Immigration : Cécile Kyenge regrette la lenteur de l’intégration en Italie

Lundi 1 Septembre 2014 - 20:00

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Ancienne ministre dans le gouvernement d’Enrico Letta, l’Italo-congolaise appelle au courage dans la diversité.

L’Italo-congolaise Cécile Kyenge Kashetu n’a pas été retenue dans le gouvernement formé par le Premier ministre italien, Matteo Renzi, en février dernier. Même le ministère dans lequel elle a été la première femme noire d’un gouvernement italien n’a pas été maintenu. Mais les questions d’intégration continuent de tarauder la vie sociale italienne à l’heure où le pays est appelé à des choix cruciaux à propos de l’immigration. Des vagues d’étrangers débarquent chaque jour sur ses côtes et la réponse de la classe politique n’innove pas en la matière.

En effet, si l’extrême-droite continue de soutenir que l’Italie n’a pas vocation à accueillir tous les désespérés du monde; si la droite prône la fermeté et les retours forcés chez eux des clandestins et si la gauche continue de mouliner un vague discours humaniste dont on ne sait plus si c’est par conviction, les drames de l’immigration s’imposent à toute la péninsule. Que faire ? Le Vatican et l’Église catholique insistent : on ne peut fermer les yeux devant le désespoir de ces pauvres hères poussés à la fuite par les guerres, la faim ou les extrémismes.

En raison précisément de son expérience au poste novateur de ministre de l’Intégration, Cécile Kyenge est devenue en quelque sorte la « consultante » obligée sur les questions d’immigration en Italie et même en Europe. Elle continue de répéter que si l’on ne fait pas la distinction entre les immigrés régulièrement établis et les clandestins, et si le traitement qui est réservé à tous sera seulement basé sur la couleur de leur peau, rien d’efficace ne se fera dans ce domaine, que ce soit par la gauche ou par n’importe quel gouvernement de droite en Italie.

« Il ne s’agit pas seulement de travailler sur le présent ; il faut tracer la vision d’un futur », estime celle qui siège désormais comme députée au Parlement européen. « Il nous faut réfléchir à la manière de gérer la société italienne de demain qui sera, quoi qu’il arrive, multiethnique », estime-t-elle. « L'intégration sera donc un thème qui s’imposera toujours. Et le fait qu’il n’y ait plus de ministère qui lui soit entièrement dédié n’en diminue pas l’acuité. Il y a aujourd’hui, auprès du ministère du travail, une délégation qui poursuit cette tâche d’intégrer, mais par le biais du travail », ajoute Mme Kyenge, membre du parti démocratique, la plus grande formation de gauche à laquelle appartient aussi le premier ministre Renzi.

Mais elle reconnaît volontiers que les progrès à accomplir sont encore importants. Elle en veut pour preuve l’élection récente à la tête de la Fédération italienne de football, FIGC, de Carlo Tavecchio. Peu avant d’être élu, l’homme avait qualifié les joueurs noirs du championnat italien de football de « mangeurs de banane ». Une polémique en était résultée, qui n’a pas suffi aux fédérations sportives pour faire bloc contre lui, au contraire. « Il a manqué du courage à la FIGC et à notre pays pour faire un pas en avant sur cette affaire », estime Cécile Kyenge.

Et elle préconise : « Tavecchio aujourd’hui est président. Mais la victoire n’arrivera que lorsque nous saurons culturellement condamner sans exception, à gauche comme à droite, un tel manquement au sens de ses propres responsabilités ». Il y a quelques semaines encore Mme Kyenge avait pris la défense du joueur de talent noir qu’est Mario Balotelli, traîné dans la boue après l’élimination sans gloire de la sélection italienne du Mondial de football au Brésil. Balotelli et elle-même ne comptent plus les épisodes à la banane qui les ont visés directement ou à travers des réseaux sociaux en surchauffe.

Lucien Mpama