Lettre de Valentin Ollessongo à sa femme: à ma très chère Marie Suzanne

Vendredi 19 Mai 2023 - 13:36

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Née à Brazzaville un 13 février 1958, tu aurais pu venir, le 14, pour symboliser le bouquet fleuri de notre amour en ce jour exaltant de la Saint-Valentin. La fête serait notre fête totale, la belle fête des amoureux.

Marie Suzanne,

Valentin t’adresse ces mots pour te garder en éveil dans ce nouveau monde fermé où tu campes à présent. Je suis resté sans voix, sans voie mais ces mots tiennent à  consolider notre union, notre riche parcours, parce que je te suivrai demain, où tu es allée, j’irai. Le plus important, comme tu vois, reste l’amour que je t’ai toujours donné. Je t’ai aimée, je t’aime plus fort et je t’aimerai advitam eternam.

Marie Suzanne,

Si tu n’avais pas existé, le Tout-Puissant t’aurait créé pour combler mon manque. Parce que la Grande école de Poto-Poto et son environnement qui ont laissé planer un doute sur ton avenir avaient vite résolu tes parents à t’orienter vers le village avec sa morale et ses normes encore bien rigides. Tu débarquais à Oyo, en octobre 1971, dans ce bled aux allures d’un camp privilégié pour vacanciers en quête de tranquillité et de méditation, tellement à cet endroit, la nature si luxuriante se prêtait à la réflexion et aux bonnes études. Ici, la réputation de l’école de Sainte -Radegonde n’est pas éteinte. Cette grande école catholique, on le sait, a vu sortir plusieurs cadres du pays avant l’indépendance après Boundji. Il faut dire que le collège est encore en gestation, bâti en contre-plaqués avec des poteaux en rôniers et un contenu pourtant de bonne qualité.

Marie Suzanne,

Tu arrivais innocemment de Brazza et Oyo allait être notre porte de convergence, notre lieu de rencontre et de bénédiction. Tu avais gardé la lucidité d’une adolescente hors du commun, presque déjà mature à la fin de ta première année en brousse. Très tôt, tu as su repousser les velléités et pulsions des prédateurs; enseignants, infirmiers et autres petits fonctionnaires qui bourdonnaient comme des abeilles autour de toi.

Je deviendrai l’heureux élu, mais à une seule condition, disais-tu, de faire montre de patience, pour te préserver des gestations précoces observées chez la plupart de tes congénères. Quand je monte à Brazzaville au lycée Savorgnan, mon frère et ami Dominique doit veiller au grain sur toi comme la prunelle de ses yeux pour te permettre de poursuivre ta marche dans ce petit collège très typé et enrichi par une auréole qui dépassait les bornes de cette coquête ville nouvelle. A Oyo, tu as appris à jouer au handball dont les équipes en version hommes et femmes faisaient la fierté de tous dans la région de la Cuvette.

Après le collège d’Oyo, celui de Boundji va marquer une étape finale de ton brillant parcours et malgré les tracasseries en tout genre, tu as su tenir le cap jusqu’au bout en décrochant avec éloquence un brevet (BEMG) des plus sélectifs dans le pays cette année.

S’ouvraient alors pour toi les couloirs du lycée de la Révolution, à Brazzaville, où parmi les collègues se distinguaient le brillant Dr Assounga, le Pr Prosper Bouya et autres où tu avais toujours une place au tableau d’honneur.

Ensuite, le lycée Lumumba t’accueille parce que Révolution n’a pas ouvert des classes terminales. Tu étais matheuse, adepte de chimie et de biologie avec MM. Ngatsé Obala et Ngoyo Adouma comme professeurs de renommée dans les lycées à cette époque. Tu avais surtout l’ambition affirmée de faire des études de médecine. Le Bac en poche cette année 1978, le chemin de l’INSSA sera fermé avec regret pour une orientation, d’abord en Pologne, puis à la faculté de sciences. Cette année-là, la vie de couple avait pris le dessus en attendant l’arrivée de notre premier enfant, notre fille Rosa.

Mais comme un naturel qui t’a poursuivie, car tu étais la principale conseillère de tes deux mamans vendeuses de poissons au marché, tu avais ainsi décidé de te réinscrire à la faculté de sciences économiques où, quelques années après, tu as passé avec succès la licence en sciences économiques avec collègues de promotion qui ont toujours apprécié ton mérite comme Gilbert Ondongo, Blandine Okoko, Honoré Yandoma.

En France où nous nous sommes rejoints tu as réalisé un parcours élogieux ramenant dans ton escarcelle des diplômes de haut niveau:

  • Maîtrise en sciences économiques à l’université de Créteil,
  • DEA en sciences économiques à Paris II,
  • Diplôme d’études supérieures en gestion à l’EDEP, actuellement côtée comme une des écoles prestigieuses de gestion en France.

Rentrés tous à Brazzaville, après une moisson fructueuse en France, Mme Ollessongo a commencé sa carrière de fonctionnaire au ministère du Plan et de l’Economie avant de porter son dévolu vers la direction de Douanes où elle a achevé sa carrière avec le grade d’inspecteur principal. Tous ceux et toutes celles qui l’ont côtoyée dans les bureaux du beach et de Maya-Maya sauront apprécier mieux que moi la pertinence de tes qualités professionnelles et intellectuelles. Très remarquée au cours de la formation à l’école de Bruxelles d’où elle sort major de la promotion et après un séminaire à Neuilly, en France, Mme Ollessongo sera sélectionnée comme experte pour représenter le Congo au bureau régional de l’OMD pour l’Afrique de l’Ouest et du centre à Abidjan, en Côte d’Ivoire.

Mme Ollessongo a dû interrompre une carrière bien remplie pour assurer le suivi de la scolarité des enfants et surtout accompagner dans les domaines variés de l’économie son très cher époux nommé ambassadeur au Sénégal, au Maroc, au Cameroun et au Tchad où elle n’aura séjourné que quelques semaines.

En fin de compte, pour mieux cerner la personnalité de cette grande dame qui vient de nous quitter, je voudrais dire simplement que si j’ai eu l’exégèse sur la pointe de ma lance ancestrale, elle a eu la science infuse et le calcul mental au bout des ongles.

Marie Suzanne aura laissé le souvenir d’une femme conviviale, facile à vivre, aussi bien dans sa famille qu’auprès de ses amies:

  • Celles d’enfance comme: Assitou Doucouré, Clarisse Addas, Madeleine Kiba, Catherine Peya Catho, Marceline Mbochi, Suzanne Yoka, sa soeur Béatrice Ebaka, Martine Kouori, j’en oublie…
  • Ses amies de tous les temps et instants qu’elle a toujours considérées comme ses soeurs: Bernadette Nianga (Detty), Mmes Firmine Okongo, Ida Ngakala, Jacquie Ngatsongo,  Ondele, Marie Yvette Akiera, Marie Ongagna, Monique Mboulou, Brigitte Bobongo Oba, Marie Odile Ngakala, Romanie Buya, Stéphanie  Olessongo , Marguérite Ollessongo, la liste n’est pas exhaustive.

Marie Suzanne, tu nous quittes ce 1er mai 2023 en laissant derrière toi un vide abyssal, une oeuvre au goût d’inachevé pour la famille. De toi nous garderons à jamais dans nos coeurs le souvenir d’un exemple d’humilité et de solidarité. Puisse ta mémoire servir de référentiel à ton entourage, ta famille et aux cinq enfants et leurs progénitures.

Merci à tous; parents, amis et connaissances pour l’assistance multiforme et le partage dans cette profonde douleur.

Dieu a donné, Dieu a repris, accompagnons l’âme de Marie Suzanne dans la pure tradition d’amour et de paix en Christ.

Merci de l’attention.

 

Ton cher époux, inconsolable

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