En Italie aussi, on a dit : « Je suis Charlie »

Samedi 17 Janvier 2015 - 12:37

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Classe politique, leaders religieux, joueurs de football ont marqué à leur manière la solidarité avec la France victime de terrorisme.

Les joueurs de l’autre grand club de football de la capitale italienne, la Lazio Rome, sont descendus dimanche dernier sur le terrain avec des maillots barrés du désormais célèbre slogan « Je suis Charlie ». Mais ce geste n’en est qu’un parmi des dizaines d’autres qui ont marqué la solidarité de la péninsule avec la France frappée par les lourds attentats du 7 janvier dernier contre les locaux et les journalistes du journal Charlie Hebdo. D’un peu partout sont montés vers Paris gestes et personnes pour se joindre à la marche de dimanche à Paris devenue marche mondiale pour la liberté, alors que s’est amorcée une réflexion en Italie sur le sens de ces terribles événements.

Le Premier ministre italien Matteo Renzi était d’ailleurs dans le cortège des leaders dimanche à Paris aux côtés du président François Hollande, de la chancelière allemande Angela Merkel et de bien d’autres grands dirigeants. La Communauté catholique romaine Sant’Egidio dont l’engagement dans la cause de la paix et du dialogue des religions n’est plus à rappeler était elle aussi dans le cortège. Ce jeudi 15 janvier, la reprise des cours à la prestigieuse université romaine de La Sapienza s’est faite par une minute de silence. Les étudiants de diverses provenances s’y sont pliés de bonne grâce, eux qui passent pourtant pour des frondeurs invétérés et des rebelles aux institutions.

« Cette attaque va à l’encontre de tout ce que nous aimons. L’université est née pour vaincre l’obscurantisme et pour faire en sorte que tous les hommes puissent se reconnaître dans le nom de fraternité et de culture », a expliqué Eugenio Gaudio, le recteur de l’athénée célèbre. Un autre point de référence culturelle incontournable d’Italie, la revue jésuite Civiltà Cattolica, appelle les consciences à savoir faire le tri. « Il est erroné de s’en prendre aux immigrés de religion musulmane. Il faut au contraire saisir l’instant pour nous interroger sur l’origine d’une violence qui n’est pas du tout une guerre de religion », écrit le grand intellectuel jésuite Antonio Spadaro.

À ces prises de position qui se sont échelonnées le long de la semaine, on ne manquera pas d’ajouter celle du pape François en personne. Chef d’une religion pourtant longtemps brocardée par Charlie Hebdo, le pape argentin a qualifié de « horrible » l’attentat du 7 janvier à Paris. Et devant les diplomates venus lui présenter les vœux pour la nouvelle année, il a réitéré lundi dernier sa ferme condamnation de la violence surtout lorsqu’elle est exercée au nom de Dieu. « Le terrorisme d'origine fondamentaliste en Syrie et en Irak est une conséquence de la culture du rejet appliquée à Dieu. Il refuse Dieu lui-même, le reléguant au rang de pur prétexte idéologique ». Un « Moyen-Orient sans chrétiens serait un Moyen-Orient défiguré et mutilé », a-t-il ajouté en rappelant les violences inouïes que subissent les chrétiens sur leurs terres dans cette partie du monde.

Le Souverain pontife a continué à marteler son rejet assuré du refus de tolérance, de la violence au nom de Dieu. Et il l’a même fait presqu’en « allant au contact » comme diraient les militaires, puisque lundi il a entamé un voyage au Sri Lanka qui doit s’achever par les Philippines. Dans l’un, les catholiques ont survécu à la persécution (exercée au 16è siècle par le colonisateur hollandais), dans l’autre ils constituent une minorité menacée par un irrédentisme musulman qui cherche à créer son propre Etat avec ses propres règles. Mais dans les deux pays le message constant a été : « se tuer au nom de nos religions relève du passé ».

Lucien Mpama