfaces d’accepter des produits locaux fabriqués sans label, les problèmes de recouvrement dans les point de dépôts vente, l’incapacité de recruter des commerciaux, le manque de sensibilisation des populations locales sur le consommer local. L.D.B.C. : Comment les Congolais ont-ils accueilli ces nouveaux produits ? E.P.N. : Peu à peu les Congolais s’intéressent aux produits locaux mais il y a encore du travail à faire, notamment sur les mentalités. Beaucoup pensent que parce qu’il s’agit de produit local, il doit être moins cher. Mais nous prenons la peine de leur expliquer qu’il y a non seulement le coût des matières premières, mais également des emballages qu’il faudrait prendre en compte.
E.P.N. : La boutique représente les marques de seize artisans congolais et on en compte multiplier pour donner plus de choix, de diversité et de visibilité à nos produits locaux. On prévoit également, faire de l’animation sur le site, organiser des dégustations pour rompre avec les idées taboues, enfin organiser des ateliers de sensibilisation au bien-être et l’intérêt de consommer local. Ce qui fait que nos produits correspondent au pouvoir d’achat du Congolais moyen et nos tarifs se situent entre 500 FCFA à 5000 FCFA. L.D.B.C. : Promouvoir les initiatives locales est l’un de vos objectifs. Quelle est votre politique pour y parvenir ? E.P.N. : C’est de développer avant tout un réseau de solidarité entre les petits artisans locaux. Pour être passé par là, je sais ce que ça représente d’investir avec des petits capitaux et vivre de cette même activité. Ce n’est pas facile, mais comme le dit le dicton, l'union fait la force et, à cet effet, des réflexions sont en cours sur la possibilité de mettre sur pied un label commun pour faciliter la commercialisation des produits locaux, sur le territoire local et même de la sous-région. L.D.B.C. : Est-ce que le fait d’être une femme a été un handicap à votre ascension ? E.P.N. : Le fait d’être une femme est ma plus grande motivation. Déjà je ne suis pas mariée, et je m’organise plutôt bien jusque-là dans la gestion de ma famille et de mes activités. Hélas au quotidien il y a toujours des hommes ou même de femmes qui vous reprochent votre indépendance car certains hommes n’acceptent pas l’autorité de la femme. L.D.B.C. : Comment, en tant que coach en entrepreneuriat, pensez-vous emmener les femmes à bâtir leurs propres empires ? E.P.N. : Il sied de souligner au passage que l’attitude de la jeune fille d’aujourd’hui est le reflet de notre société, une société où pendant longtemps on a fait croire à la femme qu’elle n’avait de valeur que lorsqu’elle trouvait un homme. Résultat, les femmes se battent plus pour être dans des foyers que pour s’assumer. Ce que je conseille aux femmes, c’est de se battre pour leurs rêves, et de ne jamais abandonner leurs projets. Une femme qui a un revenu peut tout aussi soutenir son homme dans le foyer, et elle est plus libre de faire face aux besoins de sa famille ainsi qu’aux siens sans avoir besoin de quémander. Propos recueillis par Berna Marty Légendes et crédits photo :1- L'entrepreneure camerounaise Édie Paulette Nanda /DR
2- Des Jus et confitures à base de fruits de la marque Secret d’Edie /DR Notification:Non |