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De l’inclusion financière : que nous apporte le Mobile Money ?Lundi 24 Février 2025 - 12:15 Lancé en 2007 par Safaricom au Kenya, le « Mobile Money » est un porte-monnaie électronique adapté au téléphone mobile. Il répond aux besoins d’inclusion financière, de sécurité des transactions, de facilitation et de digitalisation des échanges monétaires dans un contexte de faible bancarisation de l’économie et de précarité numérique. Transformant les opérateurs de téléphonie mobile en banques digitales de proximité, il reconfigure le système bancaire d’un pays. En Afrique subsahélienne où 75% de la population est exclue des services bancaires classiques et 60% n’a pas accès à l’internet mobile, cette innovation majeure apporte plus de 1 260 milliards de dollars de gains (GSMA, 2023). Le Congo l’a adoptée en 2012, avec un faible taux de bancarisation de 17% qui se dégrade pour atteindre 7% en 2023 ; alors que son taux de pénétration de la téléphonie mobile passe de 100% à 103% et celui d’internet mobile bondit de 7% à 61%. Deux enseignements s’imposent: 1- L’appropriation d’une innovation disruptive: Le porte-monnaie électronique remodèle le système bancaire en rendant les transactions financières plus simples, rapides, flexibles et sécurisées. Il offre une solution digitale diversifiée de dépôt, de retrait, de transfert, de paiement, de micro crédit renouvelable et d’épargne par un agent franchisé en opérations de téléphonie mobile. Son développement est facilité par l’accès à l’internet mobile, grâce aux technologies de la 4G qui représentent 44,4% d’abonnés en 2023 contre 38,7% en 2020, et à la baisse consécutive du tarif pondéré du méga octet de 2,72 FCFA en 2019 à 0,82 FCFA en 2023. Un abonné rapporte à son opérateur 4 952 FCFA par mois en 2012 contre 1 462 FCFA en 2023 dont 35,2% pour la 2G, 5,8% pour la 3G et 2,4% pour la 4G. Les économies d’échelle favorisées par les abonnements prépayés (98,22%) que post payés (1,78% ) améliorent la rentabilité du modèle économique avec 56,823 milliards FCFA en 2023 pour 3,431 millions d’abonnés dont 74,5% pour MTN et 25,5% pour Airtel. L’offre est segmentée en trois activités principales: le « Cash In/Out » ou dépôt et retrait d’argent (51,3% du volume des transactions), le « Cash et MoMoPay/Airtel Money » ou prêt et transfert (38,4%) et le « MoMo Pay/Airtel Money », épargne et paiement (30,4%). Les paiements marchands de proximité (factures, quittances) ou en ligne représentent 17% des transactions, les paiements groupés comme les salaires, les charges sociales et les prestations sociales (20%), les envois internationaux (28%) et les interopérabilités avec les banques classiques (36%). L’enquête ARTF/DGE (2024) indique que la demande est structurée à 75% par le Cash, 13% pour le service de cash et MoMo Pay/Airtel Money et 12% pour les services offrant uniquement le service de MoMo Pay et Airtel Money. Plus de 75,8 % des usagers utilisent les services de dépôts au moins une fois par semaine dont 29,1 % des dépôts en moyenne tous les jours, contre 46,7 % qui le font entre une et trois fois par semaine. Plus de 88,2% des usagers des services Momo Pay/Airtel Money les emploient une fois par semaine. Parmi eux, 48,7 % les utilisent en moyenne tous les jours, et 39,5 % de une à trois fois par semaine. Mais, depuis le 5 octobre 2019, le coût des transferts augmente en passant de 2,5 % à 3,5 % du montant envoyé, alors que le taux de la commission de retrait d’argent est passé de 1 à 0,8 %, contre 0,5 à 0,4 % pour le coût de la réception en 2023. Deux plateformes se distinguent : le Mobile Money Congo S.A. (MMC) de MTN et Ecobank, le Mobile Commerce Congo S.A. (MCC) d’Airtel avec BGFI Bank et autres partenaires. Elles ont signé une convention les unissant dans une association professionnelle des établissements de paiement. Sur les 1 568 merchants géoréférencés, 63,30 % sont situés dans les marchés, 26 % dans les grandes avenues et 10,5 % dans les petites avenues et ruelles. Leur franchise est financée par les fonds propres (25,8 %), l’emprunt (37,3 %) et les dons (55,5 %). Le chiffre d’affaires réalisé par 50% d’entre eux dépasse les 65 000 FCFA par mois. Ils utilisent à 63 % les deux plateformes, contre 29,9% employant uniquement le MMC et 7,1 % le MCC. Parmi eux, 24,6 % ont un compte dans une banque contre 75,4 % qui n’en possèdent pas. Les usagers en disposent à 34,3 % contre 65,7 % qui n’en possèdent point. 2-Les limites : Rapprochant la population pauvre du système bancaire, le porte-monnaie électronique est l’auxiliaire du compte bancaire classique. Il transite la monnaie virtuelle vers la monnaie réelle. La faible connectivité à l’internet mobile à haut débit de 34,4 points sur 100 en 2023, situe le Congo dans la moyenne de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale contre 24,2 points en 2014. Le réseau de 3 000 km de fibre optique, reliant Pointe-Noire à Ouesso avec des boucles optiques métropolitaines de 700 km est faiblement déployé au niveau local, alors qu’il est interconnecté avec les pays limitrophes. Le climat des affaires du pays affecte l’approvisionnement des entreprises en électricité (57,9 %), comme les lourdeurs administratives et le recouvrement (53,2 %), la concurrence (43,6%), le transport et logistique (35,3 %) et les Technologies de l'information et de la communication (TIC) (7,9%) (Note de conjoncture économique, février 2025). Le paiement des factures par mobile monnaie augmente les commissions des merchants (49,3%), facilite leurs ventes (23,1%), développe des nouvelles relations commerciales (16,5%) et crée des nouvelles opportunités d’affaires (11,1%). Ainsi, l’inclusion financière nécessite la maturité digitale, favorisée par la simplification administrative, le développement de l’e-gouvernance, l’e-commerce, l’e-finance, dopée par les infrastructures des télécommunications modernes, les plateformes collaboratives et le climat des affaires incitatif. Le tout repose sur un système d’éducation dotant les jeunes des compétences numériques, développant leur employabilité et l’entrepreneuriat dans les TIC. Emmanuel Okamba, maître de conférencesHDR en sciences de gestion Edition:Édition Quotidienne (DB) Notification:Non |