Faire appel à Berlusconi pour sauver une Congolaise tétraplégique ?

Lundi 14 Avril 2014 - 12:04

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Cette curieuse proposition vient d’un missionnaire italien contesté. Elle divise l’opinion italienne

D’abord, le contexte, peu banal. Silvio Berlusconi, plusieurs fois Premier ministre, a été condamné à une peine de prison immédiatement commuée en travaux d’intérêt public. Un procès, très long et tortueux, a fini par le reconnaître coupable de fraude fiscale. Mais la justice italienne dispose qu’au-delà d’un certain âge, aucun condamné ne peut aller en prison, mais doit, à la place, effectuer des travaux bénéficiant à la communauté.

À presque 78 ans, le fondateur du parti Forza Italia, propriétaire de l’équipe de football du Milan AC, des chaînes de télévision du groupe Mediaset, homme le plus riche d’Italie qui a régné sur la scène politique pendant plus de vingt ans, ne pouvait visiblement pas aller en prison. L’alternative était de rester aux arrêts domiciliaires ou bien d’effectuer ces fameux travaux d’intérêt public. Lui-même avait opté pour aller chaque semaine servir dans un hospice de vieillards handicapés des environs de Milan, sa ville de résidence et capitale économique de l’Italie.

C’est dans cette phase où la justice évalue les options à retenir — avec peut-être, affirment les médias, une préférence pour un service hebdomadaire dans un hospice — qu’entre en jeu le père Fedele Bisceglia. Religieux franciscain, il a déjà séjourné au Congo-Brazzaville. Mais sa notoriété en Italie s’est faite sur un triste épisode qui l’a vu condamné par la justice de son pays pour, disons, indélicatesse sur la personne d’une religieuse. Des faits graves, qu’il a toujours niés avec énergie, multipliant les coups d’éclat, y compris en vivant sous un pont de Consence (en Calabre, au sud) pour protester de son innocence.

Sa proposition aujourd’hui est toute simple. La justice s’interroge sur le lieu où Berlusconi devra accomplir sa peine ? Pas de problème, dit père Fedele, comme on l’appelle en Italie : il a écrit tout simplement à Berlusconi. « Je lui ai écrit pour lui proposer de venir donner un coup de main au “Paradis des pauvres”, la nouvelle structure que nous mettons sur pied pour les enfants abandonnés et, notamment de venir aider aux soins d’une enfant de 12 ans tétraplégique, que j’ai trouvé abandonnée au Congo-Brazzaville et que j’ai ramenée en Italie. Elle ne marche pas, ne parle pas, mais elle est toujours souriante, arrachant larmes et sourires à tous ceux qui l’approchent. »

Et le missionnaire d’appuyer : « Le Paradis des pauvres accueillera tous les enfants handicapés. Mais je suis pauvre. Aujourd’hui, je suis contraint de ramasser de la ferraille et de la recycler. À pas d’escargot, je travaille à ce projet tous les jours. Y arriverai-je ? ». Il appelle Berlusconi à l’aide, le tutoyant à la manière italienne : « Viens à Cosence pour aider les enfants malheureux. Viens, tu seras accueilli avec le grand amour franciscain et chaleur humaine. Si tu ne peux venir, aide-moi à aider ces enfants ! » Fin de la lettre.

Personne ne peut dire si l’ancien Premier ministre répondra au moins à la demande d’aide du vieux missionnaire. Mais la presse de samedi ne bruissait que de cette requête que d’aucuns qualifiaient déjà de cocasse. Il y a ceux qui y allaient de leurs sarcasmes, soulignant que Silvio Berlusconi était certes généreux, mais que sa proximité avec le missionnaire chahuté n’améliorerait pas sa propre image assez écornée en matière des mœurs. Et il y a ceux pour qui cette invitation à Cosence est tout simplement une irrévérence de plus contre l’homme d’État.

Lucien Mpama